À l’heure où le Liban est en pleine déconstruction, le président du conseil d’administration et directeur général de la Banque de l’habitat (BDH), Antoine Habib, parle de construction, de reconstruction et de rénovation.
Dans une interview à Ici Beyrouth, le président du conseil d’administration et directeur général de la Banque de l’habitat (BDH), Antoine Habib, dévoile que, malgré les conditions noires dans lesquelles se trouve le Liban, l’institution financière a recommencé à accorder des prêts qui ont déjà été décaissés. Ces prêts destinés à des personnes à revenus limités et moyens incluent l’achat d’un appartement, la rénovation d’une habitation, la construction sur un terrain ou l’installation de panneaux solaires.
Un certain nombre de conditions sont prescrites pour l’approbation de la demande, dont les plus importantes sont les suivantes: la superficie de l’appartement ne doit pas dépasser 150 mètres carrés; le demandeur doit être libanais, ne pas bénéficier d’un prêt bonifié et ne pas posséder de terrains au Liban; 20% de la valeur de l’achat doit être assurée; et le salaire mensuel doit se situer entre 1.200 et 1.500 dollars.
Les montants accordés sont de 50.000 dollars pour les personnes à revenus moyens et de 40.000 dollars pour celles à faibles revenus. M. Habib a souligné que les prêts pouvaient être consentis à des personnes ayant des besoins spéciaux. Il a tenu à préciser que toutes les demandes se font en ligne pour éviter des ingérences, des pressions politiques et des pistons.
M. Habib a révélé que 25.000 personnes ont visité le site. 6.000 ont rempli l’application sans la poursuivre jusqu’au bout et 3.000 ont soumis des demandes complètes ainsi réparties dans les six branches de la BDH: 2.537 pour l’achat, 289 pour la construction, 246 pour la rénovation en dollars et 4 pour la rénovation en livres libanaises; et ce, jusqu’au 10 octobre.
La plupart des demandes ont été effectuées à partir des branches de Beyrouth, pour des achats en dehors de la capitale où les prix sont plus abordables. Néanmoins, parmi ces 3.000 demandes qui ont satisfait les conditions, seules 800 avaient trouvé le bien à acheter. M. Habib rappelle qu’il faut impérativement un acte de propriété.
Quid du financement et du remboursement de ces prêts?
Il convient de rappeler que, grâce à un prêt du Fonds arabe pour le développement économique et social à la BDH, les Libanais peuvent de nouveau bénéficier de prêts subventionnés au logement. En effet, le Fonds a approuvé un prêt à l’institution financière qui s’étend sur cinq ans, d’un montant de 50 millions de dinars koweïtiens, soit 165 millions de dollars. Chaque année, la BDH recevra 10 millions de dinars, soit 34 millions de dollars par an, répartis en deux versements semestriels de 5 millions. Le premier versement de 17 millions de dollars a été reçu début septembre.
La Banque du Liban sera l’intermédiaire pour transférer le montant sur le compte que la BDH a ouvert à la National Bank of Koweit, à Bahreïn. Les virements, vers et depuis ce compte seront effectués par les emprunteurs. M. Habib a lié la raison de l’adoption de ce mécanisme de comptes transfrontaliers à ce qui s’est passé après l’effondrement de la livre libanaise et aux Libanais qui ont remboursé en livres libanaises leurs emprunts contractés en dollars. “Le remboursement en dollars sera ainsi garanti”, précise-t-il, notant “que la source de financement est en dollars”.
Dans ce cadre, il convient de rappeler que la BDH a reçu 3 crédits subventionnés du Fonds arabe: 51 millions de dollars en 1995, 110 millions en 2012 et 165 millions en 2019. Or, avec la crise financière au Liban, ces fonds n’ont pas été utilisés pendant cinq ans. Selon la loi, ils sont annulés pour non-utilisation. En 2022, M. Habib a entamé des discussions avec le Fonds pour relancer le prêt. Mais, avec le défaut de paiement du Liban, les négociations ont été ardues. Toutefois, après un rapport détaillé montrant que la BDH a continué à rembourser le capital et les intérêts, le Fonds a donné une réponse favorable pour renouveler exceptionnellement le prêt et redébloquer le montant.
Diversification des financements
M. Habib a par ailleurs révélé que son institution, pour assurer de nouvelles sources de financement, est en discussion avec le Fonds de développement d’Abou Dhabi et celui du Koweit afin d’obtenir d’autres prêts qui permettront de faire passer le prêt individuel de 50.000$ à 100.000$. Il a aussi indiqué que, pour varier les sources de financements, il a dû ressortir une loi concernant les certificats de dépôt exigés par le ministère du Travail pour recruter des travailleurs étrangers. Il a augmenté le montant à 20 millions de livres par certificat, ce qui permettra de financer les crédits à la rénovation en livres libanaises.
M. Habib a également fait ressortir une loi datant du 4 mai 1968, amendée en 1999 par le Parlement, qui contraint les compagnies d’assurance à émettre des garanties par l’intermédiaire de la BDH en faveur du ministère de l’Économie. Le protocole d’accord a été signé avec le Syndicat des courtiers d’assurance et les pourparlers sont en cours avec le Syndicat des assurances pour un protocole similaire.
M. Habib a par ailleurs révélé qu’il travaille actuellement à créer un fonds financé par les compagnies d’assurance avec des dépôts rémunérés pour accorder des crédits logement aux personnes à faibles revenus. En pratique, les compagnies d’assurance déposent leurs fonds à la BDH avec une promesse de celle-ci de contracter auprès d’elles les assurances nécessaires aux crédits.
Ces fonds permettront aussi de mettre en œuvre le projet de traitement des eaux usées et l’installation d’une station d’épuration de l’eau avec l’assistance technique fournie par USAID.
Enfin, M. Habib, qui se projette toujours dans un avenir meilleur, assure que des pourparlers préliminaires ont été amorcés avec la BDH pour que, une fois la guerre en cours terminée, cette dernière accorde des prêts subventionnés à l’habitat à partir de prêts contractés par le Liban pour la reconstruction.
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