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Nous avons tous dans notre entourage une personne passionnée de football. Cette sphère d’activité a l’effet d’un icosaèdre tronqué, suscitant des émotions intenses chez chacun. La beauté de ce sport, s’il n’est pas le plus sublime qui ait jamais existé, a néanmoins réussi à mettre fin à des conflits, à rallier des peuples et à susciter des émotions, captivant plus de quatre milliards d’individus tous les quatre ans. Qu’en est-il du football libanais?

Un avant-goût…
Dans un pays qui considère le football comme l’un des sports nationaux les plus populaires aux côtés du basket, il est essentiel de prendre du recul et d’analyser d’un œil critique la situation de ce sport tant aimé de la plupart des Libanais. Derrière la passion débordante des supporters et l’engouement général, le football au Liban est malheureusement plombé par des problèmes systémiques qui ne peuvent être ignorés. La politique, omniprésente dans tous les aspects de la vie libanaise, a étendu son influence tentaculaire jusqu’au domaine sportif, sapant, en grande partie, la crédibilité et l’intégrité du football national.
La Fédération libanaise de football, censée être le moteur du développement du sport, est elle-même en proie à des problèmes endémiques de corruption. Les allégations de détournement de fonds, de favoritisme et de mauvaise gestion ternissent l’image de l’instance dirigeante du football. Le football local suit une pyramide de corruption politique bien définie: au sommet se trouvent les investissements des présidents de clubs, des individus richissimes mêlés aux oppositions religieuses. Descendant de ce sommet, l’argent investi au sein des clubs ressemble à des taxes dans un jeu de Monopoly; après une collecte généreuse des présidents, les investissements ne laissent aucune chance à une gestion saine des terrains. À ce jour, plus de huit joueurs ont souffert de blessures aux ligaments croisés au cours d’une seule saison de football. Les équipes, qu’elles soient de premier plan ou de moindre envergure, se débattent avec des problèmes de salaires impayés, de terrains et de pelouses en mauvais état, ainsi que d’infrastructures délabrées. Cette négligence nuit non seulement à la qualité du jeu, mais entrave également le développement des talents locaux. Au-delà du développement, selon des sources sûres, la ligue libanaise de football connaît à l’avance les équipes reléguées et promues en début de saison. Ahurissant!

En parlant de jeunes talents, la détection de jeunes promesses dans le domaine du football est de loin l’aspect qui nécessite le plus d’investissements. Avec une diaspora immense à travers le monde, il serait temps d’encourager les jeunes potentiels à s’investir pour revitaliser la ligue libanaise. Le Brésil et le continent africain comptent plus de 1.327 jeunes Libanais qui aspirent à faire carrière dans le football. Cependant, la mauvaise gestion et la corruption au sein de la Fédération éloignent ces talents de la scène locale, malgré l’existence de centres de formation prometteurs tels que l’Élite Football Academy, l’Athletico Sports Club et la Beirut Football Academy. Cette situation est d’autant plus préoccupante pour une sélection nationale composée de joueurs âgés entre 27 et 31 ans, qui portent le maillot des Cèdres. Notre enquête suggère que la sélection est influencée non pas par l’entraîneur, mais par le président de la fédération, et semble être basée sur des critères confessionnels. Il se pourrait que le manque d’expérience soit un frein au succès dans le domaine du football. Cependant, cela ne remet pas en question les talents présents dans la sélection nationale tels que Basel Jrade, Nader Matar, Karim Darwich et Mohammad Haydar. D’autre part, certains joueurs libanais préfèrent évoluer dans des ligues étrangères, comme les frères Melki, partis en Suède avant de revenir pour la nouvelle saison au Liban. Mais pourquoi quitter une ligue offrant davantage de visibilité, de meilleures infrastructures et un niveau plus élevé pour le Liban?

Argent, confession, politique 

Une autre ombre qui plane sur le football libanais est l’inégalité de représentation parmi les joueurs. Les opportunités pour les jeunes talents de divers milieux sociaux et régions géographiques sont souvent biaisées. Les sélections nationales et les équipes de premier plan sont parfois perçues comme étant influencées par des connexions politiques plutôt que par le mérite sportif. Cette pratique sape le principe fondamental de l’équité sportive et détourne le potentiel du football en tant que force unificatrice dans la société libanaise. Effectivement, la ligue libanaise de football est divisée en plusieurs équipes confessionnelles, les plus dominantes étant les équipes chiites (6), suivies des sunnites (3), des chrétiennes (2) et de l’équipe druze (1). Une fédération dirigée par un mouvement religieux qui favorise les équipes partageant les mêmes valeurs. Dans le classement, les présidents qui décrochent les meilleures négociations au cours de l’année verront leur équipe soit promue, soit reléguée, comme stipulé précédemment. Face à une mauvaise gestion de la ligue libanaise, plusieurs présidents souhaitant rester anonymes voient déjà Tamim Sleyman, président de la fédération, comme un Antoine Choueiry des temps modernes. Il incarne une vision plus large du sport et a déjà obtenu des résultats prometteurs au handball avec Al-Saad. Avec Al-Ahed, Tamim Sleyman espère réaliser avec son équipe, actuellement deuxième de la ligue libanaise et finaliste de la West Asia Cup, une saison mémorable.
L’arrivée d’un nouveau président pourrait laisser espérer un renouvellement de la sphère footballistique. Plus de mixité serait bénéfique, avec un recrutement plus avantageux pour les jeunes joueurs en pleine croissance et un mercato prometteur au niveau des joueurs étrangers. Une telle philosophie pourrait être mise en place si la vision change. Mais passer de l’ingérence d’un parti politique, tel que Amal, à un autre, même si ce n’est pas la même personne, ne représente pas un changement des plus bénéfiques.
L’éthique du sport est pour le moment bafouée et corrompue. Pas vraiment de nature à encourager les espoirs du football local à rester au Liban.

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