La demande de mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, son ministre de la Défense, Yoav Gallant, et trois dirigeants du Hamas – Ismaïl Haniyeh, Yahya Sinouar et Mohammed Deif – pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis à Gaza, formulée par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, suscite des réactions contradictoires au niveau international.

Yoav Gallant a ainsi qualifié, mardi, de "méprisable et ignoble" la démarche de Karim Khan. "La tentative du procureur de la CPI, Karim Khan, de renverser la situation n’aboutira pas, a-t-il déclaré dans un communiqué. Le parallèle qu’il a établi entre l’organisation terroriste Hamas et l’État d’Israël est méprisable et ignoble." "La tentative du procureur Karim Khan de refuser à l’État d’Israël le droit de se défendre et d’assurer la libération des otages retenus à Gaza doit être rejetée explicitement", a poursuivi M. Gallant.

De hauts responsables israéliens, parmi lesquels le président Isaac Herzog, ont aussi critiqué la démarche du procureur de la CPI.

Le chef de la diplomatie italienne, Antonio Tajani, a, pour sa part, estimé qu’il est "absolument inacceptable de mettre sur le même plan le Hamas et Israël". "Il est absurde que le procureur ait seulement fait ce parallèle. D’aucune façon on peut imaginer une telle comparaison. Attention à ne pas légitimer des positions anti-israéliennes qui puissent alimenter des phénomènes d’antisémitisme", a-t-il ajouté dans un entretien au Corriere della Sera.

Solution politique

Même son de cloche chez le ministre français des Affaires sociales, Stéphane Séjournée, qui a estimé que ces demandes simultanées de mandats d’arrêt "ne doivent pas créer d’équivalence entre le Hamas et Israël". Il a, à cet égard, fait état d’"un groupe terroriste qui s’est félicité des attentats du 7 octobre, qui les a revendiqués également de manière assumée", et d’un "État démocratique, Israël, qui doit respecter le droit international dans la conduite d’une guerre qu’il n’a pas déclenchée lui-même".

"Les juges de la CPI doivent désormais se prononcer sur la délivrance de ces mandats. Ils le feront de manière indépendante et en toute indépendance", a également estimé le chef de la diplomatie française devant l’Assemblée nationale. Et M. Séjourné de rappeler le principe de solidarité de la France "envers les Israéliens et les Palestiniens" avec la recherche d’une solution politique. "C’est le seul horizon de paix possible et nous travaillons diplomatiquement à cette fin", a-t-il conclu.

Un discours qui contredit le communiqué publié, plus tôt, dans la matinée par le Quai D’Orsay qui avait affirmé "soutenir la Cour pénale internationale, son indépendance et la lutte contre l’impunité dans toutes les situations". "La France a condamné dès le 7 octobre les massacres antisémites perpétrés par le Hamas", lit-on dans un communiqué.

À propos d’Israël, "la France alerte depuis de nombreux mois sur l’impératif de respect strict du droit international humanitaire et notamment sur le caractère inacceptable des pertes civiles dans la bande de Gaza et d’un accès humanitaire insuffisant", a poursuivi la diplomatie française. Et de réitérer qu’une "solution politique durable" est la "seule" voie pour "rétablir un horizon de paix".

"Punition collective"

Pour le chef de la diplomatie américaine, Anthony Blinken, la décision du procureur de la CPI "complique" les efforts "encore possibles" de parvenir à un accord de cessez-le-feu à Gaza.

"Je pense que nous avons été très, très proches à deux reprises", a-t-il affirmé lors d’une audition devant la commission des Affaires étrangères du Sénat, saluant les "efforts considérables" déployés par les médiateurs égyptien et qatari. "Nous y travaillons chaque jour. Je pense qu’il y a encore une possibilité", a-t-il ajouté. "Mais elle est remise en question par un certain nombre d’événements, et je dois dire que la décision extrêmement malavisée" prise par Karim Khan, "l’équivalence honteuse entre le Hamas et les dirigeants d’Israël" ne fait que "compliquer les perspectives de conclure un tel accord", a-t-il affirmé.

Dans le camp favorable à cette démarche, la Chine a dit espérer que la CPI "maintiendra sa position objective et impartiale et exercera ses pouvoirs conformément à la loi". Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Wang Wenbin, a aussi appelé à mettre fin à la "punition collective du peuple palestinien".

Avec AFP