La confusion étatique en Russie s’intensifie. La confrontation entre le groupe Wagner et le leadership russe n’était pas fortuite. Beaucoup d’encre a été versée au sujet du volet politique et tactique des évènements, mais peu sur l’aspect géopolitique stratégique.

Il s’agit-là de la cohabitation meurtrière entre un État et une milice suivant un modèle qui a fait loi au cours des trente dernières années, étant considéré comme une nécessité structurelle pour mener des luttes d’influence et des activités suspectes via des réseaux non officiels. De l’Iran au Yémen, en passant par l’Irak, la Syrie, le Liban, le Soudan et la Palestine, la Russie a établi des partenariats basés sur la modification des équations, la consolidation des régimes et la fragmentation des États.

Cette base, qui cherche à mettre fin au système unipolaire, n’a pas exclu la possibilité de recruter des mercenaires, de financer ses opérations par des voies illégales et de déployer une propagande visant à rétablir l’équilibre mondial dans les domaines culturel, économique, financier, social, médiatique et surtout militaire et sécuritaire. Cette base a créé une structure en dehors de l’État et constitué un " establishment " échappant à toutes les lois nationales, régionales et internationales.

Cela ne sous-entend pas forcément que le système mondial était parfait, mais il permettait de contrôler, de facto, les tensions par le biais de leaderships étatiques officiels. Il faut également reconnaitre que les Nations Unies, y compris le Conseil de sécurité, ont échoué lamentablement à anticiper les conflits et à jouer un rôle de médiateur dans les guerres, ainsi qu’à élaborer des voies de négociation efficaces dans les zones de conflits multipartites.

Le fait est que ce qui s’est passé en Russie ouvre la voie à une perte de contrôle de l’axe de la cohabitation meurtrière entre l’État et la milice, avec des implications graves. En effet, cette cohabitation se situe en dehors du contexte historique de l’alignement politique-constitutionnel-militaire naturel d’une part, et du cadre juridique de l’ordre social d’autre part.

Le plus dangereux est cette fusion étroite entre la dictature, l’autocratie et la théocratie, avec ce qui en découle comme situations destructrices de la liberté, de la démocratie et de la justice, avec des plateformes rassemblant des hors-la-loi, des demandeurs d’emploi ou des aspirants au pouvoir. Cette fusion favorise une philosophie qui met fin à la notion d’État au profit du chaos sans État.

Abonnez-vous à notre newsletter

Newsletter signup

Please wait...

Merci de vous être inscrit !