Crise au Moyen-Orient: une difficile métamorphose
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Il fallait bien s’y attendre. Dans cette partie du monde qui n’en finit pas de se débattre, depuis des décennies, dans des troubles chroniques, fréquemment entrecoupés de situations de type entropique – au gré des luttes pour le pouvoir –, le potentiel de nuisance n’a pas encore été totalement neutralisé.

Certes, un nouveau paysage politique semble poindre, effectivement, à l’horizon dans plusieurs zones du Moyen-Orient, comme l’a annoncé avec fracas le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou… Un Moyen-Orient appelé à bénéficier, enfin, d’une ère de paix, véritable et durable, comme s’y est engagé le président Donald Trump. Mais c’est sans compter les factions (islamistes) obscurantistes et rétrogrades qui refusent de s’avouer vaincues, malgré les développements majeurs à portée hautement stratégique survenus ces derniers mois. C’est dans un tel contexte que de graves capacités de nuisance se manifestent présentement au Moyen-Orient à deux niveaux, l’un macro-politique transnational et le second plus “local”.  

À l’échelle géostratégique, d’abord, les Gardiens de la révolution islamique iranienne (les Pasdaran) ont annoncé sans tarder la couleur. Leur commandant, le général Hossein Salami, a ainsi affirmé sans ambages à la fin de la semaine écoulée que “la résistance n’a pas été affaiblie”, précisant, à l’appui de sa thèse, que “tout le monde est témoin de la manière avec laquelle les Yéménites défendent la Palestine et Gaza”. En clair, s’obstinant à se cantonner dans une attitude de déni – à la limite du risible – face à la débâcle spectaculaire de l’axe iranien et se refusant à tenir compte des retombées inhumaines de ce dernier épisode de la longue série de guerres stériles proche-orientales, les Pasdaran réaffirment leur détermination à ne pas changer de cap dans leur approche de la situation régionale.

Comme pour bien confirmer ce positionnement obstructionniste, l’un des pôles du courant radical en Iran, le général Mohsen Ridaï, a déclaré, cartes sur table, que “les jeunes et le peuple résistant en Syrie ne se tairont pas face à l’occupation et l’oppression interne, et, en moins d’un an, ils relanceront la résistance en Syrie sur de nouvelles bases et ils mettront en échec les plans des États-Unis et de l’entité sioniste”… Signe des temps, depuis la chute de Bachar el-Assad: cette position iranienne a été publiquement stigmatisée et perçue par la Ligue arabe comme une incitation à la subversion en Syrie.

Ce genre de propos tenus par le général Ridaï serait destiné sans doute, en priorité, à la consommation interne et refléterait en quelque sorte les ultimes soubresauts d’une personne (politiquement) agonisante. Mais, compte tenu de la pensée théocratique qui reste ancrée en Iran, le courant radical représenté par les Pasdaran pourrait recourir tous azimuts à la subversion, à la déstabilisation et à ce qui constitue son point fort – les assassinats et les actions terroristes – pour torpiller le remodelage du Moyen-Orient sur des bases pluralistes, libérales et respectueuses du droit à la différence.

Il n’est pas exclu, comme l’insinue la déclaration du général Ridaï, que les tenants de la ligne dure et jusqu’au-boutiste en Iran s’appuient dans leur opération de sape du nouvel ordre régional sur les djihadistes syriens extrémistes (et peut-être aussi les derniers suppôts de l’ancien régime), lesquels sévissent déjà de manière intempestive dans certaines régions de la Syrie. C’est à ce niveau précis qu’apparaît l’autre capacité de nuisance, à dimension “locale”.  

Le plus grand défi auquel sont confrontés aujourd’hui les actuels maitres de Damas – avec à leur tête le mystérieux nouveau venu sur la scène politique Ahmed Chareh – est, d’entrée de jeu, de couper l’herbe sous les pieds des Don Quichotte du Moyen-Orient contemporain qui, aveuglés par une idéologie rétrograde déconnectée de toute réalité, se lancent dans des aventures guerrières stériles, perdues d’avance. L’Orient se trouve ainsi réellement, au stade actuel, à un point d’inflexion historique.

L’opportunité d’une salutaire métamorphose de la région, dans le bon sens de l’Histoire, nécessite de se doter des moyens adéquats et d’un soutien international continu permettant de trancher en faveur du pluralisme et du libéralisme politique la partie de bras de fer qui risque d’être engagée à plus ou moins brève échéance, à l’instigation probable des Pasdaran, entre l’extrémisme islamiste et le courant pragmatique prônant une ouverture sur le monde. Il y va du sort non seulement de la Syrie, mais aussi de l’ensemble de la région.

L’un des principaux pays concernés dans ce cadre est sans conteste le Liban où le Hezbollah se refuse toujours à admettre que l’accord de cessez-le-feu du 27 novembre implique son désarmement sur tout le territoire libanais et non pas uniquement au sud du Litani, comme l’a prétendu son secrétaire général, Naïm Kassem, dans son dernier discours… La position en flèche du nouveau chef du Hezbollah reflétait clairement l’attitude iranienne de déni et une volonté manifeste de blocage qui illustrent largement les intentions véritables des maitres à penser du parti chiite à Téhéran.

 

                

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