Mohammed Nemr doit comparaître le lundi 14 mars, à 10h, devant le bureau d’investigation criminelle, à la suite d’une note d’information judiciaire présentée contre lui par la présidence de la République.

La répression des journalistes se poursuit au Liban. La dernière tentative en date remonte à vendredi matin, lorsque le rédacteur en chef du site d’informations en ligne Grand LB, Mohammed Nemr, a été convoqué par un officier du bureau d’investigation criminelle. Il doit comparaître le lundi 14 mars, à 10h, devant ce bureau, au palais de Justice de Beyrouth, à la suite d’une note d’information judiciaire présentée contre lui par la présidence de la République.

L’objet de cette convocation est une information publiée le jeudi 10 mars sur le site en question, selon laquelle " des PDG de banques interpellés dans le cadre d’affaires financières se seraient rendus auprès d’un conseiller haut placé au palais présidentiel ". Il les aurait informé de " la nécessité de verser des sommes d’argent pour qu’ils ne fassent plus l’objet de poursuites judiciaires ", qui plus est " cet argent devait servir à financer la campagne électorale du Courant patriotique libre ".

La présidence de la République a démenti sur son compte Twitter ces informations, estimant qu’il " s’agissait d’une campagne de mensonges organisée contre " elle. Et de préciser, toujours sur Twitter, que ce démenti doit servir de note d’information judiciaire auprès du procureur général près la cour de cassation.

" Le bureau d’investigation criminelle n’est pas l’autorité compétente pour juger les journalistes, mais le tribunal des imprimés ", affirme à Ici Beyrouth Mohammed Nemr, soulignant qu’il n’a pas encore décidé s’il allait comparaître lundi. " Les discussions se poursuivent dans ce sens ", ajoute-t-il. Et d’insister: " Je pense que le peuple doit demander des comptes au régime pour toutes les violations constitutionnelles qu’il a commises et pour avoir mené le Liban en enfer. Au lieu qu’il ne se préoccupe des affaires de la population, il poursuit les journalistes pour leurs opinions. Il cherche à marquer une nouvelle victoire dans le dossier de la répression. "

" Musellement du journalisme "

Le Rassemblement des journalistes indépendants a condamné la convocation de Mohammed Nemr. Affichant sa solidarité avec le journaliste, le rassemblement a invité le régime à " s’occuper d’affaires plus sérieuses " et à ne plus " porter atteintes aux fondements du Liban, avec en tête de liste la liberté d’expression ".

Hassane Rifaï, avocat et ancien membre du bureau politique du Courant du futur, a lui aussi dénoncé la convocation du journaliste. " Vu les nombreuses violations de la Constitution par le président de la République et le blocage qu’il fait dans le dossier des permutations judiciaires et vu le parti pris de la présidence dans sa manière de gérer les dossiers libanais, toute information qui circule, dans les couloirs de Baabda, sur des pratiques contraires à la loi ou à la procédure est désormais plausible ", a déclaré M. Rifaï. Et de condamner " le musellement du journalisme dans un pays qui fonctionne sur les on-dit ".

Le président de l’ordre de la presse, Aouni el-Kaaki, a également condamné la convocation de Mohammed Nemr. Dans un communiqué, il a estimé que cette " démarche policière va à l’encontre de l’identité libanaise basée sur la liberté d’expression ". " C’est une preuve supplémentaire que le régime se trouve dans une situation tellement difficile qu’il ne tolère plus la critique ", a-t-il conclu.