Paralysée par une impasse politique majeure, à cause des deux camps qui s’affrontent sur son territoire, la Libye, qui peine désormais à exporter ses hydrocarbures, subit une crise économique importante. En conséquence, les coupures d’électricités allant jusqu’à 18 heures sont quotidiennes. Des manifestations d’ampleur ont régulièrement lieu à Tripoli, la capitale.

Une nouvelle manifestation est prévue lundi 4 juillet à Tripoli contre les coupures de courant chroniques et l’impasse politique, trois jours après que des protestataires ont saccagé et brûlé le siège du Parlement.

Dans une apparente tentative d’apaiser la rue, le gouvernement de Tripoli a essentiellement consacré sa réunion hebdomadaire lundi aux problèmes des coupures électriques, le Premier ministre Abdelhamid Dbeibah reconnaissant que l’exécutif les avait sous-estimés.

De nouvelles manifestations

Libye
Des manifestations ont régulièrement lieu pour dénoncer l’impasse politique et les conditions de vie (AFP)

La réunion a eu lieu quelques heures avant une nouvelle manifestation prévue à l’appel d’un mouvement de jeunes à 16H00 (14H00 GMT), place des martyrs à Tripoli, pour exiger la tenue d’élections et la dissolution des deux gouvernements rivaux et des deux chambres du Parlement.

Ce mouvement entend également dénoncer la détérioration des conditions de vie dans le pays d’Afrique du Nord, symbolisée par les coupures chroniques d’électricité qui durent une douzaine d’heures par jour, voire 18 heures les jours de forte chaleur.

Dans la nuit de dimanche à lundi, des rassemblements épars ont eu lieu dans plusieurs quartiers de la capitale, selon un journaliste de l’AFP.

Des jeunes, pour la plupart encagoulés, ont brûlé des pneus et fermé plusieurs routes, notamment la ceinture périphérique de la capitale et la route côtière qui relie Tripoli à ses banlieues ouest.

Les forces de sécurité étaient absentes des lieux.

Impasse politique

Libye
Privés de l’argent des hydrocarbures, la Libye subit une crise politique et économique (AFP)

Des rassemblements ont également eu lieu dans les villes de Beni Walid et Misrata, dans l’ouest du pays, selon des images diffusées par les médias locaux.

Englués dans une impasse politique inextricable, les dirigeants rivaux en Libye se trouvent depuis trois jours sous une pression croissante de la rue.

Vendredi à Tobrouk, dans l’extrême est du pays, des manifestants ont forcé l’entrée du Parlement à l’aide d’un bulldozer avant d’y mettre le feu.

Cette institution est l’un des symboles de la division de la Libye entre un camp basé en Cyrénaïque (Est), dont le chef de file est le maréchal Khalifa Haftar, et un gouvernement basé à Tripoli dirigé par Abdelhamid Dbeibah.

Le camp Haftar appuie un gouvernement rival formé en mars dernier avec le soutien du Parlement. Ses partisans bloquent depuis mi-avril des installations pétrolières clefs comme moyen de pression pour déloger l’exécutif de Tripoli.

Blocus pétrolier et manque d’argent

Libye
Le chef d’État-Major de l’armée libyenne, le Lieutenant General Mohamed al-Haddad (gauche) et le Premier ministre par intérime, Abdulhamid Dbeibah (AFP)

Le blocus provoque aussi une baisse de la production de gaz, pourtant nécessaire à l’approvisionnement du réseau électrique.

Ce n’est pas la première fois que le secteur névralgique de l’énergie, qui du temps de l’ancien dirigeant Mouammar Kadhafi, tué durant la révolte populaire de 2011, permettait de financer un État providence, se retrouve en otage des divisions politiques.

Début 2020, en pleine guerre civile, Khalifa Haftar avait instauré un blocus pétrolier, avant de le lever au bout de quelques mois après l’échec d’une offensive qu’il avait lancée sur la capitale.

Le nouveau blocus a entraîné des pertes de plus de 3,5 milliards de dollars, selon la Compagnie nationale libyenne de pétrole (NOC).

" Nul ne peut contester le droit des gens à sortir protester pour demander des élections ", a déclaré lundi M. Dbeibah, le chef du gouvernement basé à Tripoli, au cours du conseil des ministres.

Une crise sous-estimée

Antonion Guterres
Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a appelé " tous les acteurs à s’abstenir de toute action qui pourrait nuire à la stabilité " et les a exhortés " à se rassembler pour surmonter l’impasse politique persistante " (AFP)

Il a reconnu que le gouvernement avait " sous-estimé la crise de l’électricité ". " Nous nous sommes rendus compte que le problème nécessitait beaucoup plus de temps que nous pensions ", a-t-il ajouté.

Un énième round de pourparlers sous l’égide de l’ONU pour tenter de résoudre les divergences entre les institutions libyennes rivales s’est soldé par un nouvel échec la semaine dernière.

Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a appelé " tous les acteurs à s’abstenir de toute action qui pourrait nuire à la stabilité " et les a exhortés " à se rassembler pour surmonter l’impasse politique persistante ".

Outre les coupures chroniques de courant, les contestataires crient leur colère contre l’inflation et les interminables files d’attente devant les stations d’essence.

Avec AFP