Un "jeu du chat et de la souris" s’est progressivement mis en place dans les cieux libanais depuis le début de la guerre Israël-Hamas, entre drones israéliens et défense antiaérienne du Hezb. Tandis qu’un nouveau drone israélien a été abattu lundi, Ici Beyrouth vous propose un tour d’horizon des principaux matériels impliqués.

Lundi, les forces israéliennes ont annoncé la perte d’un de leurs drones au-dessus du village d’Aaïchiyé, dans le caza de Jezzine, à quelque 13 kilomètres de la frontière israélienne, abattu dans la nuit par un missile sol-air tiré par le Hezbollah. Ce dernier s’est par ailleurs empressé de revendiquer cette action, annonçant tôt le matin avoir abattu un drone Elbit Hermes 450.

Ce n’est pas la première fois que la formation de Hassan Nasrallah abat un tel appareil depuis le début des affrontements à la frontière, puisque le 26 février, un autre avait été détruit en vol par des moyens similaires. En outre, un modèle plus récent, le Hermes 900, a été abattu au-dessus de la région de Baalbeck le 7 avril.

Le Hermès 450, précurseur dans son domaine

Développé puis mis en service en 1998 par la société israélienne Elbit Systems, en collaboration avec l’industrie de la défense britannique, le drone Hermes 450 entre dans la catégorie des drones de moyenne altitude à longue endurance (MALE). Doté d’une envergure de 10,5 mètres et d’un poids maximal au décollage de 450 kilogrammes, il peut voler jusqu’à un plafond de 5.500 m d’altitude pendant 20h, à une vitesse maximale de 150km/h, selon les informations dévoilées par son concepteur. Son prix est estimé à environ 2 millions de dollars.

Cette photo prise dans le sud d’Israël montre un drone militaire israélien survolant la bande de Gaza le 14 mars 2024, dans le cadre du conflit actuel entre Israël et le Hamas. (JACK GUEZ / AFP)

Il est principalement utilisé pour des missions de surveillance, de reconnaissance, de collecte de renseignements, de relai de communication, mais aussi d’attaque. Dans le cadre de ses missions, sa charge utile – l’équipement qu’il peut emporter sous ses ailes – est d’environ 180 kg, selon Elbit Systems.

Celle-ci peut inclure différents types de capteurs électro-optiques, infrarouges ou encore hyperspectraux, des nacelles destinées au renseignement électronique, à la communication, ou encore à la guerre électronique, un radar pour le suivi de cibles, ainsi que des bombes ou des missiles de faible gabarit.

Si la question de l’emport d’armes par le Hermes 450 n’a été ni infirmée, ni confirmée par l’armée israélienne, de nombreux témoignages concordants attestent de sa véracité. Dernier exemple médiatisé en date d’un tel usage: la frappe menée sur les travailleurs de l’ONG World Central Kitchen (WCK) à Gaza, le 1ᵉʳ avril, selon les quotidiens Haaretz et The Guardian.

Son autonomie lui permet de mener des missions dans un rayon de 300 km et dans des conditions variées. Sa conception modulaire permet une adaptation facile à différents environnements et missions, tandis que sa fiabilité opérationnelle en fait un outil de choix non seulement pour l’armée israélienne, mais aussi dans le monde. En effet, le Hermes 450 figure parmi les systèmes les plus exportés dans sa catégorie.

Comment a-t-il été abattu?

À l’heure actuelle, il reste difficile de déterminer quelle arme a été utilisée pour détruire le drone en question. Cette zone d’ombre est exacerbée par l’omerta persistante du Hezbollah concernant ses capacités réelles.

En effet, la plupart des systèmes de missiles antiaériens de la formation pro-iranienne n’offrent qu’une zone de protection relativement restreinte. Néanmoins, ils contraignent les avions israéliens à voler à des altitudes plus élevées, ce qui diminue la précision des frappes d’Israël contre des cibles au sol. La majorité de ces systèmes sont d’origine soviétique ou iranienne.

Selon le think tank américain Center for Strategic and International Studies (CSIS), l’immense majorité de l’arsenal antiaérien à disposition du Hezbollah est constitué de systèmes portatifs, à l’image du Igla russe ou du Misagh iranien.

Également connus sous le nom de Manpads ("man-portable air-defense system"), ces armes sont limitées par leur taille et sont principalement conçues pour la défense à basse altitude et à courte portée. En effet, leur rayon d’action dépasse rarement les 5 km.

(ARCHIVES) Un membre de l’armée irakienne porte un système portatif de défense aérienne (Manpads) alors qu’il se tient sur un véhicule lors d’un défilé militaire annuel, le 1ᵉʳ février 2015, dans la capitale Bagdad. (Sabah ARAR / AFP)

La destruction du Hermes 450 par le biais d’un Manpads reste néanmoins plausible. Le relief montagneux de la région, couplé aux faibles performances de l’appareil, notamment en termes de plafond, peuvent notamment avoir contribué à un tel succès.

Il est à noter que selon les renseignements israéliens, le Hezbollah aurait acquis plusieurs systèmes de défense aérienne beaucoup plus sophistiqués, tout en envoyant ses membres s’entraîner en Syrie. Parmi les systèmes suspectés d’être en sa possession figurent le Osa et surtout le Buk, dont la portée avoisine les 50 km.

Le successeur: le Hermes 900

Depuis quelques années, l’armée israélienne privilégie désormais le Hermes 900 Kochav (étoile) au modèle 450, un autre drone de type MALE, développé par le même fabricant en 2012. Avec une envergure d’environ 16 mètres et une masse maximale au décollage de 1 100 kg, il est plus imposant que son prédécesseur. De plus, il est surtout plus coûteux: selon la revue spécialisée Janes, son prix oscille entre 6,8 et 8,8 millions de dollars.

Une photo prise du côté israélien de la frontière avec la bande de Gaza, le 30 octobre 2023, montre un drone militaire israélien survolant le nord de la bande de Gaza, dans le cadre des combats entre Israël et le Hamas. (JACK GUEZ / AFP)

Tout comme son "grand" frère, le Hermes 900 intègre une gamme complète de capteurs, ainsi que les mêmes instruments et armements sous ses ailes. Car sa charge utile, de 350 kg, est considérablement plus importante.

En outre, il offre une endurance de vol pouvant atteindre plus de 30 heures et une altitude maximale de 9.000 mètres. Dans le contexte du théâtre libanais, cette nouvelle version offre donc un avantage de poids. En effet, son plafond lui permet d’éviter la plupart des systèmes de défense aérienne utilisés par le Hezbollah, notamment les fameux Manpads… mais pas ceux bénéficiant d’une portée plus avancée.