Syrie: après la reprise d'Alep, les rebelles avancent vers Hama
Des combattants anti-gouvernementaux tiennent un drapeau de l'opposition alors qu'ils posent pour une photo à l'entrée de la citadelle historique d'Alep, le 30 novembre 2024. ©MUHAMMAD HAJ KADOUR / AFP

L’opposition et les factions rebelles alliées ont pris la majeure partie d'Alep, la deuxième ville de Syrie, lors d'une offensive éclair qui a fait plus de 320 morts, a indiqué une ONG samedi, un coup dur pour le pouvoir de Bachar al-Assad.

Parallèlement, les combattants rebelles ont lancé une autre offensive en direction du sud, avec pour objectif Hama. Ceux-ci affirmaient déjà contrôler au moins six localités sur cet axe, tandis que leur présence était attestée par des sources locales à 25 km de la ville, selon des sources locales. 

Les jihadistes affirment aussi avoir coupé la route internationale Alep-Raqqa à partir de l'aéroport de Kweiris, dans la campagne d'Alep, selon les mêmes sources. 

L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), qui dispose d'un vaste réseau de sources dans le pays en guerre, a aussi fait état de raids aériens russes avant l'aube sur Alep, les premiers depuis 2016, année durant laquelle le régime avait repris le contrôle de la ville septentrionale aux rebelles.

Samedi après-midi, une frappe aérienne a ciblé des "véhicules civils" dans un secteur d'Alep pris par les rebelles et leurs alliés jihadistes, tuant 16 civils, a indiqué l'OSDH, en précisant que le raid avait été "probablement" mené par des avions russes.

Ces violences sont les premières de cette ampleur depuis plusieurs années en Syrie, où les hostilités avaient globalement cessé entre les belligérants soutenus par différentes puissances régionales et internationales aux intérêts divergents dans cette guerre dévastatrice déclenchée en 2011.

Avec l'appui militaire crucial de la Russie, de l'Iran et du Hezbollah libanais, le régime Assad a reconquis en 2015 le contrôle d'une grande partie du pays et en 2016 la totalité de la cité d'Alep. Mais de vastes régions échappent encore à son contrôle.

Les jihadistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), dominé par l'ex-branche syrienne d'Al-Qaïda, et des factions rebelles syriennes ont lancé mercredi une offensive contre les forces du régime dans les provinces voisines d'Idleb et d'Alep prenant des dizaines de localités avant d'entrer vendredi dans la ville d'Alep, a indiqué l'OSDH.

"Le HTS et les factions alliées ont pris la majeure partie de la ville d'Alep, des bâtiments gouvernementaux et des prisons", a ensuite précisé l'Observatoire.

Célébrant leur entrée dans Alep, jihadistes et rebelles ont défilé dans les rues, posé devant la citadelle historique, installé leur drapeau devant un poste de police et déchiré un portrait de M. Assad, selon des images de l'AFP.

"Pas de résistance significative"

L'armée syrienne a confirmé la présence de combattants antirégime dans de "larges parties" d'Alep et déploré des "dizaines" de morts et de blessés dans l'offensive.

Selon un dernier bilan de l'OSDH, 327 personnes ont été tuées depuis mercredi: 183 combattants du HTS et factions rebelles, 100 soldats syriens et membres des forces progouvernementales ainsi que 44 civils.

"La plupart des civils restent chez eux et les institutions publiques et privées sont quasiment toutes fermées" à Alep, ville de quelque deux millions d'habitants et poumon historique du pays d'avant-guerre, a dit la radio progouvernementale Sham FM.

Le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane, a déclaré à l'AFP que jihadistes et rebelles, dont certains soutenus par la Turquie, avaient rapidement pris de vastes secteurs d'Alep "sans rencontrer de résistance significative".

"Il n'y a pas eu de combats" et les forces du régime, ainsi que "le gouverneur d'Alep et les commandants de la police et de la sécurité se sont retirés du centre-ville", a-t-il ajouté.

"Les lignes du régime se sont effondrées à un rythme incroyable qui a pris tout le monde par surprise", estime Dareen Khalifa, experte de l'International Crisis Group.

Entrée en scène des FDS

En parallèle, plusieurs unités des Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition de groupes armés dirigée par les Kurdes et soutenue par les Etats-Unis, ont commencé à se déployer dans les environs de la ville.

L’OSDH a affirmé que celle-ci s’était déployé dans deux localités auparavant sous le contrôle de « groupes armés soutenus par l’Iran ». Ces dernières s’étaient retiré face à l’avancée des rebelles et de leurs alliés jihadistes.

Plusieurs vidéos postées sur les réseaux sociaux semblaient attester que les FDS contrôlaient aussi l’aéroport de la ville à la mi-journée.

Néanmoins, les combattants rebelles ont annoncé en avoir pris le contrôle en fin de journée.

La veille, le porte-parole de l’organisation avait déclaré que les FDS défendraient la population contre HTS.

Turquie, Russie, Iran

L'armée turque, qui contrôle plusieurs zones du nord syrien, a appelé vendredi à mettre "fin" aux "attaques" sur Idleb et sa région après une série de raids des aviations russe et syrienne.

L'armée russe a annoncé que son aviation avait bombardé des groupes "extrémistes".

Le nord-ouest de la Syrie bénéficiait ces dernières années d'un calme précaire rendu possible par un cessez-le-feu instauré après une offensive du régime en mars 2020, et parrainé par Moscou et Ankara.

L'offensive jihadiste a été déclenchée le jour où un accord de cessez-le-feu a été annoncé entre le Hezbollah et Israël, en guerre ouverte pendant plus de deux mois. Israël a bombardé également des sites du Hezbollah en Syrie.

L'Iran, également un allié du Hezbollah, et la Russie, qui ont réitéré leur soutien au pouvoir syrien, ont aidé militairement le régime Assad pendant la guerre civile, déclenchée en 2011 après la répression brutale par le pouvoir des manifestations prodémocratie.

La guerre complexe en Syrie a fait un demi-million de morts et déplacé des millions de personnes.

Lisa Golden, avec AFP

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