C’est quelque chose d’assez commun dans la plupart des démocraties du monde, mais cela fait l’événement en France. Pour la première fois, une femme a été élue mardi 28 juin présidente de l’Assemblée nationale. Éphémère ministre des Outre-Mer, Yaël Braun-Pivet succède à Richard Ferrand, battu aux législatives, au perchoir.

Pour la première fois de l’Histoire française, une femme, Yaël Braun-Pivet, a été élue mardi 28 juin présidente de l’Assemblée nationale au terme de deux tours de scrutin qui marquaient le début de la seizième législature de la Ve République, alors qu’Élisabeth Borne continue les consultations.

" Débattre plutôt que de nous battre ", a lancé Mme Braun-Pivet, avocate pénaliste novice en politique en 2017 lorsqu’elle s’était fait élire députée macroniste après avoir été adhérente du PS.

Un rapide passage par la case ministre

Présidente de la Commission des Lois, elle avait été nommée ministre des Outre-mer le mois dernier.

En citant certains de ses illustres prédécesseurs au perchoir, notamment Richard Ferrand, auquel elle succède, mais aussi Simone Veil qui présida le Parlement européen, la nouvelle titulaire du perchoir a appelé à ce que l’Assemblée élue le 19 juin et qui a " le visage de la France ", " sorte de ses murs ".

" Je sais que tu auras à cœur de garantir dans cette Assemblée le respect du pluralisme et le dialogue, au service de nos concitoyens ", a commenté sur Twitter la Première ministre, Élisabeth Borne.

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Faute de majorité, Yaël Braun-Pivet a été élue présidente au bout de deux tours (AFP)

C’est le doyen des députés, José Gonzalez (RN), 79 ans, qui avait donné le coup d’envoi des travaux de la nouvelle Assemblée, avant de prononcer la constitution du bureau d’âge, composé des six plus jeunes députés.

Dans sa brève allocution saluée par des applaudissements, M. Gonzalez a salué un " symbole d’unité française " avec la réunion de tous les députés, et évoqué avec émotion l’Algérie, sa terre natale à laquelle il a dit avoir été " arraché ".

Une première en France

Favorite, Yaël Braun-Pivet, ex-présidente de la commission des Lois de l’Assemblée et éphémère ministre des Outre-Mer, était arrivée en tête à l’issue du premier tour (238 voix).

Faute de majorité absolue, l’hémicycle a dû procéder à un second tour, au terme duquel elle a obtenu plus de la moitié des suffrages exprimés (242 voix), après que le candidat présenté par le Rassemblement national, Sébastien Chenu, a décidé de retirer sa candidature et que des députés se sont abstenus.

Contrairement à la plupart des démocraties occidentales, aucune femme n’a encore jamais occupé cette fonction en France.

Les différents groupes parlementaires, au moins dix avec le nouveau groupe finalement baptisé " Libertés, indépendants, outre-mer, territoires ", avaient par ailleurs jusqu’à 18H00 pour se déclarer officiellement et remettre la liste de leurs membres, qui doit enfin permettre à la majorité et à l’opposition de se compter.

Dans les jours à venir seront encore attribuées les présidences des principales instances de l’institution, dont la commission clef des Finances jeudi 30 juin, que se disputent la Nupes qui a choisi l’Insoumis Éric Coquerel et le RN pour une bataille qui promet d’être acharnée.

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C’est la première fois qu’une femme devient présidente de l’Assemblée nationale en France (AFP)

La Première ministre poursuit ses tractations

Au moment où les travaux reprennent au Palais Bourbon, Élisabeth Borne poursuivait ses tractations pour éviter les blocages en l’absence de majorité absolue.

La Première ministre entre dans le dur en rencontrant à tour de rôle les chefs des groupes LR, socialiste, communiste et écologiste de l’Assemblée.

Dans une lettre qu’elle leur a adressée lundi 27 juin, elle a pris acte de leur refus " d’entrer dans une dynamique de construction de coalition ou d’accord global avec le groupe majoritaire ".

Ce que lui a confirmé son premier interlocuteur mardi matin, Olivier Marleix (LR). " On lui a redit qu’il n’était pas question de quelque coalition que ce soit, mais qu’on était là pour essayer de trouver des solutions. On va avoir un certain nombre de textes sur lesquels je pense qu’on doit pouvoir travailler ensemble, comme la question du pouvoir d’achat ", a-t-il insisté sur le perron de Matignon.

Mais, a-t-il prévenu, " cela va être plus ou moins facile selon les sujets, et ça dépendra à terme de la capacité d’écoute de l’exécutif ", en reconnaissant que la Première ministre avait fait preuve mardi " d’une vraie volonté de nous écouter, plutôt de bon augure ".

Une feuille de route pour la fin de la semaine

Les prochains chefs de groupe attendus mardi soir à Matignon sont Boris Vallaud (PS), puis Julien Bayou et Cyrielle Chatelain (EELV).

Mercredi, Mme Borne recevra successivement André Chassaigne (PCF) à 08H30, Mathilde Panot (LFI) à 16H00, enfin la cheffe de file des députés RN, Marine Le Pen.

Un décret du chef de l’État convoquant le parlement en session extraordinaire et fixant les textes qui seront examinés est attendu " dans les prochaines heures ", précise la lettre de Mme Borne, évoquant les mesures en faveur du pouvoir d’achat et le projet de loi de finance rectificative.

Le président Emmanuel Macron attend de sa part en fin de semaine des propositions " pour une feuille de route " et la composition d’un nouveau gouvernement prévu pour début juillet.

La question du maintien de Damien Abad dans ce gouvernement se pose, alors qu’une plainte pour tentative de viol a été déposée contre le ministre déjà visé par d’autres accusations d’agressions sexuelles. Il a annoncé en retour une plainte pour dénonciation calomnieuse.

Avec AFP