L’éclaircie dans les relations libano-saoudiennes, à la faveur du sommet de Djeddah samedi, entre le président français Emmanuel Macron, et le prince héritier saoudien Mohammed ben Salman a permis au Liban de prendre un grand coup d’oxygène. Celui-ci reste cependant insuffisant parce que le pays risque très rapidement de replonger, tête la première, dans les crises qui bloquent sa progression sur la voie d’un rétablissement vital.
Deux questions s’imposent aujourd’hui : comment les autorités libanaises mettront-elles en œuvre la feuille de route que Paris et Riyad leur prévoient, afin de pouvoir bénéficier d’aides saoudiennes et occidentales ? Celle-ci porte sur le contrôle des frontières, la lutte contre la corruption, le monopole des armes et l’«arrêt d’actes terroristes à partir du Liban », dans une allusion on ne peut plus claire aux activités extra-frontalières du Hezbollah. Comment les autorités règleront-elles aussi le conflit politique autour de la procédure judiciaire engagée par le juge d’instruction Tarek Bitar dans l’affaire de l’enquête sur l’explosion du 4 août au port de Beyrouth, sans se soumettre au chantage du tandem chiite, Amal et le Hezbollah : la reprise des réunions du gouvernement en contrepartie de l’écartement du magistrat du dossier ?
La réponse aux deux se trouve chez le Hezbollah, d’où le problème auquel est confronté un Etat qui n’a pas les moyens de sa politique : A moins que la formation chiite ne jette du lest et ne se décide à faire passer les intérêts des Libanais avant les siens, il ne sera pas possible au pays d’emprunter la voie du rétablissement ouverte à demi samedi à Djeddah. Citant un responsable saoudien, une personnalité politique libanaise confie à Ici Beyrouth que le royaume wahhabite ne viendra pas en aide au Liban tant que celui-ci ne tiendra pas compte de ses revendications qui sont au final les engagements des autorités libanaises devant la communauté internationale. L’Arabie, affirme ce responsable, n’a aucun problème personnel avec les dirigeants libanais, comme en témoigne la conversation téléphonique entre MBS et le Premier ministre libanais, Nagib Mikati ainsi que le retour prochain –aucune date n’a été cependant précisée- de l’ambassadeur saoudien, Walid el-Boukhari à Beyrouth. Ce dernier est cependant dotée d’une mission, selon la même source : transmettre aux autorités libanaises les revendications de Riyad qu’il avait d’ailleurs résumées dans un tweet : Un retour à la politique de distanciation vis-à-vis des conflits dans la région, l’arrêt des attaques contre le royaume et ses dirigeants, la mise en application des résolutions internationales sur le désarmement des milices, le respect de l’accord de Taëf et la réalisation de réformes.
Riyad ne se fait pas trop d’illusions quant à l’aptitude des autorités libanaises à se conformer aux engagements qu’elles prennent. Ce même responsable relève ainsi dans un mélange d’étonnement et d’indignation qu’au moment où MBS s’entretenait au téléphone avec M. Mikati, la chaîne de télévision du Hezbollah, Al-Manar, lançait une attaque en règle contre les Saoudiens. Selon lui, l’ouverture saoudienne en direction du Liban est à interpréter surtout comme un geste de bonne volonté du royaume adressé essentiellement au président français, la seule personnalité occidentale à avoir visité Riyad depuis bien longtemps et plus particulièrement depuis l’arrivée du président américain, Joe Biden, à la Maison blanche, en novembre 2020. Dans ce contexte, il serait utile de rappeler que la tempête diplomatique soulevée par l’Arabie à la suite des propos contestés de l’ancien ministre de l’Information, Georges Cordahi, sur la guerre au Yémen, avait été interprétée par de nombreux analystes comme un moyen pour MBS de pousser l’Occident à prendre langue avec lui. Le prince héritier saoudien avait mal pris le fait que Paris et Washington aient fini par accepter le retour du Hezbollah au sein du gouvernement, avec la formation du gouvernement Mikati, au moment où la crise culminait dans un Liban privé d’électricité, de médicaments et incapable de s’en procurer.
Il n’en demeure pas moins que les Saoudiens considèrent que la balle est de nouveau aujourd’hui dans le camp de la France qui devrait maintenir son intervention pour une sortie de crise au Pays du Cèdre. De sources proches de l’Elysée, on indique qu’Emmanuel Macron devrait prendre contact sous peu avec son homologue libanais, Michel Aoun, et pourrait dépêcher à Beyrouth son émissaire Patrick Durel, qui faisait partie de la délégation française à Djeddah.
