Les dynamiques régionales évoluent à un rythme sans précédent. Du Liban à la Syrie, l’effet boule de neige touche les différents leviers d’influence de l'Iran dans les capitales où il revendique son contrôle. L'Irak n'est pas en reste, à moins qu'il ne parvienne à se distancier de cette emprise et à se conformer à la volonté internationale qui semble déterminée à contenir cette influence et à remettre la République islamique dans un cadre de discipline globale.
Au Liban, l’administration de Joe Biden, à la veille de son départ de la Maison-Blanche, en collaboration avec le président français Emmanuel Macron et avec le soutien du président élu, Donald Trump, a réussi à obtenir un accord iranien sur une proposition de cessez-le-feu.
De son côté, le Premier ministre sortant, Najib Mikati, a confirmé l'engagement du Liban à appliquer la résolution 1701 et à renforcer la présence de l'armée libanaise au Liban-Sud. Le président du Parlement, Nabih Berry a, quant à lui, salué cet accord, estimant que c’est l’occasion de tourner la page d’une étape historique considérée comme la plus dangereuse pour le Liban, un véritable test pour chaque Libanais et en particulier pour la communauté chiite.
Dans la même lignée, l'administration Biden est également résolue à conclure un accord de cessez-le-feu à Gaza, après avoir séparé les fronts, espérant ainsi clôturer son mandat par une tentative d’assurer la stabilité en poussant la région vers la paix dans le cadre d’un nouveau Moyen-Orient. Donald Trump, quant à lui, capitalisera sur ces avancées pour tenir ses engagements: mettre fin à la guerre, restaurer une stabilité durable au Liban et conclure un nouvel accord avec l’Iran en relançant les négociations nucléaires.
Ces bouleversements surviennent alors que le Hezbollah amorce un repli stratégique à la suite des répercussions de sa guerre de soutien au Hamas. Ce mouvement marque une transition progressive vers un retour à la politique, accompagné d’un début de désarmement. Dans ce contexte, l’émissaire français, Jean-Yves Le Drian, a visité Beyrouth dans le but de compléter l'accord sécuritaire par un volet politique, avec pour objectif central de faciliter l’élection présidentielle. Ce dossier est pris en charge par la France en étroite coordination avec Washington. Le président Macron a informé MM. Mikati et Berry, après que ce dernier a fixé une session pour élire un président le 9 janvier prochain, que “le cessez-le-feu représente une opportunité historique pour sauver le Liban, une responsabilité qui incombe aux Libanais et qui doit s'accompagner de l'élection d'un président et de la formation d'un gouvernement dans le cadre d'une solution globale”.
Un ancien responsable a souligné l’importance du timing de la visite de Le Drian. Selon lui, la France souhaite, en effet, exercer une pression maximale pour accélérer l'élection présidentielle. De son côté, Nabih Berry, en amont de sa rencontre avec Le Drian, a fixé une session parlementaire pour le 9 janvier, faisant ainsi montre de son engagement à saisir cette opportunité. Et le président de la Chambre de déclarer: “Cette session sera décisive. J'inviterai le corps diplomatique à y assister et j'appelle à un consensus pendant les 45 jours restants”.
Un diplomate du groupe des Cinq (France, États-Unis, Arabie saoudite, Qatar, Égypte) a confirmé que la visite de Le Drian témoigne du soutien international fort au Liban et de l'approbation de l'accord de cessez-le-feu qui procure une fenêtre cruciale pour élire un président. Des députés ayant rencontré Le Drian ont révélé qu'il n'a pas apporté d’initiatives nouvelles ni proposé de noms pour la présidence. Il s’est limité à exhorter les Libanais à s’entendre sur un candidat ou, à défaut, à choisir parmi une liste restreinte de candidats. Le Drian s’est également intéressé à des questions plus larges concernant l’avenir du Hezbollah, son rôle politique, son désarmement conformément à la proposition américaine et le renforcement des institutions étatiques pour assurer la sécurité nationale. Lors de ses échanges avec les responsables libanais, il a martelé: “Vous avez une opportunité historique. Ne la gaspillez pas. Saisissez-la pour sauver le Liban, en commençant par l’élection d’un président. Sinon, vous risquez de perdre votre pays.”
Le succès d'Amos Hochstein dans l'obtention du soutien israélien à la proposition de cessez-le-feu s’est accompagné de l'intervention de Le Drian. Les Libanais disposent de 60 jours pour poser les bases de la reconstruction de leur État. La décision de mettre fin à la crise après l’affaiblissement de l'hégémonie iranienne est jugée cruciale et pourrait ouvrir la voie à la création d’un nouveau Liban. Désormais, la responsabilité incombe aux Libanais.
Ces développements coïncident avec une remontada inattendue de l'opposition syrienne qui a repris plusieurs zones dans le nord de la Syrie, contraignant l’armée du régime à un retrait stratégique. Ce regain d’activité est perçu comme un défi direct au régime syrien et une menace sérieuse de renversement. Cela, d’autant plus que Damas s’est montré peu réceptif au projet de paix régional visant à couper ses liens avec l’Iran et à empêcher le transfert d’armes iraniennes au Hezbollah. La Syrie se trouve ainsi à un tournant aux résultats encore incertains. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, a, dans ce contexte, déjà mis en garde Bachar el-Assad contre toute provocation, accompagnant ses menaces de frappes aériennes ciblées sur les passages stratégiques entre le Liban et la Syrie.
Par ailleurs, il est difficile de dissocier les événements en Syrie des évolutions au Liban. Le dossier libanais, tout comme les dynamiques régionales, fait partie des discussions en cours entre le prince héritier saoudien, Mohammad ben Salmane, et le président français, Emmanuel Macron, actuellement en visite officielle en Arabie saoudite. Un ancien responsable estime que le Liban est à l’aube d’une nouvelle ère qui nécessite l'application intégrale de la résolution 1701, le règlement des différends internes et l’arrêt des violations. L’ère des armes en dehors de la légalité est désormais révolue. Il ajoute également que le Liban devrait voir l’élection d’un président avant le 20 janvier, une échéance qualifiée de “cadeau de Noël” pour les Libanais, marquant le début du changement tant attendu.
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