Le souvenir de Gebran Tuéni: dix-neuf ans plus tard, la justice est presque rendue
©Ici Beyrouth

12 décembre 2005 – 8 décembre 2024. Cette année, la dix-neuvième commémoration de l’assassinat de Gebran Tuéni a un goût très particulier, celui d’une justice presque accomplie.

Demain, jeudi 12 décembre, la mémoire du journaliste et député de l’opposition sera célébrée alors que le régime syrien, dirigé par Bachar el-Assad, vient de s’effondrer et, avec lui, toute la classe de collaborateurs qui exécutaient ses ordres, tuant ceux qui dénonçaient sa tyrannie et ses crimes.

La liste des victimes est longue, interminable. Des dizaines de figures politiques libanaises, militantes et farouchement opposées à la domination syrienne, ont payé de leur vie la lutte pour la liberté et la souveraineté de leur pays.

Des milliers d’autres Libanais, toutes confessions et affiliations politiques confondues, ont croupi dans les geôles du régime terroriste, tortionnaire et meurtrier des Assad.

La même terreur a été infligée aux opposants syriens, confrontés à des actes de barbarie inimaginables, par un régime qui revendiquait des victoires imaginaires contre son propre peuple, et qui n’a jamais bougé le petit droit pour récupérer son Golan occupé.

Le 8 décembre 2024, les âmes de toutes ses victimes ont trouvé la paix. Du leader druze Kamal Joumblatt au président Bachir Gemayel, en passant par le mufti Hassan Khaled, le président René Moawad, l’ancien Premier ministre Rafic Hariri et tous les martyrs de la révolution du Cèdre.

Aujourd’hui, Gebran Tuéni, celui qui, grâce à sa plume, est devenu un symbole immortel de la lutte pour la liberté, la souveraineté et l’indépendance, repose lui aussi en paix. La commémoration de son assassinat demeure une occasion pour rappeler que la mémoire des héros reste intacte. Pas celle des tyrans.

Mais c’est quand même avec une profonde tristesse que nous nous souvenons d’un des artisans de la révolution du Cèdre, celui qui était farouchement hostile à tout compromis au détriment du Liban dont il rêvait.

C’est avec beaucoup de nostalgie que nous reprenons son célèbre serment, le socle d’un rêve, celui d’un État fort et juste: “Nous jurons par Dieu tout-puissant, musulmans et chrétiens, de rester unis pour l’éternité pour défendre le Grand Liban.” Ses articles sont autant d’hymnes à la liberté et ses positions autant de boucliers face à ceux qui cherchaient à assujettir le Liban.

Gebran rêvait d’un État où chaque citoyen vivrait dans la dignité et l’égalité. Pour ce rêve, il a suivi un chemin semé d’épreuves. Là où d’autres choisissaient le compromis, il optait pour le courage. Un courage qui a tellement dérangé qu’on a voulu le supprimer. Parce qu’à l’ère des alignements et de l’opportunisme politique, Gebran Tuéni était le porte-voix de la vérité.

En ce 19ᵉ anniversaire de son assassinat, nous avons envie de lui poser la question de savoir comment il aurait célébré la chute du régime criminel s’il était encore vivant. La joie d’une victoire n’est jamais complète en l’absence des héros, des vrais.

À défaut, nous disons à Gebran qu’il est, grâce à son legs politique, plus vivant que certains vivants immondes. Il a laissé une flamme allumée et il est de notre devoir de la préserver, afin que le Liban triomphe et se relève de ses ruines. Il ne fait pas de doute que le nouveau Liban renaîtra.

Aujourd’hui, plus que jamais, nous nous inspirons de tes paroles: “Lève-toi, majorité silencieuse, pour qu’on n’écrive pas sur nos tombes et celle de notre patrie, sur une plaque de marbre: Ici a triomphé la République du meurtre sur celle de la pensée et de la liberté… Ici reposait le Liban.”

 

 

 

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