Pour la première fois, à la Conférence de Munich sur la sécurité, les États-Unis ont accusé la Russie de commettre des " crimes contre l’humanité " en Ukraine, affirmant que les forces de Moscou ont mené des attaques " généralisées et systémiques " contre la population civile du pays. 

Intervenant à la Conférence sur la sécurité qui se tient à Munich, la vice-présidente des États-Unis Kamala Harris, une ancienne procureure, a fait une glaçante énumération des exactions attribuées à la Russie en Ukraine, citant les bombardements systématiques visant les civils et les infrastructures critiques, les tortures et les viols attribués aux soldats russes, les déportations d’Ukrainiens en Russie, y compris de milliers d’enfants séparés de leur famille. Kamala Harris a également évoqué la force de l’Otan, affirmant que " l’alliance est plus forte que jamais ".

L’armée exhume une fosse commune de soldats ukrainiens à Izioum (AFP)
" Crimes contre l’humanité "

" Nous avons examiné les preuves, nous connaissons les normes juridiques et il n’y a pas de doute: ce sont des crimes contre l’humanité ", a-t-elle déclaré lors d’un discours. " Et je dis à tous ceux qui ont perpétré ces crimes et à leurs supérieurs ou complices dans ces crimes: vous en rendrez compte ", a-t-elle prévenu.

Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, en février 2022, les États-Unis ont documenté ou répertorié plus de 30 600 cas de crimes de guerre commis par les forces russes en Ukraine, précise le département d’État américain. " Il ne peut y avoir d’impunité pour ces crimes ", a insisté le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken dans un communique séparé.

Kiev a appelé à la mise en place d’un tribunal spécial pour juger les plus hauts responsables russes mais sa forme exacte soulève des questions juridiques complexes. Au diapason de ses alliés, la vice-présidente américaine a aussi réaffirmé que les États-Unis, de loin le principal fournisseur en armes à Kiev, soutiendraient ce pays " aussi longtemps qu’il le faudra " et elle a redit la solidité du lien transatlantique et de l’Otan face à la Russie.

" Plans impérialistes "

Plus tôt, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg avait mis en garde contre une défaite de l’Ukraine. " Le plus grand risque de tous est que Poutine gagne. Si Poutine gagne en Ukraine, le message pour lui et d’autres dirigeants autoritaires sera qu’ils peuvent utiliser la force pour obtenir ce qu’ils veulent ", a-t-il averti. Le Kremlin mobilise " des centaines de milliers de troupes " et se procure " davantage d’armes auprès de pays autoritaires tels que l’Iran et la Corée du Nord ", a-t-il dit.

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a lancé un appel à " redoubler d’effort " dans l’aide militaire à l’Ukraine, afin de " faire échouer les plans impérialistes de (Vladimir) Poutine ".

Armement prioritaire

Près d’un an après le lancement, le 24 février 2022, de l’invasion russe, aucun signe d’apaisement n’est en vue. Les troupes russes se sont emparées de près d’un cinquième du territoire ukrainien, les combats ont fait des dizaines de milliers de victimes dans les deux camps, et l’Otan redoute une nouvelle offensive de grande envergure de Moscou prochainement.

" Notre priorité est de garantir la force de l’Ukraine sur le terrain ", a plaidé Mme Harris. La veille, le président français Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz avaient dit craindre une guerre longue lors de la première journée de la Conférence de Munich. La présidente de la Commission a particulièrement insisté sur une accélération de la production d’armements standard, comme les munitions, dont Kiev " a désespérément besoin ".

Les membres de l’UE étudient actuellement les moyens de procéder à des achats communs de munitions pour l’Ukraine, selon des sources diplomatiques à Bruxelles. L’armée américaine a annoncé vendredi un contrat de près d’un milliard de dollars pour augmenter la production d’obus et de munitions d’artillerie de calibre 155 mm, utilisées en grande quantité par l’Ukraine. L’Ukraine réclame aussi à cor et à cri des avions de combat aux alliés qui restent réticents à ce stade.

Maxime Pluvinet avec AFP