La justice française a inculpé quatre individus soupçonnés d’avoir livré des secrets industriels à la Chine et à la Russie, jeudi 27 juillet. ces secrets auraient ainsi été utilisés pour fournir des équipements prohibés à l’armée russe sur le front ukrainien.

Deux Français et deux Chinois, parmi lesquels deux dirigeants d’une entreprise de haute technologie, ont été inculpés à Paris le 24 mars, soupçonnés d’avoir livré des secrets industriels à la Chine et à la Russie.

Ommic, fleuron français de semi-conducteurs pour l’industrie des télécommunications et le domaine spatial, a été progressivement pris en main par Ruodan Z., Chinois de 63 ans, qui en est devenu président en 2018 après avoir racheté 94% des parts via un fonds d’investissement créé en France, selon le quotidien Le Parisien qui a révélé l’affaire.

Selon des documents consultés par l’AFP, Ruodan Z. a pris des participations dans diverses entreprises du secteur, jusqu’à susciter, d’après un article d’Intelligence Online de 2021, l’inquiétude de l’Etat français.

Domicilié en Chine, il serait recherché par la justice française qui ne l’a pas inculpé pour l’heure.

Marc R., le directeur général, ainsi qu’une cadre chinoise de la société, ont été inculpés pour livraison à une puissance étrangère de procédés, documents ou fichiers de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la France, un crime passible de quinze ans de détention et de 225.000 euros d’amende.

Ciblée, la maîtrise par Ommic du nitrure de gallium, un matériau qui permet une puissance démultipliée des semi-conducteurs.

D’après un document de l’Agence d’innovation de la défense du ministère français des Armées de 2021, développer une telle technologie est un " enjeu stratégique pour la défense ".

Mais d’après Le Parisien, ces opérations auraient également abouti, via un " montage complexe ", à " transférer du matériel prohibé vers Moscou et contourner l’embargo commercial qui vise le pays depuis l’invasion de la Crimée, en passant par la Chine ".

Ces secrets industriels, " en bout de chaîne, ont très probablement servi à équiper les armées " de Pékin et Moscou, s’inquiète le journal.

Cinq autres personnes ont été arrêtées par les services de renseignement intérieur français (DGSI) en mars, d’après Le Parisien, ce que n’ont pas confirmé les différentes sources interrogées par l’AFP.

L’information judiciaire, ouverte à la demande du Pnat, porte également sur des soupçons d’exportations illégales en contrebande, d’association de malfaiteurs, de faux et usage de faux, d’abus de biens sociaux, d’après la source judiciaire.

En pleine guerre russo-ukrainienne, dans un contexte de vives tensions internationales et au moment où chaque pays accuse l’autre d’ingérences, cette affaire vient illustrer la lutte sourde entre puissances sur le terrain industriel.

Malo Pinatel, avec AFP