Lors du sommet des chefs d’État du Commonwealth, le prince Charles a affirmé que les pays membres étaient libres d’abandonner la monarchie britannique, qui reste formellement à la tête de 14 des 54 États de l’organisation. Ces propos surviennent alors que la Barbade a décidé d’opter pour un régime républicain en novembre 2021, une mesure qui a encouragé d’autres pays à franchir le même pas. Ce sommet doit voir l’intégration de deux nouveaux membres, le Togo et le Gabon, ainsi qu’une féroce compétition entre la Jamaïcaine Kamina Johnson Smith et la Britannique Patricia Scotland pour le poste de secrétaire général du Commonwealth. 

Le Commonwealth est composé de 54 membres, dont 14 conservent un lien constitutionnel formel avec la monarchie britannique qui occupe la position de chef d’État. (AFP)

Le prince Charles a affirmé vendredi à Kigali, en ouverture de la réunion des dirigeants du Commonwealth, que les États membres étaient libres d’abandonner le giron de la monarchie et exprimé sa " tristesse " pour le passé esclavagiste de la Grande-Bretagne.

Ce sommet (CHOGM) se tient au Rwanda, qui a intégré le Commonwealth en 2009, au moment où l’association aux 54 États membres est traversée par de profondes interrogations, dans une période de transition pour la monarchie britannique et de remise en question du passé colonialiste.

Dans 14 des États membres, la Reine Elizabeth II est la cheffe de l’État et certains d’entre eux n’ont pas caché leur volonté de prendre leurs distances avec la monarchie, dans le sillage de la Barbade qui s’est officiellement proclamée république en novembre 2021.

" Le Commonwealth compte en son sein des pays qui ont eu des liens constitutionnels avec ma famille, certains qui continuent d’en avoir et de plus en plus qui n’en ont pas ", a déclaré le prince Charles, qui représente sa mère la reine Elizabeth II, cheffe du Commonwealth. " Je tiens à dire clairement, comme je l’ai déjà dit, que le régime constitutionnel de chaque membre, en tant que république ou monarchie, relève uniquement de la décision de chaque État membre ", a-t-il insisté, devant des dizaines de dirigeants parmi lesquels les Premiers ministres britanniques Boris Johnson et canadien Justin Trudeau.

L’héritier à la Couronne britannique a également reconnu que les racines du Commonwealth " plongent profondément dans la période la plus douloureuse de notre histoire ". " Je ne peux pas décrire la profondeur de ma tristesse personnelle face à la souffrance de tant de personnes, alors que je continue à approfondir ma compréhension des effets durables de l’esclavage ", a-t-il déclaré.

Un sommet sur fond de polémique avec le Rwanda

Le CHOGM se tient en pleine polémique sur un accord d’expulsion de migrants clandestins du Royaume-Uni vers le Rwanda, qui a suscité l’indignation de nombreuses ONG de défense des droits humains, de l’ONU et de l’Église anglicane.

Selon la presse britannique, le prince Charles a également manifesté en privé son désaccord avec ce dispositif, qu’il a qualifié de " consternant ". Le gouvernement britannique a promis de persister sur ce programme d’expulsions, qui a été bloqué à la dernière minute le 14 juin par une décision de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).

Le prince Charles a rencontré vendredi matin Boris Johnson. Mais le Premier ministre britannique a indiqué qu’il ne détaillerait pas la teneur de l’entretien. " Il y a beaucoup de préjugés sur le Rwanda qui doivent être balayés ", a-t-il répété vendredi aux médias britanniques. Boris Johnson a fait l’éloge des " pas de géant " réalisés par le Rwanda, petit pays d’Afrique de l’Est qui a connu depuis la fin du génocide de 1994 un développement économique spectaculaire. Il est toutefois régulièrement critiqué pour sa politique en matière de droits humains.

En amont du CHOGM, 23 ONG ont rappelé dans une lettre ouverte leurs " graves préoccupations " à ce sujet.

Parallèlement, la République démocratique du Congo voisine avait demandé au Royaume-Uni de condamner le Rwanda, qu’il accuse d' "agression " dans l’est du Congo et de soutenir le groupe armé du M23.

L’élargissement du Commonwealth à des pays non-anglophones
La duchesse Camilia, épouse du prince Charles, avec Jeannette Kagame, épouse du président du Rwanda Paul Kagamé.  Le sommet des chefs d’États du Commonwealth se tient en pleine polémique sur un accord d’expulsion des migrants du Royaume-Uni vers le Rwanda, qu’a qualifié le prince Charles de " consternant ". (AFP)

La secrétaire générale du Commonwealth, la Britannico-Dominicaine Patricia Scotland, a été réélue de justesse vendredi après-midi pour un nouveau mandat de deux ans, mettant fin à plusieurs mois de campagne parfois tendue.

La ministre jamaïcaine des Affaires étrangères, Kamina Johnson Smith, briguait le poste, avec le soutien du Royaume-Uni qui avait exprimé son mécontentement à l’égard de la gestion de Mme Scotland.

Le CHOGM doit s’achever samedi, lors d’une journée qui verra l’intégration de deux nouveaux membres, le Togo et le Gabon.

" De nouvelles nations cherchent à se joindre, ce qui montre tout ce que vous devez savoir sur la santé et la vitalité de notre Commonwealth ", a déclaré Boris Johnson.

Avec AFP