Une nouvelle spirale de violences s’empare du Soudan, alors que 110 personnes ont été tuées lors d’affrontements tribaux dans le Darfour, suite à un conflit autour de l’accès à l’eau et à la terre. Ces affrontements ont opposé des tribus arabes et non-arabes, dans une région qui a déjà connu un véritable bain de sang en 2003, entre la majorité arabe et la minorité Massalit. Le pays connait un véritable vide sécuritaire depuis le coup d’État mené par le général Abdel Fatah al Burhane, qui a mis fin à la période de transition démocratique. Effondrement économique, inflation, désorganisation de l’État laissent la porte ouverte aux conflits armés dans le pays. 

Depuis le coup d’État mené par l’armée, le pays connait une situation d’instabilité et de vide sécuritaire, notamment dans la capitale et les zones traditionnellement hostiles au pouvoir, comme le Darfour. (AFP)

Plus de 110 personnes ont été tuées dans de nouveaux affrontements tribaux au Darfour ces derniers jours, a indiqué lundi un chef tribal de cette région de l’ouest du Soudan régulièrement endeuillée par des conflits pour la terre ou l’eau.

Les nouveaux combats ont éclaté la semaine dernière entre des membres de la tribu non-arabe des Gimir et la tribu arabe des Rizeigat dans la région de Kolbous, à près de 160 kilomètres au sud d’El-Geneina, la capitale du Darfour-Ouest. C’est un conflit foncier opposant un membre des Rizeigat à un autre des Gimir qui a déclenché les violences.

Les affrontements qui se poursuivaient lundi ont provoqué la mort de plus de 110 personnes, la plupart de la tribu Gimir, et 17 villages ont été incendiés, a déclaré à l’AFP Ibrahim Hachem, un chef de la tribu Gimir.

Selon lui, de " nombreux " autres membres des Gimir sont portés disparus depuis le début des heurts. Trois des villages ont été incendiés lundi. L’émissaire onusien Volker Perthes s’est dit " consterné " par les violences survenues à Kolbous. " Le cycle de violence au Darfour est inacceptable et met en évidence les causes profondes qui doivent être résolues ", a-t-il publié sur son compte Twitter.

Une région endeuillée par les violences 

Le commandant paramilitaire des Forces de soutien rapide du Soudan, le général Mohamed Hamdan Daglo (Hemedti), est le principal représentant de l’État au Darfour, depuis les massacres perpétrés par ses forces en 2003 sous les ordres du président Omar el Béchir. (AFP)

L’État du Darfour-Ouest, région aride frontalière du Tchad, a été le théâtre ces derniers mois de violences meurtrières.

En avril, plus de 200 personnes y ont été tuées dans des affrontements opposant les communautés arabes à la minorité Massalit dans la région de Krink. Selon l’ONU, plus de 125.000 personnes ont été déplacées durant ces violences. Un mois plus tôt, des combats entre les Fallata, une minorité ethnique africaine et la communauté arabe des Rizeigat au Darfour-Sud, ont fait au moins 45 morts.

La vaste région du Darfour a été ravagée par une guerre civile déclenchée en 2003 entre le régime à majorité arabe d’Omar el-Béchir de l’époque et les insurgés issus de minorités ethniques dénonçant des discriminations. Environ 300.000 personnes sont mortes et près de 2,5 millions déplacées durant les premières années de violences, d’après l’ONU.

Omar el-Béchir, renversé en 2019 et emprisonné, avait envoyé la milice armée des Janjawids, composée de nomades arabes, pour mater la rébellion. Les Janjawids ont été accusés d’avoir commis des atrocités au Darfour.

Ces miliciens ont ces dernières années rejoint par milliers les Forces de soutien rapide (FSR), dirigées par le général Mohammed Hamdane Daglo, numéro deux du pouvoir militaire en place depuis le putsch d’octobre 2021 à Khartoum.

Un effondrement de l’État 

Sorti en 2019 de trente années de dictature militaro-islamiste du général Omar el-Béchir déchu après une révolte populaire, le Soudan ne cesse de s’enfoncer dans le marasme politique et économique. (AFP)

Selon les experts, les épisodes de violences au Darfour ces derniers mois –pillages de bases de l’ONU, des combats tribaux, attaques armées et viols–, sont favorisés par le vide sécuritaire créé par le putsch du chef de l’armée, le général Abdel Fattah al-Burhane à Khartoum.

Sorti en 2019 de trente années de dictature militaro-islamiste du général Omar el-Béchir déchu après une révolte populaire, le Soudan ne cesse de s’enfoncer dans le marasme politique et économique.

Le pays, l’un des plus pauvres au monde, a perdu son aide internationale, soit 40% de ses recettes, en rétorsion au putsch. De plus, la livre soudanaise s’est effondrée et le Soudan est pris à la gorge par une inflation dépassant chaque mois les 300%.

De nombreuses armes circulent encore au Darfour qui reste englué dans les violences malgré un accord conclu en 2020 entre les autorités à Khartoum et les principaux groupes rebelles, dont ceux du Darfour.

Avec AFP

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