Les pays européens rejoints par les États-Unis ont décidé d'accentuer la pression sur l'Iran cette semaine au Conseil des gouverneurs de l'AIEA, déplorant son manque de coopération dans le dossier nucléaire.
Une résolution critique doit être déposée dans les prochaines heures pour un vote prévu jeudi, selon des sources diplomatiques interrogées par l'AFP.
Pourtant, en se rendant en Iran la semaine dernière, le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique, Rafael Grossi, espérait éviter un tel scénario.
Il y a rencontré le président iranien Massoud Pezeshkian - qui a dit vouloir lever "doutes et ambiguïtés" - avant de visiter deux importants sites nucléaires.
Ce déplacement de M. Grossi, quelques semaines avant l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, "marque une étape positive vers la mise en place de meilleures relations avec le nouveau gouvernement iranien", commente pour l'AFP Kelsey Davenport, experte de l'Arms Control Association.
"Mais c'était trop peu et trop tard pour éviter un blâme de la part du Conseil des gouverneurs", dit-elle, estimant que "l'Iran a manqué l'occasion de montrer qu'il était prêt à une désescalade".
"Rapport complet"
Washington, ouvertement sceptique, a réclamé "des actes" plutôt que des paroles et a donc décidé de s'unir à ses alliés européens, Londres, Paris et Berlin (E3), pour soumettre une résolution.
Depuis des mois, les pays occidentaux réclament en vain à Téhéran des signes concrets.
Le texte de la résolution, consulté par l'AFP, "réaffirme qu'il est essentiel et urgent" que l'Iran fournisse des "réponses techniques crédibles" concernant la présence de traces d'uranium inexpliquées sur deux sites non déclarés près de Téhéran, Turquzabad et Varamin.
D'une portée symbolique à ce stade, cette initiative vise selon les diplomates à envoyer un signal à l'Iran, qui a fortement restreint sa coopération avec l'instance onusienne. Il a notamment retiré l'accréditation de ses inspecteurs les plus expérimentés et débranché ses caméras de surveillance.
Cette initiative peut être le prélude à une transmission du litige au Conseil de sécurité de l'ONU, habilité à prendre des sanctions. En théorie seulement, car deux de ses membres, Moscou et Pékin, ont changé de camp sur ce dossier et soutiennent désormais Téhéran.
Toutefois, sans "stratégie" pour inciter l'Iran à revenir à ses engagements, "sans sortie de secours", l'attitude des Occidentaux risque de "rapprocher le pays de l'arme nucléaire", prévient Mme Davenport.
"Contre-mesures"
D'autant que le retour en janvier de Donald Trump à la Maison Blanche fait craindre une montée des tensions, dans un contexte très tendu au Moyen-Orient, en raison de la guerre menée par Israël à Gaza contre le Hamas palestinien et au Liban contre le Hezbollah, deux mouvements islamistes alliés de l'Iran.
L'Iran a d'ores et déjà averti que l'adoption d'une résolution ferait l'objet de "contre-mesures immédiates", mettant en garde contre les "pressions destructrices et malveillantes de certaines parties".
Par le passé, il a toujours réagi après de tels votes en faisant monter en puissance son programme nucléaire, même s'il nie vouloir se doter de l'arme atomique.
Téhéran s'est progressivement désengagé de ses obligations en représailles au retrait en 2018 des États-Unis du pacte international conclu trois ans plus tôt à Vienne.
Selon l'AIEA, l'Iran est le seul État non doté de l'arme atomique à enrichir l'uranium au niveau de 60%, proche des 90% nécessaires pour élaborer une bombe, tout en accumulant d'importants stocks.
Par Anne BEADE, AFP
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