Présidentielle: otage des tensions internes et régionales  
Parlement Libanais en session. ©Bureau médiatique du Parlement libanais

Le dossier de la présidentielle libanaise est confronté à une multitude d’obstacles, tant internes qu’internationaux. À chaque nœud dénoué, un autre, encore plus complexe, émerge, comme si le destin s’acharnait à maintenir les portes du palais de Baabda fermées jusqu'à la résolution complète des crises régionales.

Cette situation s’inscrit dans un contexte marqué par une série d’événements, allant des luttes politiques internes à la guerre de Gaza, en passant par les affrontements militaires entre Israël et le Hezbollah. À cela s’ajoute la riposte israélienne attendue contre l’Iran et les négociations compliquées sur un éventuel cessez-le-feu dans la région.

Dans ce contexte, des milieux gouvernementaux estiment que la proposition américano-française ne sera pas retenue. Washington semble adopter une approche plus prudente, attendant d’observer les effets de la riposte israélienne contre l’Iran et ses conséquences sur la région avant de s’engager davantage. Par conséquent, il paraît peu probable qu'une élection présidentielle ait lieu au Liban tant que la situation intérieure ne sera pas stabilisée et que les dynamiques régionales ne seront pas éclaircies.

Un député de la Rencontre démocratique (PSP) ayant participé aux discussions politiques pour accélérer le dossier de la présidentielle au Liban a déclaré: “Nous n'avons pas réussi à rapprocher les points de vue. Chacun attend les développements, certains espérant la victoire du Hezbollah et de ses alliés régionaux, tandis que d'autres misent sur la possibilité d'une résolution diplomatique des conflits dans la région.”

Parallèlement, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, soutenu par les États-Unis, a décidé de mettre un terme à l'influence iranienne, en ciblant d'abord le Hezbollah. Son objectif est de neutraliser sa machine militaire et d'éliminer ses dirigeants. Cette stratégie vise à transformer la formation pro-iranienne en un parti politique, permettant ainsi un retour sécurisé des colons dans le nord d'Israël. En ce sens, la guerre de Gaza serait le dernier conflit de la région, ouvrant la voie à une paix globale et juste.

Par ailleurs, l’assassinat du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a eu un impact considérable sur la dynamique interne du groupe pro-iranien, provoquant un déséquilibre important. L'absence de Nasrallah a déclenché une lutte pour la succession entre deux factions distinctes: l'une se tournant vers l'autorité religieuse de Qom en Iran, l'autre vers celle de Najaf en Irak. Cette division a été exacerbée par l'attaque contre Hachem Safieddine, un des candidats principaux à la succession, ce qui a conduit à l'échec des accords de succession. Face à cette crise, Naïm Kassem, le secrétaire général adjoint du Hezbollah, a pris les rênes du parti. Dans la foulée, le guide suprême Ali Khamenei a désigné Mohammad Reza Fallahzadeh, commandant adjoint de la force Al-Qods, pour superviser le Hezbollah jusqu’à l’élection d’un nouveau secrétaire général. Ainsi, l'Iran maintient le contrôle de la direction et des décisions du parti, cherchant à éviter toute dérive ou action imprévue.

Face à cette réalité, le président du Parlement, Nabih Berry, a assumé la direction du tandem Amal-Hezbollah, précisant ses choix politiques, alors que le Liban s'engage dans une phase encore plus sombre, surtout qu'Israël ne fait que marquer des points à ce stade.

En effet, Israël a déclaré sa guerre au Hezbollah, et non au Liban, comme l’a affirmé Netanyahou. Cette guerre ne prendra fin que selon des conditions précises, notamment le transfert des armes au-delà du fleuve Litani et le désarmement du parti pro-iranien, conformément à la résolution 1559 du Conseil de sécurité des Nations unies. À cet égard, Nabih Berry a également souligné que cette résolution est devenue une simple évocation: “Elle n’est plus qu’un souvenir dont on parle, mais elle ne sera pas mise en œuvre.”

Cette déclaration soulève un débat plus large sur l'applicabilité des résolutions internationales. En effet, les milieux du tandem Amal-Hezbollah soutiennent que la résolution 1559 est un sujet de discorde politique interne et ne bénéficie pas du même consensus que la résolution 1701. Bien qu’il existe un accord autour de cette dernière, des critiques émergent au sein de l’opposition quant à son application, mettant en évidence que le Hezbollah ne l’a pas mise en œuvre. Par ailleurs, l'opposition rappelle que l'application de la résolution 425 (1978), qui n'avait pas fait l'objet d'un consensus, a été réalisée en 2000. Ainsi, l'application des résolutions internationales reste une obligation pour l'État, indépendamment du temps nécessaire à leur mise en œuvre.

Selon des sources diplomatiques occidentales, tous les yeux sont rivés sur la réaction d’Israël face à l’Iran. S'agira-t-il d'une réaction symbolique conforme aux directives de Washington pour éviter une escalade vers la guerre, ou bien Israël optera-t-il pour une approche plus proactive, visant à éliminer l'influence iranienne dans la région et à déstabiliser le régime des mollahs?

Israël isole le Liban en imposant un blocus contrôlé de ses frontières aériennes, maritimes et terrestres, ayant détruit la plupart des points de passage entre le Liban et la Syrie, qu'ils soient légaux ou illégaux. Ces mesures visent à faciliter le processus de désarmement du Hezbollah, qui se retrouve face à deux options: soit il remet son armement à l'armée libanaise, soit les armes sont renvoyées en Iran, conformément à un plan international. Israël exploite cette stratégie pour affaiblir le Hezbollah et neutraliser son arsenal, tout en se préparant à une éventuelle attaque contre l'Iran.

Selon des sources citant un responsable militaire américain, la réponse d'Israël à l'Iran sera inattendue, laissant Téhéran dans l'incertitude quant au moment, à la manière et au lieu de l'attaque. Cette riposte s'écartera des méthodes traditionnelles et visera à affaiblir l'Iran, ce qui est salué par beaucoup d'observateurs. Cependant, un responsable américain évoque également que Netanyahou “promet, mais ne tient pas ses promesses. Et lorsqu’on lui demande, il répond qu’il n’a jamais promis d’agir”.

Cela soulève la question suivante: Israël respectera-t-il les limites fixées par les États-Unis pour éviter une escalade vers la guerre et faciliter un grand règlement dans la région, conformément aux souhaits de Washington?

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