Un Libanais à la tête de Shell
Le directeur général de Shell, le Néerlandais Ben van Beurden, quittera ses fonctions fin 2022 et sera remplacé par Wael Sawan, qui prendra ses fonctions au 1er janvier. Agé de 48 ans et détenteur d'une double nationalité libano-canadienne, Wael Sawan est né à Beyrouth et a grandi à Dubaï avant d'étudier l'ingénierie à l'université de McGill, au Canada, et la gestion d'entreprises à Harvard, aux Etats-Unis.

Wael Sawan siégeait au comité exécutif de Shell depuis trois ans.

 

Le nouveau patron de Shell, qui dirigeait jusqu'alors les activités liées aux énergies renouvelables, est un pur produit du groupe qui aura la lourde tâche de mener la transition énergétique du géant des hydrocarbures tout en préservant ses bénéfices.

Il a notamment supervisé l'acquisition d'une plateforme d'énergie nucléaire américaine, Savion, et obtenu des licences d'exploitation d'énergie éolienne lors d'enchères aux Etats-Unis, en Europe et en Asie, explique sa biographie sur le site de Shell.

Il a grimpé les échelons chez Shell au cours d'une carrière de 25 ans, dirigeant la branche d'exploration et production, et avant cela les activités d'extraction offshore en eau profonde, un rôle qui l'a mené aux Etats-Unis, au Brésil, au Nigeria, ou encore en Malaisie.



 

Auparavant, cet homme discret, jusqu'alors peu présent dans les médias, a dirigé Shell au Qatar, entre autres fonctions.

Il siégeait au comité exécutif du groupe depuis trois ans. Il prend la suite de M. van Beurden, qui laisse derrière lui une entreprise assise sur des montagnes de bénéfices grâce à la flambée des hydrocarbures.

Si le groupe a publié un plan de transition vers la neutralité carbone pour 2050, il est régulièrement critiqué pour continuer à tout-va la production d'hydrocarbures et donc ses émissions de CO2.

Pour Victoria Scholar, analyste de Interactive Investors, il n'est pas étonnant que M. Sawan, en charge notamment des renouvelables jusqu'à présent, ait décroché le poste de directeur général, vu la transition énergétique en cours dans le groupe.

Une station de liquéfaction de gaz naturel destiné à l'exportation dans des méthaniers.

 

"Pour un groupe dont la stratégie sur les renouvelables est assez vague, c'est un signal clair que Shell veut changer cela", même si "cela ne se fera pas en un jour", renchérit Sophia Lund-Yates, analyste de Hargreaves Lansdwon.

Shell entre dans "une nouvelle ère", note Neil Wilson, analyste de Markets.com, soulignant que la guerre en Ukraine a fait revenir au premier rang des priorités la sécurité énergétique, et donc le forage pétrolier et gazier.

Le président du conseil d'administration de Shell, Andrew Mackenzie, a décrit M. Sawan comme "un leader exceptionnel" ayant "toutes les qualités" requises pour guider le groupe, louant sa "réussite commerciale, opérationnelle, transformationnelle", la "clarté de sa vision stratégique".

Images du siège de Shell à La Haye avant le vote des actionnaires sur le déplacement du siège des Pays-Bas vers le Royaume-Uni après un siècle et l'abandon du nom Royal Dutch.

 

Il ajoute que le nouveau directeur général a une "passion pour les gens qui lui permet d'obtenir le meilleur d'eux-mêmes".

Se disant "honoré" de sa nomination, M. Sawan a promis que le groupe serait "discipliné et centré sur la génération de valeur" pendant qu'il travaillera à générer "l'énergie fiable, abordable et propre dont le monde a besoin", reprenant ainsi l'un des mantras de Shell.


M. van Beurden, âgé de 64 ans, gardera un rôle de conseiller du conseil d'administration jusqu'en juin puis quittera le groupe, indique Shell dans un communiqué jeudi.

Le groupe n'a pas précisé si M. van Beurden partira en retraite ou prendra un poste dans une nouvelle entreprise. Le dirigeant a piloté le groupe pendant la pandémie quand les cours des hydrocarbures s'étaient effondrés.

Le Néerlandais Ben van Beurden, ci-devant directeur général de Shell, lors d'une réunion avec Vladimir Poutine en juin 2017, à l'époque où les majors pétroliers faisaient les yeux doux au tyran du Kremlin.

 

Ils ont spectaculairement rebondi avec la reprise économique post-confinements liés au Covid-19, et depuis l'invasion russe de l'Ukraine, qui perturbe l'approvisionnement mondial.

Shell a publié fin juillet un bénéfice net de 18 milliards de dollars pour le deuxième trimestre, grâce à l'envolée des prix du pétrole et gaz, des profits tels qu'ils ont fait polémique en pleine crise du coût de la vie et flambée des factures énergétiques.

Vu leurs "super-profits", les géants des hydrocarbures britanniques s'étaient vu imposer une taxe spéciale sur les bénéfices par Londres, mais la nouvelle Première ministre Liz Truss, qui a travaillé pour Shell plusieurs années avant son entrée en politique, a prévu d'y mettre un terme.

Une plateforme de forage de pétrole dans le Golfe du Mexique.

 

Le géant pétrolier et gazier est régulièrement critiqué pour son impact sur l'environnement, et son assemblée générale en mai a notamment été largement chahutée par des militants écologistes.

En mai, une consultante de Shell avait démissionné avec fracas, accusant le géant pétrolier britannique d'"échouer complètement dans (son) ambition de transition".

Un investisseur institutionnel, Royal London Asset Management, avait aussi critiqué le plan de transition climat de Shell.

L'entreprise a par ailleurs fait appel de la décision d'un tribunal néerlandais qui lui avait ordonné de réduire ses émissions de CO2 dans une affaire retentissante lancée par un collectif d'ONG.

Des militants environnementaux devant le palais de Justice à La Haye, lors de la requête d'un collectif d'ONG qui tentait de contraindre Shell à réduire ses émissions de CO2, accusant le géant pétrolier de ne pas faire assez pour s'aligner sur l'Accord de Paris.

 

Mené par M. van Beurden, Shell avait fait l'acquisition jugée réussie en 2016 du groupe britannique BG pour 47 milliards de livres, ce qui lui a permis de se développer largement dans le gaz, et de bénéficier depuis de l'envolée du prix de cette énergie, notamment depuis la guerre en Ukraine.

En décembre, les actionnaires du géant des hydrocarbures avaient voté massivement en faveur du transfert du siège social des Pays-Bas vers le Royaume-Uni et du retrait de "Royal Dutch" du nom du groupe, né au début du XXe siècle de la fusion entre la britannique Shell et la néerlandaise Royal Dutch.

Shell a dédommagé à hauteur de 70 millions d'euros une communauté nigériane touchée par des fuites de pétrole en 2008.

 

Avec AFP
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