L'accord de Taëf ne prévoit pas de monopole sur les portefeuilles ministériels

Au Liban, certains placent diverses considérations au-dessus de la loi et de la Constitution. Ainsi, des notions telles que le Pacte national, le consensus, la coutume ou encore le “procès-verbal de Taëf” sont invoquées à tort pour légitimer l’attribution du ministère des Finances au duo Amal-Hezbollah.

Ce n'est pas la première fois que l'on évoque le procès-verbal de Taëf. En effet, le débat sur son contenu a été relancé à maintes reprises, notamment en ce qui concerne le rôle du Président de la République dans la formation du gouvernement, la désignation du Premier ministre chargé de le former et le rôle assigné au président de la République dans les consultations parlementaires obligatoires. Cependant, ces discussions n'ont jamais abouti, car le dossier se trouvait entre les mains de feu le président du Parlement Hussein el-Husseini, qui ne l'a jamais divulgué.

L'accord de Taëf a été transformé en constitution, et aucun passage ne fait référence à une répartition des ministères entre les différentes communautés. Aucun des députés présents à Taëf n'a mentionné un accord implicite stipulant que le ministère des Finances serait exclusivement réservé à la communauté chiite. Preuve en est, depuis Taëf, le ministère des Finances a été confié huit fois à des ministres chiites et douze fois à des non-chiites, parmi lesquels feu le Premier ministre Rafic Hariri, qui était au centre des négociations de l'accord de Taëf.

Partant, la question se pose de savoir pourquoi le ministère des Finances a été attribué aux chiites. Et pourquoi les députés des autres communautés ne se sont pas opposés à cela, ni exigé que le ministère des Affaires étrangères soit attribué aux maronites et l’Intérieur aux sunnites.

Les députés chrétiens ont-ils été si indulgents au point de renoncer à tout, malgré le transfert des prérogatives du président de la République? Pourquoi le tandem Hezbollah-Amal a-t-il accepté de ne pas attribuer le ministère des Finances aux chiites? Est-ce une concession ou un simple échange d’intérêts? Et pourquoi les chiites semblent-ils jouir d’un statut supérieur au point qu’eux seuls puissent prétendre diriger le ministère des Finances? Sont-ils réellement les seuls à posséder les compétences nécessaires à sa gestion, alors que les autres en seraient dépourvus?

Parmi les députés ayant participé à l’accord de Taëf, seuls quelques-uns sont toujours en vie et certains d’entre eux ne se souviennent pas qu’un accord a été conclu pour réserver le ministère des Finances à la communauté chiite. Si cela avait été décidé, cela aurait figuré dans le texte de l’Accord de réconciliation nationale ou dans la Constitution amendée. Certains rappellent que ce sujet avait peut-être été évoqué à l’époque, mais qu’il n’a pas été approuvé, tout comme la demande des druzes de réserver la présidence du Conseil d’État, ce qui avait également été rejeté.

Partant, demander à rendre publics les procès-verbaux de l’accord de Taëf pourrait s’avérer essentiel pour confirmer que ces propositions avaient bel et bien été rejetées et qu’elles n’ont jamais vu le jour.

 

 

 

 

 

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