Le nœud Bitar
Reste le nœud des réunions du Conseil des ministres, bloqué depuis le 12 octobre parce que Amal et le Hezbollah souhaitent que le gouvernement prenne officiellement position par rapport au juge Bitar qui a engagé des poursuites et émis des mandats d’arrêt contre des anciens ministres qui leur sont proches et dont il retient la responsabilité administrative et politique, du fait de leur négligence présumée dans l’explosion du 4 août 2020. Les deux formations qui boycottent le gouvernement et menacent d’en démissionner accusent le magistrat de politiser l’enquête et exigent de l’Exécutif de prendre position, c’est-à-dire de leur emboîter le pas en portant un coup au principe de la séparation des pouvoirs et en consacrant les interventions politiques dans les affaires de la justice.
Des cadres du Hezbollah et d’Amal, comme les anciens ministres Mohammed Fneich et Ali Hassan Khalil, se sont de nouveau déchaînés dimanche contre Tarek Bitar, appelant le gouvernement à « régler les défaillances qui ont débouché sur un blocage de ses réunions ». La solution, estime-t-on de sources concordantes, réside dans une intervention du Parlement qui voterait en faveur d’une comparution des anciens ministres Ali Hassan Khalil, Ghazi Zeayter et Nohad Machnouk devant la Haute Cour chargée de juger les présidents et les membres du gouvernement. Or, pour cela, la Chambre a besoin des voix de la majorité de ses membres, ce qui n’est pas le cas actuellement avec le refus du bloc aouniste de s’associer à cette démarche. De mêmes sources, on indique que les concertations politiques se multiplient avant la réunion parlementaire de mardi, à l’ordre du jour de laquelle figure le texte de loi contesté sur le capital control. Le bloc aouniste refuse d’approuver ce texte « qui va servir à masquer des transferts de fonds suspects ». Des sources parlementaires font part de leur inquiétude quant à la possibilité que la réunion de mardi, au cours de laquelle la Chambre va aussi plancher sur la carte d’approvisionnement, n’ait pas lieu, faute de quorum, si un accord n’intervient pas au préalable sur les deux dossiers du juge Bitar et du capital control.
Deux questions s’imposent aujourd’hui : comment les autorités libanaises mettront-elles en œuvre la feuille de route que Paris et Riyad leur prévoient, afin de pouvoir bénéficier d’aides saoudiennes et occidentales ? Celle-ci porte sur le contrôle des frontières, la lutte contre la corruption, le monopole des armes et l’«arrêt d’actes terroristes à partir du Liban », dans une allusion on ne peut plus claire aux activités extra-frontalières du Hezbollah. Comment les autorités règleront-elles aussi le conflit politique autour de la procédure judiciaire engagée par le juge d’instruction Tarek Bitar dans l’affaire de l’enquête sur l’explosion du 4 août au port de Beyrouth, sans se soumettre au chantage du tandem chiite, Amal et le Hezbollah : la reprise des réunions du gouvernement en contrepartie de l’écartement du magistrat du dossier ?
La réponse aux deux se trouve chez le Hezbollah, d’où le problème auquel est confronté un Etat qui n’a pas les moyens de sa politique : A moins que la formation chiite ne jette du lest et ne se décide à faire passer les intérêts des Libanais avant les siens, il ne sera pas possible au pays d’emprunter la voie du rétablissement ouverte à demi samedi à Djeddah. Citant un responsable saoudien, une personnalité politique libanaise confie à Ici Beyrouth que le royaume wahhabite ne viendra pas en aide au Liban tant que celui-ci ne tiendra pas compte de ses revendications qui sont au final les engagements des autorités libanaises devant la communauté internationale. L’Arabie, affirme ce responsable, n’a aucun problème personnel avec les dirigeants libanais, comme en témoigne la conversation téléphonique entre MBS et le Premier ministre libanais, Nagib Mikati ainsi que le retour prochain –aucune date n’a été cependant précisée- de l’ambassadeur saoudien, Walid el-Boukhari à Beyrouth. Ce dernier est cependant dotée d’une mission, selon la même source : transmettre aux autorités libanaises les revendications de Riyad qu’il avait d’ailleurs résumées dans un tweet : Un retour à la politique de distanciation vis-à-vis des conflits dans la région, l’arrêt des attaques contre le royaume et ses dirigeants, la mise en application des résolutions internationales sur le désarmement des milices, le respect de l’accord de Taëf et la réalisation de réformes.
