L’Iran est outré après la publication de nouvelles caricatures dans le magazine français Charlie Hebdo, cette fois ciblant l’ayatollah Ali Khamenei. L’hebdomadaire satirique a publié le 4 janvier des dessins que Téhéran estime " insultants ". La République islamique a réagi en fermant un Institut français de recherche à Téhéran et en convoquant l’ambassadeur de France.

L’Iran a averti mercredi Paris qu’il réagirait après la publication de caricatures " insultantes " du chef suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, dans le magazine satirique français Charlie Hebdo.

L’hebdomadaire satirique a publié mercredi des dizaines de caricatures mettant en scène la plus haute personnalité religieuse et politique de la République islamique.

Il s’agit des caricatures retenues dans le cadre d’un concours lancé en décembre, alors que des manifestations se multipliaient en Iran après la mort en détention le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne arrêtée pour avoir enfreint le code vestimentaire strict du pays.

Charlie Hebdo a déclaré que la publication des caricatures de Khamenei visait à soutenir les " Iraniens qui se battent pour leur liberté ".

" L’acte insultant et indécent d’une publication française en publiant des caricatures contre l’autorité religieuse et politique ne restera pas sans réponse efficace et ferme ", a déclaré le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian sur Twitter. " Nous ne permettrons pas au gouvernement français de dépasser les bornes ", a-t-il ajouté.

Charlie Hebdo avait expliqué en décembre que ce " concours international pour produire des caricatures " de Khamenei visait à soutenir les " Iraniens qui se battent pour leur liberté ".

La première réaction est tombée hier: la République islamique a annoncé jeudi la fermeture de l’Institut Français de Recherche en Iran (IFRI), " comme une première étape " de la réponse iranienne aux caricatures, affirme un communiqué du ministère iranien des Affaires étrangères.

Selon son site, l’IFRI est affilié au ministère français des Affaires étrangères. Il est né en 1983 après la fusion de la Délégation Archéologique Française en Iran (DAFI), créée en 1897, et de l’Institut Français d’Iranologie de Téhéran (IFIT), fondé en 1947 par Henry Corbin.

L’IFRI, situé dans le centre de Téhéran, avait été fermé durant de longues années. Il avait rouvert sous la présidence du modéré Hassan Rohani (2013-2021) comme un signe du réchauffement des relations entre la France et l’Iran. Il comprend notamment une riche bibliothèque, utilisée par les étudiants de la langue française et des universitaires iraniens.

La veille, l’ambassadeur de France Nicolas Roche a été convoqué mercredi soir par le ministère des Affaires étrangères.

Le 7 janvier 2015, une attaque du bureau de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo avait fait plusieurs morts, suite à la publication de dessins jugés insultantes du prophète Mohammad.

" La République islamique d’Iran, n’accepte, en aucune façon, l’insulte de ses valeurs (…) islamiques, religieuses et nationales (…) et la France n’a pas le droit d’insulter ce qui est sacré (…) pour les pays musulmans sous le prétexte de la liberté d’expression ", a indiqué le porte-parole du ministère Nasser Kanani.

L’Iran " considère le gouvernement français responsable pour cet acte haineux, insultant et injustifié ", a-t-il ajouté dans un communiqué, précisant attendre des " explications " de Paris.

Nathalie Loiseau, une députée française du Parlement européen et ancienne ministre (2017-2019), a elle décrit la réaction iranienne comme une " tentative d’ingérence " et une " menace " sur Charlie Hebdo.

" Que ce soit parfaitement clair: le régime répressif et théocratique de Téhéran n’a aucune leçon à donner à la France ", a-t-elle dit sur Twitter.

À Washington, le porte-parole du Département d’État Ned Price, questionné au sujet des caricatures publiées mercredi, a indiqué à la presse que les États-Unis se tenaient " du côté de la liberté d’expression " que ce soit " en France ou en Iran ".

Charlie Hebdo a publié les caricatures dans une édition spéciale pour l’anniversaire de l’attentat meurtrier contre son bureau parisien le 7 janvier 2015. Ce dernier avait été perpétré par des assaillants déclarant agir au nom d’Al-Qaïda pour venger la décision du journal de publier des caricatures du prophète Mahomet.

La publication de ces caricatures avait suscité beaucoup de colère dans les pays musulmans, et les attentats de 2015 avaient apporté une vague de soutien au magazine à travers le monde.

Avec AFP