Michelle Bachelet, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, est arrivée en Chine le 23 mai. Elle entame une visite dans le Xinjiang consacrée au traitement des minorités musulmanes persécutées dans la région, comme les Ouïghours. Une première depuis 2005. Mais beaucoup d’observateurs internationaux craignent, sous couvert de restrictions anti-Covid, le parcours de la dignitaire ne soit que trop limité par le gouvernement chinois.

La Haute-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU a entamé lundi 23 mai une visite en Chine consacrée au traitement des minorités musulmanes du Xinjiang, dans un contexte de craintes que Pékin restreigne sa liberté de mouvement.

Après plusieurs années d’âpres négociations avec les autorités chinoises, Michelle Bachelet, ex-présidente chilienne âgée de 70 ans, doit rester six jours dans le pays, jusqu’à samedi 28 mai.

Elle a parlé lundi 23 mai en visioconférence avec les chefs de délégation d’environ 70 ambassades étrangères en Chine, ont indiqué à l’AFP des sources diplomatiques.

Selon ces sources, Michelle Bachelet a assuré aux diplomates qu’elle avait négocié un accès à des centres de détention et pourrait s’entretenir avec des militants locaux des droits de l’homme.

L’ONU ferraillait depuis 2018 avec Pékin afin d’obtenir un " accès libre et significatif " au Xinjiang (Nord-Ouest de la Chine).

Une première depuis 2005

Cette région a longtemps été frappée par des attentats pour lesquels les autorités accusent des séparatistes et des islamistes ouïghours. Elle fait l’objet depuis quelques années d’une drastique politique de surveillance menée au nom de l’antiterrorisme.

Ouïghours
Une manifestation pro-Ouïghours en avril 2022 à Washington (AFP)

Des études accusent la Chine d’avoir interné au moins un million de Ouïghours et de membres d’autres minorités musulmanes dans des camps de rééducation, voire d’imposer du travail forcé. Pékin dément ces accusations.

La visite de Mme Bachelet est la première d’un Haut-Commissaire aux droits de l’homme en Chine depuis 2005.

Elle doit se rendre notamment à Urumqi, la capitale du Xinjiang, ainsi qu’à Kashgar, ville du Sud de la région où la population ouïghoure est particulièrement importante.

Michelle Bachelet rencontrera " un certain nombre de hauts fonctionnaires aux niveaux national et local ", des " organisations de la société civile, des représentants du monde des affaires ainsi que des universitaires ", a assuré son cabinet.

Une visite en " circuit fermé "

En raison de l’épidémie, la visite se déroulera en " circuit fermé ", c’est-à-dire dans une bulle sanitaire, a indiqué lundi 23 mai devant la presse Wang Wenbin, un porte-parole de la diplomatie chinoise.

Pour la même raison, le Haut-Commissariat et la Chine " ont décidé après discussion " de ne pas intégrer de journalistes dans la délégation, a-t-il souligné.

Ce séjour est pourtant scruté de près, beaucoup craignant que la Chine utilise cette visite pour se dédouaner des accusations dont elle fait l’objet.

L’organisation de défense des droits de l’homme Chinese Human Rights Defenders (CHRD), basée à Washington, a estimé lundi 23 mai que sa visite serait " soigneusement gérée et chorégraphiée " par Pékin.

" Nous craignons (…) que vous n’ayez pas un accès libre aux victimes, aux témoins, aux membres indépendants de la société civile " et que " vos points de vue soient déformés par le gouvernement chinois ", souligne l’ONG.

Ouïghours
Une manifestation pro-Ouïghours en Turquie en février 2022 (AFP)

Les États-Unis, qui accusent la Chine de " génocide " et critiquent Mme Bachelet pour son " silence persistant " face à des " atrocités ", se sont dits " préoccupés " par cette visite.

Manque de preuves encore visibles

" Nous ne nous attendons pas à ce que la République populaire de Chine garantisse l’accès nécessaire pour mener une évaluation complète et sincère de la situation des droits de l’homme au Xinjiang ", a indiqué la semaine dernière Washington.

Principalement musulmans, les Ouïghours constituent le principal groupe ethnique du Xinjiang, peuplé de 26 millions d’habitants.

Des études occidentales, fondées sur des interprétations de documents officiels, des témoignages de victimes présumées et des extrapolations statistiques, accusent Pékin d’avoir interné dans des " camps " au moins un million de personnes, d’effectuer des stérilisations " forcées " ou encore d’imposer du " travail forcé ".

La Chine présente les camps comme des " centres de formation professionnelle " destinés combattre l’extrémisme religieux et à former les habitants à un métier afin d’assurer la stabilité sociale.

Pékin dit n’imposer aucune stérilisation, mais uniquement appliquer la politique de limitation des naissances à l’oeuvre dans l’ensemble du pays, et qui était peu mise en pratique auparavant dans la région.

Selon des universitaires et des Ouïghours basés à l’étranger, les autorités du Xinjiang semblent toutefois avoir abandonné les mesures de répression sévères pour se concentrer sur le développement économique.

" Maintenant, il n’y a plus beaucoup de preuves visibles d’une répression ", déclare à l’AFP Peter Irwin, de l’organisation Uyghur Human Rights Project.

La peur de représailles pourrait par ailleurs empêcher les Ouïghours de parler librement à l’équipe onusienne, d’après des associations de défense des droits de l’homme.

Avec AFP

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