Sixième au général alors qu’on arrive sur son terrain de prédilection, Romain Bardet avance toujours masqué dans le Tour de France où il mise sur une zénitude affirmée après des années de pression infernale.

C’est la première fois que le grimpeur français dispute le Tour vêtu du maillot d’une équipe étrangère, la Néerlandaise DSM, après huit éditions à grimper les cols avec la tunique d’AG2R. Une expatriation qui aide à dévier un peu les projecteurs de la silhouette affûtée de l’Auvergnat, discret mais bien placé depuis le départ du Danemark.

À 31 ans, il a à peu près tout connu sur la Grande Boucle, de la flamboyante deuxième place en 2016, confirmée par un nouveau podium l’année suivante, aux sombres années 2019 et 2020 entre défaillance et abandon. De candidat sérieux à la succession de Bernard Hinault, dernier vainqueur français en 1985, à nouvel espoir déçu, Romain Bardet est entré triomphalement dans " la machine à laver " du Tour pour en sortir tout essoré.

Chez AG2R, il a acquis une solide réputation de stakhanoviste, travailleur obsessionnel, de moine austère malgré son amour du vin. A DSM, il mise sur une approche nouvelle, faite de " lâcher prise " pour fuir la " pression superflue ", où le suivi du programme millimétré élaboré par son équipe l’emporterait sur le résultat, ou presque.

À 22 secondes du podium

C’est ainsi qu’il est arrivé au départ du Tour, sur la pointe des pieds, malgré un printemps assez brillant, après une victoire au Tour des Alpes et un début de Giro aérien jusqu’à son abandon à cause d’un virus à l’estomac. Assurant ne pas viser le classement général cette fois, mais plutôt une victoire d’étape, lui qui a déjà levé les bras à trois reprises sur le Tour, à Saint-Jean-de-Maurienne en 2015, Saint-Gervais Mont-Blanc en 2016, et Peyragudes en 2017.

Or le voilà sixième, à 1 min 39 sec du maillot jaune Tadej Pogacar et seulement 22 secondes du podium, après un début de Tour effectué dans le relatif anonymat du peloton de tête, sans exploit ni embûche, hormis une chute samedi dans le Jura, qu’il a quitté le genou gauche en sang.

De quoi revoir ses ambitions à la hausse? " Non, les plans n’ont pas changé. Je n’ai jamais dit non plus que je voulais perdre du temps volontairement. Je suis là, dans le coup. Mis à part la petite chute il y a deux jours, le bilan est positif ", assure-t-il lundi en visionconférence lors de la journée de repos depuis son hôtel après une petite sortie sous le soleil le matin.

" Légère gêne "

Le genou ? " Hier j’ai senti une légère gêne et ce matin c’est un peu plus raide, donc le repos tombe à point nommé. J’ai plus de mal à plier ma jambe. Mais une fois que c’est chaud, ça va à peu près. Je ne pense pas que ce soit très inquiétant. Si ça reste comme ça, ça devrait aller. "

L’appétit est là visiblement, d’autant qu’on arrive sur son terrain de jeu préféré, avec trois étapes dans les Alpes, dont deux au profil dantesque mercredi et jeudi, avant la traversée des Pyrénées la semaine prochaine.

" Le Tour a été spécialement intense jusque-là, mais en termes de dénivelé, d’enchaînements ça n’a rien de comparable à ce qui nous attend. Les étapes de mercredi et jeudi vont être hyper importantes. C’est là où on va vraiment voir la première hiérarchie se dessiner ".

Le grimpeur auvergnat inclut les étapes de Saint-Etienne vendredi et Mende samedi dans cette semaine " vraiment difficile ". Mais ne se projette pas encore sur le contre-la-montre de 40 kilomètres à la veille de l’arrivée sur les Champs-Elysées, moins favorable pour lui, même s’il a progressé dans l’exercice et qu’en fin de Tour les écarts entre les hommes en forme et les spécialistes du chrono sont souvent moins importants.

Et Romain Bardet est traditionnellement plutôt à son aise en troisième semaine. " J’apprécie la situation telle qu’elle est maintenant, elle permet de garder toutes les portes ouvertes ", dit-il, sans s’enflammer, tout en relâchement.

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