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L’ancien Premier ministre britannique Boris Johnson a été reconnu coupable jeudi par une commission d’enquête parlementaire d’avoir " délibérément " menti au Parlement britannique à plusieurs reprises dans l’affaire du " partygate ", poussant l’ex-Premier ministre et désormais ex-député à crier à l' "assassinat politique ".

L’ancien dirigeant conservateur, qui s’apprête à fêter ses 59 ans, a remis avec fracas son siège de député la semaine dernière après avoir été notifié des conclusions accablantes de ces 14 mois d’enquête sur les fêtes à Downing Street pendant les confinements anti-Covid.

Il avait alors dénoncé une " chasse aux sorcières " et attaqué son successeur Rishi Sunak. Jeudi il a une nouvelle fois laissé éclater sa colère en accusant la commission d’avoir voulu porter " le dernier coup de couteau d’un assassinat politique " et tempête contre une " mascarade ".

La commission devait déterminer si Boris Johnson avait menti au Parlement en affirmant à plusieurs reprises que toutes les restrictions sanitaires avaient été respectées à Downing Street, dans cette affaire qui lui a déjà valu une amende de la police et a largement contribué à son départ de Downing Street l’an dernier.

Outre le fait d’avoir menti au Parlement, le rapport estime que l’ex-dirigeant a " miné les processus démocratiques " et s’est montré " complice " d’une " campagne d’intimidation " contre les travaux de la commission des privilèges. Le document dénonce également la très virulente lettre de démission de Boris Johnson, aux accents de Donald Trump, comme une " attaque contre les institutions démocratiques " britanniques.

Une ascension coupée nette par le Partygate

Connu pour son charisme et son éloquence, Boris Johnson avait réussi à remporter en 2019 la plus grande victoire du Parti conservateur depuis l’ère thatchérienne, il y a plus de 30 ans.

Son ascension fulgurante au pouvoir avait suscité l’espoir d’un leadership fort et d’une vision audacieuse pour l’avenir du pays. Cependant, les révélations choquantes du Partygate ont terni son bilan politique et accéléré sa chute spectaculaire depuis juillet dernier.

Cette condamnation ne concerne pas uniquement sa personne, mais elle est celle d’un homme politique de première classe, qui a joué un rôle central dans des événements clés de l’histoire récente du Royaume-Uni.

Cerveau du Brexit, Johnson a été le visage emblématique de la campagne en faveur de la sortie de l’Union européenne. Son leadership et son charisme ont galvanisé les partisans du Brexit et ont été cruciaux pour la victoire du camp "Leave".

Acculé par son propre camp en juillet dernier, Johnson n’a cessé de manifester son désir de revenir sur le devant de la scène politique. La démission de son successeur, Liz Truss, a suscité de nouvelles spéculations quant à un éventuel " comeback " politique, rappelant quelque peu l’image de Donald Trump aux États-Unis, candidat à la présidentielle.

Ainsi, sa récente condamnation ne fait que raviver les discussions sur son avenir politique, mis en cause par sa légitimité populaire et judiciaire.

Boris Johnson renoncera-t-il définitivement à la politique ? Ces derniers mois, l’ancien dirigeant s’est fait rare à Westminster, privilégiant plutôt les voyages à travers le monde et les conférences bien rémunérées.

Il a accumulé une somme de plus de 5 millions de livres sterling (environ 5,8 millions d’euros) depuis la fin de l’année 2022, selon le quotidien britannique The Guardian.

Sa femme, Carrie Johnson, attend le troisième enfant du couple, tandis que Boris Johnson, plusieurs fois marié, en est déjà à son huitième. Par ailleurs, l’ancien journaliste s’attèle à la rédaction d’une biographie sur William Shakespeare.

Peut-on parler de fin de carrière?

Néanmoins, personne n’ose parler de la fin politique de celui qui, selon ses biographes, a rêvé d’être Premier ministre depuis son enfance, et qui prend pour modèle Winston Churchill, lui-même parvenu à occuper ce poste à deux reprises. Dans sa lettre de démission, Boris Johnson a précisé qu’il quittait le Parlement " pour le moment ".

La démission de Boris Johnson du Parlement britannique revêt une signification profonde, révélant les dissensions internes qui agitent le Parti conservateur. En effet, cette décision s’accompagne de la démission de deux députés qui lui étaient fidèles (Nadine Dorries et Nigel Adams), ce qui ne fait qu’exacerber les différends déjà existants.

Ces fissures fragilisent les Tories et menacent l’unité et l’élan du parti, alors que le pays est aux portes des élections générales de 2024, et que les travaillistes sont donnés favoris dans les sondages.

Il est envisageable que Boris Johnson prenne un recul temporaire de la vie politique dans le but de préparer son retour sur la scène politique ultérieurement, en particulier face à une possible défaite du Parti conservateur lors des élections de 2024.

En se positionnant comme l’unique alternative crédible et viable, Johnson pourrait rappeler son passé politique glorieux, notamment sa victoire éclatante de 2019. Il occuperait alors le poste de chef de l’opposition et préparerait son retour au poste de Premier ministre pour 2029.

Ayant dirigé le Parti conservateur vers l’une de ses plus grandes victoires en trois décennies, il pourrait invoquer son succès passé pour gagner l’adhésion et la confiance des électeurs.

Ainsi, une période de retrait stratégique pourrait permettre à Johnson de renforcer sa position et de se présenter comme un leader incontournable dans le paysage politique britannique, prêt à faire son retour triomphal au moment opportun.

En somme, dans le contexte actuel, la figure la plus crédible pour rassembler toutes les composantes du Parti conservateur et de renforcer sa popularité demeure incontestablement Boris Johnson.

Avec son éloquence innée et son expérience acquise tout au long de son parcours politique, il possède la capacité de manœuvrer habilement pour réunifier les rangs du parti.

Néanmoins, seul l’avenir révélera si un hypothétique retour sera couronné de succès et s’il parviendra à consolider son influence au sein de son parti et sur la scène politique britannique dans son ensemble.