Comment faire face à une nouvelle pandémie en tirant les leçons du Covid 19 ? Une question qui mobilise les chercheurs et les États, qui se heurtent néanmoins à une part d’incertitude et à un manque de financement.

Voici trois ans, le premier cas de Covid était identifié en Chine, point de départ d’une pandémie aux conséquences sans précédent. À travers le globe, chercheurs et États se questionnent sur la capacité de l’humanité à faire face à un nouveau scénario similaire.

" Nous n’agissons pas assez pour être prêts pour la prochaine pandémie ", estime auprès de l’AFP William Rodriguez, à la tête de Find, une fondation sous l’égide de l’ONU qui cherche à améliorer l’accès aux tests de dépistage dans le monde.

Ces derniers font partie des outils cruciaux pour éviter l’émergence d’une nouvelle pandémie comme celle du Covid. Autres dispositifs: l’identification des virus ou bactéries qui pourraient provoquer la prochaine pandémie, la découverte de vaccins ou de traitements en urgence ou encore la production et la distribution de ces produits.

 

Des gens attendent d’être testés pour le Covid-19 à Pékin le 3 décembre 2022. ©Jade GAO / AFP

 

L’objectif ? Éviter une nouvelle pandémie après trois ans de Covid. Dans cette optique ont débuté la semaine dernière, dans le cadre de l’OMS, des négociations internationales sur la lutte contre les futures pandémies. La Banque mondiale, elle, a lancé un fonds dédié au sujet et alimenté par les pays du G20 (pour l’heure à hauteur de 1,6 milliard de dollars).

Nouveaux traitements

Les initiatives sont aussi privées. En Australie, l’homme d’affaires Geoffrey Cumming a consacré 170 millions de dollars pour financer un centre de recherches dirigé par l’infectiologue Sharon Lewin.

Son équipe va se pencher sur des technologies susceptibles de servir de base à des traitements rapidement adaptables contre de nouveaux pathogènes. Modèle à suivre: les vaccins à ARN messager face au Covid. Le centre sera " opérationnel " d’ici à six mois, a annoncé la Pr Lewin à l’AFP.

 

Une femme effectue un test de dépistage du Covid-19 à Pékin le 11 décembre 2022. ©Noel Celis / AFP

 

L’objectif, ici, est de savoir répondre en urgence à un pathogène inconnu. Mais l’anticipation passe aussi par l’identification des risques connus.

L’OMS travaille ainsi à la mise à jour d’une liste de microbes à risque. À surveiller particulièrement: les autres coronavirus ainsi que le virus de la grippe, bien sûr, mais aussi Ebola et Zika.

" Pour chacun de ces virus, seules quelques mutations " pourraient démultiplier leur diffusion, prévient l’épidémiologiste Jennifer Nuzzo, de l’université américaine Brown.

D’autres pathogènes sont sous surveillance comme les arenavirus, les paramysovirus – famille de la rougeole et des oreillons – ou le virus Marburg.

Manque de volonté politique

Ces efforts de recherches seront-ils suffisants ? De nombreux experts et activistes redoutent surtout un manque de volonté politique, qui se traduit par la question des financements. Ainsi, l’organisation CEPI (cofondée par plusieurs États et la fondation Bill et Melinda Gates pour affronter les épidémies) cherche 800 millions de dollars pour boucler un plan sur cinq ans.

Les décideurs ne devraient pas oublier la question pandémique même s’ils sont " concentrés sur les nombreuses crises actuelles ", dans un contexte difficile géopolitiquement comme économiquement, estime auprès de l’AFP Richard Hatchett, à la tête de CEPI.

Et comment garantir l’accès de tous les pays, y compris les plus pauvres, à un vaccin ou un traitement ? " Pour moi, la tragédie du Covid aura été la distribution inégale des vaccins, même une fois disponibles ", déclare l’épidémiologiste.

Les experts interrogés par l’AFP sont d’accord. Il sera impossible de bien répondre à la prochaine pandémie si de grandes régions comme l’Afrique, l’Amérique du Sud, l’Asie du Sud ou le Proche-Orient n’ont pas accès à des traitements, notamment en les produisant elles-mêmes.

Pour beaucoup d’activistes, il faudrait déjà prévoir de lever les brevets d’éventuels traitements à l’importance majeure. Mais l’idée apparaît peu réaliste face à l’opposition du secteur pharmaceutique et d’une grande partie des pays développés.

Et il y a peu d’évolution à attendre: le ton adopté par ces pays dans le cadre des discussions actuelles à l’OMS est " extrêmement inquiétant ", estime Mohga Kamal-Yanni, représentante de l’ONG People’s Vaccine Alliance.

Avec AFP