Le Liban entre les feux d’Israël et la pression du Hezbollah
©Ici Beyrouth

Morgan Ortagus envisage une visite au Liban, probablement après la fête du Fitr. Elle a préparé le terrain à cette nouvelle mission par des interviews avec des médias arabes et libanais, au cours desquelles elle a mis en avant l’exigence d’un désarmement du Hezbollah.

Ce sujet sera au cœur de ses discussions avec les responsables libanais, principalement avec le président Joseph Aoun, dont les récents propos en France, concernant les armes du Hezb, ont capté l’attention. Le chef de l’État a notamment réaffirmé son engagement en faveur d’une stratégie de sécurité nationale incluant une stratégie de défense, et insisté sur la nécessité d’un consensus interne à ce sujet.

De sources officielles libanaises, on a relevé que Morgan Ortagus a placé haut la barre en insistant, au cours de ses interviews, sur le désarmement du Hezbollah et les négociations avec Israël.

Après les frappes israéliennes de vendredi au Liban-Sud et dans la banlieue sud de Beyrouth, elle aurait fait savoir aux responsables libanais qui ont pris contact avec elle, que la riposte d’Israël aux tirs visant son territoire, à partir du sud du pays, était justifiée. Elle aurait aussi fait assumer au Hezbollah l’entière responsabilité de ces tirs. Ses propos ont inquiété les autorités libanaises, qui estiment qu’Israël n’a pas réagi aux efforts déployés par le Liban pour rétablir le calme, par des mesures similaires. Finalement, ce n’est pas le Liban qui maintient une présence en territoire israélien ou qui détient des prisonniers. Pourtant, c’est à lui qu’on essaie d’imposer des conditions, en rapport avec les négociations sur les points conflictuels avec Israël. Parmi ces conditions, l’adoption d’une voie diplomatique pour les pourparlers envisagés, ce qui implique un processus politique qui paverait la voie à une normalisation.

​L'État libanais, qui s'efforce d'appliquer le cessez-le-feu et la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU, se trouve pris entre deux maux: Israël qui l'accuse d'inaction face au Hezbollah, lequel lui reproche, à son tour, de ne pas adopter une position plus ferme contre Tel Aviv.

De sources diplomatiques occidentales, on suggère que le Hezbollah devrait adopter une position neutre, remettre ses armes à l'État libanais, dissoudre son organisation militaire et sortir du giron iranien.

De mêmes sources, on relève à juste titre, que l’État libanais, aujourd’hui critiqué par le Hezbollah et ses partisans, n’avait rien à voir dans la décision de guerre, prise par le Hezb, contre Israël, ni dans les clauses de l’accord de cessez-le-feu ou du mécanisme d’application de la résolution 1701.

Au final, c’est le président du Parlement, Nabih Berry, qui a négocié l'accord en tant que chef du mouvement Amal et représentant du Hezbollah. Le Hezb en a accepté toutes les dispositions, y compris l’interdiction de porter des armes au Liban. Ainsi, toute déclaration contraire du Hezbollah constituerait une violation de l’engagement pris.

De mêmes sources, on rappelle que c’est le Hezbollah qui, face aux conséquences désastreuses de la guerre qu’il a lui-même déclenchée, aux lourdes pertes humaines et aux destructions, s’est dépêché de réclamer un cessez-le-feu, pour arrêter l’hémorragie. Mais il est vite apparu qu’il n’a voulu que manœuvrer et qu’il misait sur sa capacité à contourner cet accord. Ce qu’il n’a pas réussi à faire jusque-là et ce qui explique le fait qu’Israël continue à cibler ses cadres et ses infrastructures. Israël justifie ces attaques en accusant le Hezbollah d’enfreindre l’accord de cessez-le-feu.

Mis au pied du mur, le Hezbollah n’a eu d’autre choix que de s’en prendre à l’État libanais, l’accusant d’être responsable des frappes israéliennes. De sources diplomatiques occidentales, on n’écarte pas la possibilité que des membres du Hezbollah aient été impliqués dans le lancement des roquettes. On attende les résultats des enquêtes pour confirmer ces soupçons.

De mêmes sources, on se demande ce que l'État libanais peut d’ailleurs faire au-delà de ses démarches politiques et diplomatiques. Peut-il, par exemple, riposter militairement à Israël?

La question centrale, selon ces sources, est de savoir ce que le Hezbollah attend du gouvernement libanais face à Israël, et s'il est prêt à reprendre les hostilités si l'État est perçu comme incapable de dissuader Israël. Est-il prêt à rouvrir un front militaire alors que ses voies d’approvisionnement terrestre via la Syrie et aérienne via l’aéroport de Beyrouth sont coupées?

Dans le même ordre d’idées, les diplomates occidentaux mettent en garde contre un recours du Hezbollah à rue, pour faire pression sur le gouvernement. Ils se demandent si de telles manœuvres empêcheraient Israël de poursuivre ses actions militaires et si elles faciliteraient l'afflux de fonds pour la reconstruction du Liban.

Selon ces sources, une mobilisation contre le gouvernement aggraverait davantage la crise libanaise, risquant de provoquer des affrontements internes et entraîner un désintérêt de la communauté arabe et internationale pour le Liban.

 

 

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