Un lieu inclassable comme son cinéma: au début des années 2010, David Lynch a conçu le night-club parisien Silencio qui ambitionne aujourd'hui encore d'accueillir l'avant-garde et de perpétuer "l'ADN" du cinéaste multicartes disparu jeudi.
C'est dans ce club ultra-select, installé en sous-sol de l'immeuble où fut imprimé J'accuse de Zola, que Lana Del Rey fit son premier concert français en 2011 et que clubbers, VIP et artistes se croisent encore, entourés d'un mobilier entièrement pensé par David Lynch.
"L'idée, c'était qu'un de ses décors de film prenne vie dans le monde réel et qu'il n'ait pas de limites à sa création", rembobine pour l'AFP le fondateur du Silencio, Arnaud Frisch.
C'est en 2010 que cet entrepreneur artistique parvient à entrer en contact avec le cinéaste de l'étrange, du rêve et de l'inconscient et réussit à le convaincre de poser sa patte sur ce nouveau lieu de nuit, installé au cœur de la capitale.
"On cherchait à faire un projet qui réunissait des gens qui baignaient à la fois dans la musique, l'art contemporain, le cinéma. Et pour moi, dès le départ, la personne qui incarnait ça le mieux, c'était David Lynch", se souvient M. Frisch.
Alors, entre deux projets, le réalisateur américain va travailler plusieurs mois sur le concept, séduit notamment par l'idée d'imprimer sa marque dans une ville où la Fondation Cartier avait exposé ses œuvres de plasticien en 2007.
"Il y avait un lien particulier avec Paris qui défend comme lui une approche transversale de la culture", analyse M. Frisch.
David Lynch s'implique dans le Silencio au point de participer à sa programmation dans les premières années d'existence du lieu, où l'entrée est réservée jusqu'à minuit aux adhérents (1.200 euros par an) et gratuite ensuite, à condition de convaincre le physio. "Il a fait tout le design du Silencio, le mobilier, les murs, le décor et on a même travaillé ensemble sur le concept", se souvient M. Frisch.
Postée jeudi sur le compte Instagram du Silencio, une photo montre David Lynch devant une scène encadrée de larges tentures rouges qui rappellent l'étrange cabaret de Twin Peaks où l'agent Dale Cooper (Kyle MacLachlan) dialogue avec le fantôme de Laura Palmer (Sheryl Lee).
Le nom du club lui-même renvoie à l'endroit où les deux héroïnes de Mulholland Drive, le chef d'œuvre de Lynch sorti en 2001, assistent à une très étrange performance.
Le club abrite par ailleurs une salle de cinéma de 24 places et peut accueillir aussi bien un set de DJ que des expositions ou une rencontre avec des écrivains plus ou moins connus. S'y niche également une sculpture réalisée par Lynch lui-même.
"On essaie de présenter aussi les artistes au début de leur carrière et de perpétuer l'esprit d'avant-garde, l'ADN de David Lynch", souligne M. Frisch.
Le club a depuis essaimé à Ibiza et tout récemment à New York. Il se déploie également de manière éphémère à chaque festival de Cannes.
Avec AFP
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