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Le récent scrutin en Turquie a secoué l’islam politique. Au terme du premier tour de l’élection présidentielle, Recep Tayyip Erdogan n’a pas recueilli les suffrages nécessaires à sa réélection. En fait, cette élection dépasse le processus démocratique du fait que le leader turc se targue d’être un modèle aux multiples facettes et orientations. Son parcours n’est pas négligeable: 11 ans, 5 mois et 14 jours à la tête du gouvernement ; 8 ans, 8 mois et 18 jours à la présidence du pays. Il n’est pas négligeable non plus qu’il soit le leader de "l’islam politique" élu "démocratiquement". Lui qui rêve de restaurer la grandeur de l’Empire ottoman en étendant son hégémonie sur les territoires de musulmans sunnites, d’est en ouest, s’en va même disputer au Maroc le contrôle des mosquées en Europe.

Plus important encore, Erdogan a transformé son pays pour en faire l’un des côtés d’un triptyque idéologique, à caractère religieux, entourant le monde arabe, avec l’Iran et Israël.

Dans ce contexte, force est de noter que l’Iran, à travers la Wilayat al-faqih, contrôle quatre capitales arabes, à savoir Bagdad, Sanaa, Damas et Beyrouth. Ajoutons-y les mouvements palestiniens du Hamas et du Jihad islamique, qui se sont engagés dans le projet de "l’unification des fronts" via une idéologie religieuse basée sur le fait de relancer la thèse des "opprimés chiites" et leur droit à la succession musulmane qui leur a été "historiquement usurpée par les califes sunnites".

Par ailleurs, la Turquie et l’Iran, deux acteurs de ce triptyque, se sont particulièrement activés, notamment après le printemps arabe, à promouvoir l’idée selon laquelle l’islam émergeant des urnes est l’héritier naturel du dirigeant dictateur qui se comportait comme s’il était éternel et que l’un de ses enfants lui succèderait.

Ce n’est un secret pour personne que ce changement idéologique a eu un impact important sur le monde arabe et dépasse toujours les efforts des dirigeants arabes jusqu’à présent. Un changement qui aurait été encore plus important sans les efforts déployés par l’Arabie saoudite et le prince héritier, Mohammed bin Salman qui tente, en effet, de modifier la réalité via le développement économique du Royaume et les importantes mesures d’ouverture introduites sur ce plan. Sa montée en puissance lui a permis de conclure certains règlements et de consolider ses relations, allant même jusqu’à créer des liens dans des directions inédites, que ce soit vers l’est ou le nord.

Il n’en reste pas moins que ce qui se passe depuis quelque temps au sein de ce triptyque soulève des questions concernant sa stabilité et son enracinement au vu des manifestations pour les droits des femmes, l’annulation du port du voile, et la liberté, à l’exemple de l’Iran où l’économie s’effondre. Sans omettre le fait que l’Iran consolide sa force nucléaire et son expansion régionale aux dépens de son peuple, miséreux et opprimé.

Il en est de même aussi en Israël où les conflits politiques font rage et laissent présager des divisions graves au sein même du Likoud, le parti de droite, suscitant les inquiétudes de son chef et Premier ministre Benjamin Netanyahu. Sans omettre les crises, tensions et manifestations contre ce dernier, suite à ses démêlés avec la justice. Cela l’a contraint d’ailleurs à faire diversion en intensifiant les opérations militaires, que ce soit en Syrie contre les positions iraniennes, ou contre Gaza, comme nous avons pu le constater la semaine dernière.

La Turquie, quant à elle, fait l’actualité avec les élections qui s’y déroulent. Il est clair que les résultats du premier tour confirment la fragilisation de l’islam politique dont Erdogan est le gardien attitré, même s’il ne perdra pas au second tour, comme l’indiquent la plupart des pronostics. Notons néanmoins que sa fragilisation ainsi que celle de ses partenaires au sein des régimes idéologiques "démocratiques", pavent la voie à la prochaine étape du changement dont les retombées se reflèteront non seulement à l’intérieur des pays du triptyque, mais également au niveau de l’axe actuellement en place, en raison des alliances et de la convergence d’intérêts.

Cette phase finira par se concrétiser, inévitablement…

 

 

 

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