S’il n’a pas encore ramené l’AS Rome au sommet, José Mourinho a bel et bien conquis le coeur des tifosi giallorossi, qui rêvent d’une finale continentale à l’heure d’accueillir Leicester jeudi (22h00) en demi-finale retour de Ligue Europa Conférence (1-1 à l’aller).

Comme les " Romanisti ", qui seront quelque 60.000 dans un Stadio olimpico archi-complet, tout le pays du calcio s’en remet à " Mou ": une victoire romaine en C4 serait la première d’un club italien en Europe depuis celle en 2010 en Ligue des champions de l’Inter Milan, alors entraînée par un certain… José Mourinho.

" Peut-être qu’il est en passe de devenir une légende ", a récemment observé, non sans une pointe d’ironie, l’entraîneur de Naples Luciano Spalletti, lui-même ex-technicien de la Roma.

Mourinho – huit titres de champion dans quatre pays, deux Ligues des champions (2004, 2010) et deux Ligues Europa (2003, 2017) au palmarès – avait pourtant refusé les " promesses faciles " en arrivant l’été dernier, après des expériences mitigées à Manchester United et Tottenham. " Vous parlez de titres, et nous de temps, de projet, de travail… ", avait-il déclaré en juillet lors d’une conférence de présentation en grande pompe, organisée au Capitole quelques jours après son accueil digne d’une rockstar, avec fumigènes et drapeaux à l’aéroport et peinture sur les murs de la ville le montrant au guidon d’un scooter.

Nomination surprise

Cette passion apparue dès sa nomination surprise, il y a un an le 4 mai 2021, ne s’est jamais éteinte, malgré des revers brûlants contre la Lazio (2-3) ou la Juventus (3-4) en championnat ou un crash chez les modestes Norvégiens de Bodo/Glimt (1-6) en C4 et malgré des recrues pas toutes convaincantes – Tammy Abraham est la seule franche réussite.

Mais si " Mou " n’a pas réussi à qualifier la Roma en Ligue des champions (elle finira au mieux 5e en championnat, son classement actuel), l’expérimenté entraîneur de 59 ans a su faire renaître la passion chez les " gens de Rome ", comme il les appelle.

L’acte fondateur? Peut-être cette course vers la " Curva sud ", celle des ultras giallorossi, pour célébrer un but décisif dans le temps additionnel contre Sassuolo (2-1) en septembre pour son 1.000e match comme entraîneur.

L’Olimpico l’a toujours acclamé, y compris quand son équipe a pris une leçon en décembre contre l’Inter Milan (0-3) ou quand certains éditos pointaient déjà la fin de l' "effet Mou ".

Son nom, toujours le dernier annoncé après tous les joueurs, n’a jamais été autant ovationné que ces dernières semaines, dans un stade fréquemment complet avec la fin des restrictions sanitaires.

" Mourinho est exactement celui dont la Roma, les joueurs, les salariés, l’encadrement et les supporters avaient besoin. C’est la personne parfaite au moment parfait ", résumait en décembre le capitaine Lorenzo Pellegrini.

" Nous sommes petits "

Outre les supporters, Mourinho a en effet su fédérer les joueurs autour de lui, notamment avec une recette classique mais toujours efficace: dénoncer match après match un présumé arbitrage contraire.

Exemple en février, après un but refusé à Nicolo Zaniolo, exclu dans la foulée pour contestation, contre le Genoa (0-0): " Cela ne serait jamais arrivé à Martinez, Chiellini ou Ibrahimovic d’être exclu ainsi dans leur stade. Nous sommes petits aux yeux du pouvoir. " Idem en avril après un nul à Naples (1-1) où il a vu un penalty non sifflé pour son équipe: " Il faut plus de respect, aujourd’hui il semble qu’on n’avait pas le droit de jouer pour gagner. "

Ce week-end, il a fustigé encore un but accordé en position de hors-jeu pour la Lazio, rival direct dans la course à l’Europe, contre Spezia (4-3).

Les arbitres et les adversaires grincent, mais les fans adorent: " Il est entré dans le coeur des Romanisti ", confirme un autre ex-entraîneur romain Fabio Capello dans la Gazetta dello Sport, tout en mettant en garde " Mou ": " C’est un endroit qui te dévore: il t’exalte puis te met à terre, sans demi-mesure. "