Un soleil de plomb écrasant le peloton: un troisième fléau a frappé les cyclistes lors de la 10e étape du Tour de France, en plus des inévitables Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard, qui continuent à infliger une cadence effrénée au reste des coureurs.

Comme les Salers, les cyclistes aussi sont passés au grill dans les monts du Cantal: 39 degrés au tableau de bord des véhicules de course à l’arrivée à Issoire et des scènes de rescapés du désert. Le champion du monde 2014 Michal Kwiatkowski, échappé et huitième mardi, vidant la moitié d’une bouteille en cent mètres. Du sel, de la sueur cristallisée sur les cuissards. Des tapis de glaçons dans plusieurs coins du paddock des équipes. L’Espagnol David de la Cruz se livrant à une séance de récupération active en pédalant sur des rouleaux au pied du car, simili gilet pare-balle khaki sur les épaules, en fait une veste réfrigérante.

Et quand David Gaudu a rejoint le car de son équipe, un bout de collant servant de poche à glace pendait de sa nuque. Incapable de suivre le peloton en début d’étape, le leader de Groupama-FDJ, après avoir compté plus de deux minutes de débours, a finalement atteint Issoire dans le même temps que les favoris.

Coups de chaud de Gaudu et Bardet

" La chaleur ne m’a pas aidé, j’ai fait un petit coup de chaud au départ ", livre le grimpeur breton, rétrogradé à la neuvième position du classement général à cause de l’échappée victorieuse de l’Espagnol Pello Bilbao. Même effet étouffoir pour Romain Bardet, désormais onzième au général. Après avoir suivi le coup lancé par Vingegaard et suivi par Pogacar, l’Auvergnat a explosé dans la montée suivante, le col de Guéry, après seulement une vingtaine de kilomètres. " Quand il fait aussi chaud, on paie les efforts. Il était dans un groupe très fort qui roulait très vite. Il a surchauffé, s’est mis dans le rouge ", explique son directeur sportif chez DSM Matthew Winston.

En plus du soleil tannant la peau des coureurs, le goudron emmagasinant les rayons les calcine façon pyrolyse. Record cette année sur la Grande boucle, 60°C ont été enregistrés mardi sur l’enrobé d’Ardes dans le Puy de Dôme, à une trentaine de kilomètres de l’arrivée. Un relevé entrant dans le top 5 du " Monsieur Route " du Tour, André Bancalà, coordinateur des Départements de France. À quelques unités encore du record absolu, les 63°C du bitume dans la station des Rousses en 2010 lors de l’étape remportée par Sylvain Chavanel. " J’enregistre ce type de température tous les trois ou quatre ans normalement, mais ça s’accélère avec le réchauffement climatique ", observe André Bancalà. Selon ses relevés quotidiens, les températures moyennes enregistrées sur le revêtement des routes du Tour ont bondi de plus de dix degrés en moyenne en vingt ans.

Un paramètre scruté par les équipes

La canicule est devenue un paramètre de plus à gérer pour les équipes. Le camion de Jumbo-Visma, l’équipe du maillot jaune Jonas Vingegaard, est équipé depuis deux ans d’une machine à glaçons et les gels nutritifs avalés en course affichent une température d’entre 0°C et 2°C " pour refroidir l’organisme par l’intérieur ", explique le directeur de la performance Mathieu Heijboer.

Plusieurs équipes ont recours aussi à des capteurs enregistrant la température corporelle. Et ce n’est peut-être pas tout à fait un hasard si après la remontée furieuse de Michael Woods dans la fournaise du Puy de Dôme dimanche, un nouvel homme d’Israël-Premier Tech, le Letton Krists Neilands, a joué les premiers rôles mardi avant d’être repris à trois kilomètres du but. Ses coureurs sont équipés de maillot dont les fibres contiennent du graphène, matériau aux propriétés thermorégulatrices permettant une meilleure dissipation de la chaleur du corps. Son fabricant revendique une " réduction de la température à la surface du textile de -2,6°C ".

Si cela se vérifie, il sera utile dès vendredi avec 30°C annoncés par Météo France à Culoz, au pied du Grand Colombier, théâtre de la 13e étape. Pire, 34°C sont prédits samedi à Taninges avant l’ultime ascension de l’étape, le col de Joux Plane. Mais ce n’est pas pour déplaire à tout le peloton. " Moi, j’adore la chaleur, c’est mon truc, décrit Anthony Pérez échappé mardi. Je n’appréhendais pas cette journée, j’espère qu’il fera aussi chaud ces prochains jours. "

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