Riyad ne se fait pas trop d’illusions quant à l’aptitude des autorités libanaises à se conformer aux engagements qu’elles prennent. Ce même responsable relève ainsi dans un mélange d’étonnement et d’indignation qu’au moment où MBS s’entretenait au téléphone avec M. Mikati, la chaîne de télévision du Hezbollah, Al-Manar, lançait une attaque en règle contre les Saoudiens. Selon lui, l’ouverture saoudienne en direction du Liban est à interpréter surtout comme un geste de bonne volonté du royaume adressé essentiellement au président français, la seule personnalité occidentale à avoir visité Riyad depuis bien longtemps et plus particulièrement depuis l’arrivée du président américain, Joe Biden, à la Maison blanche, en novembre 2020. Dans ce contexte, il serait utile de rappeler que la tempête diplomatique soulevée par l’Arabie à la suite des propos contestés de l’ancien ministre de l’Information, Georges Cordahi, sur la guerre au Yémen, avait été interprétée par de nombreux analystes comme un moyen pour MBS de pousser l’Occident à prendre langue avec lui. Le prince héritier saoudien avait mal pris le fait que Paris et Washington aient fini par accepter le retour du Hezbollah au sein du gouvernement, avec la formation du gouvernement Mikati, au moment où la crise culminait dans un Liban privé d’électricité, de médicaments et incapable de s’en procurer.
Il n’en demeure pas moins que les Saoudiens considèrent que la balle est de nouveau aujourd’hui dans le camp de la France qui devrait maintenir son intervention pour une sortie de crise au Pays du Cèdre. De sources proches de l’Elysée, on indique qu’Emmanuel Macron devrait prendre contact sous peu avec son homologue libanais, Michel Aoun, et pourrait dépêcher à Beyrouth son émissaire Patrick Durel, qui faisait partie de la délégation française à Djeddah.
Le nœud Bitar
Reste le nœud des réunions du Conseil des ministres, bloqué depuis le 12 octobre parce que Amal et le Hezbollah souhaitent que le gouvernement prenne officiellement position par rapport au juge Bitar qui a engagé des poursuites et émis des mandats d’arrêt contre des anciens ministres qui leur sont proches et dont il retient la responsabilité administrative et politique, du fait de leur négligence présumée dans l’explosion du 4 août 2020. Les deux formations qui boycottent le gouvernement et menacent d’en démissionner accusent le magistrat de politiser l’enquête et exigent de l’Exécutif de prendre position, c’est-à-dire de leur emboîter le pas en portant un coup au principe de la séparation des pouvoirs et en consacrant les interventions politiques dans les affaires de la justice.
Des cadres du Hezbollah et d’Amal, comme les anciens ministres Mohammed Fneich et Ali Hassan Khalil, se sont de nouveau déchaînés dimanche contre Tarek Bitar, appelant le gouvernement à « régler les défaillances qui ont débouché sur un blocage de ses réunions ». La solution, estime-t-on de sources concordantes, réside dans une intervention du Parlement qui voterait en faveur d’une comparution des anciens ministres Ali Hassan Khalil, Ghazi Zeayter et Nohad Machnouk devant la Haute Cour chargée de juger les présidents et les membres du gouvernement. Or, pour cela, la Chambre a besoin des voix de la majorité de ses membres, ce qui n’est pas le cas actuellement avec le refus du bloc aouniste de s’associer à cette démarche. De mêmes sources, on indique que les concertations politiques se multiplient avant la réunion parlementaire de mardi, à l’ordre du jour de laquelle figure le texte de loi contesté sur le capital control. Le bloc aouniste refuse d’approuver ce texte « qui va servir à masquer des transferts de fonds suspects ». Des sources parlementaires font part de leur inquiétude quant à la possibilité que la réunion de mardi, au cours de laquelle la Chambre va aussi plancher sur la carte d’approvisionnement, n’ait pas lieu, faute de quorum, si un accord n’intervient pas au préalable sur les deux dossiers du juge Bitar et du capital control.
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