La présidence bangladaise a annoncé, tôt mercredi, que le prix Nobel de la paix Muhammad Yunus allait diriger un gouvernement intérimaire, après la dissolution du Parlement et la fuite de la Première ministre Sheikh Hasina.

La décision "de former un gouvernement intérimaire (…) avec Yunus comme chef" a été prise lors d’une rencontre entre le président Mohammed Shahabuddin, de hauts dignitaires de l’armée et des responsables du collectif "Students Against Discrimination" ("Étudiants contre la discrimination"), principal mouvement à l’origine des manifestations initiées début juillet, a-t-elle indiqué.

"Le président a demandé au peuple de l’aider à surmonter la crise. La formation rapide d’un gouvernement intérimaire est nécessaire pour surmonter la crise", indique un communiqué de la présidence.

Muhammad Yunus avait indiqué, mardi, être prêt à prendre la tête d’un gouvernement intérimaire. "J’ai toujours mis la politique à distance (…) Mais aujourd’hui, s’il faut agir au Bangladesh, pour mon pays, et pour le courage de mon peuple alors je le ferai", avait-il affirmé dans une déclaration écrite à l’AFP.

L’économiste de 84 ans, connu pour avoir sorti des millions de personnes de la pauvreté grâce à sa banque de microfinance, pionnière en la matière, s’était attiré l’inimitié persistante de Sheikh Hasina, qui l’accusait de "sucer le sang" des pauvres.

Nahid Islam, un dirigeant du collectif d’étudiants, a confirmé la décision à des journalistes après une réunion de trois heures à la présidence, qualifiant les discussions de "fructueuses". Le président Shahabuddin a accepté que le gouvernement intérimaire "soit formé dans les plus brefs délais", a-t-il déclaré.

S’adressant mardi à la presse, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a déclaré que ce gouvernement devra "respecter des principes démocratiques, l’État de droit et le reflet de la volonté du peuple".

Mardi, le président Shahabuddin avait par ailleurs dissous le Parlement, ce que réclamaient les étudiants protestataires et le principal parti d’opposition, le Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), qui exige des élections d’ici trois mois.

Lundi a été la journée la plus meurtrière depuis le début du mouvement, avec au moins 122 morts. Par ailleurs, au moins 10 autres personnes ont été tuées mardi, portant le bilan à 432 morts, selon un décompte de l’AFP basé sur des sources policières, gouvernementales et médicales.

La contestation a abouti, lundi, au départ de Sheikh Hasina, 76 ans, contrainte de s’enfuir en hélicoptère. Elle a atterri dans une base militaire près de New Delhi, selon la presse indienne, mais une source de haut niveau a affirmé qu’elle ne faisait que "transiter" par le pays avant de se rendre à Londres. L’appel du gouvernement britannique à une enquête de l’ONU sur les "niveaux de violence sans précédent" au Bangladesh a cependant mis en doute cette destination.

Par Shafiqul ALAM avec AFP