Le pape François: La Providence n’abandonnera jamais le Liban
Le pape François embrassant le drapeau du Liban ©ici Beyrouth

La présence du Liban dans l’esprit du pape François a toujours été vivante. Le Saint-Père, au témoignage de ses proches et de ses visiteurs, se tenait toujours bien informé de la situation dans le pays. S’il n’a pas visité le Liban, comme promis, en 2022, pour des raisons à la fois de santé et d’opportunité politique (la crise politique qui a secoué le pays puis l’absence d’un président et d’un gouvernement de plein exercice), il n’a pas manqué d’exprimer sa sollicitude pour notre pays de diverses manières (messages, appels, visites de cardinaux qui lui sont proches, etc), et à chaque occasion possible. Devant ses proches, il avait exprimé son désir de «se rendre au Liban dès que possible».

Cette proximité pastorale du pape François, conjuguée à l’action diplomatique du Vatican, l’avait poussé à affirmer, dans une lettre aux Libanais remontant à Noël 2020, que «la Providence n’abandonnera jamais le Liban». Il s’était dernièrement réjoui de voir sa certitude confirmée à travers l’élection d’un nouveau président, en janvier 2025.

Sur le plan pastoral, la proximité habituelle du pape s’était manifestée avec un éclat particulier après la crise économique de 2019, puis l’explosion au port en août 2020. Moins de 36 heures après cette dernière tragédie, le cardinal secrétaire d’État, Pietro Parolin, numéro deux du Vatican, débarquait à Beyrouth.

À Noël 2020, François avait adressé, à travers le patriarche Béchara Raï, une émouvante lettre «à tous les Libanais sans distinction de communauté ni d’appartenance religieuse», dont il n’est pas inutile de reproduire de larges extraits, dans la mesure où elle reflète fidèlement l’étroite continuité de l’action du Saint-Siège au Liban, depuis le Pape Jean-Paul II.

«Ma douleur est grande de voir la souffrance et l’angoisse étouffer l’esprit d’entreprise et le dynamisme du pays des cèdres, avait écrit le pape François. Plus encore, il est douloureux de se voir voler toutes les plus chères espérances de vivre en paix et de continuer à être, pour l’histoire et pour le monde, un message de liberté et un témoignage de bien vivre ensemble; et moi qui, de tout cœur, prends part tant à vos joies qu’à vos peines, je sens au fond de l’âme la gravité de ce que vous êtes en train de perdre, surtout quand je pense aux nombreux jeunes à qui toute espérance d’un avenir meilleur est enlevée».

«Mais en ce jour de Noël “le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière” (Is 9, 1), la lumière qui atténue les craintes et qui suscite en chacun l’espérance en la certitude que la Providence n’abandonnera jamais le Liban et saura transformer en bien même ce chagrin».

«Le Liban est nommé très souvent dans les saintes Écritures, mais brille par-dessus tout l’image que nous offre le psalmiste: «Le juste grandira comme un palmier, il poussera comme un cèdre du Liban» (Ps 91, 13), avait poursuivi le Saint-Père. (...)  Comme le cèdre, puisez aux profondeurs de vos racines du vivre-ensemble pour redevenir un peuple solidaire; comme le cèdre qui résiste dans la tempête, puissiez-vous tirer profit des contingences du moment présent pour redécouvrir votre identité, celle qui consiste à porter au monde entier le parfum du respect, de la cohabitation et du pluralisme, celle d’un peuple qui n’abandonne pas ses maisons ni son héritage; l’identité d’un peuple qui n’abandonne pas le rêve de ceux qui ont cru en l’avenir d’un pays beau et prospère».

Visiter le Liban «dès que possible»

«Dans cette perspective, avait ajouté le Saint-Père, j’en appelle aux responsables politiques et aux guides religieux en empruntant un passage de la lettre pastorale du patriarche Elias Hoayek:  Vous, les monarques, vous les responsables, vous les juges de la terre, vous les députés qui vivez aux dépens du peuple […] vous êtes tous obligés, à titre officiel, de poursuivre vos efforts avec ardeur au service de l’intérêt public. Votre temps n’est pas pour vous, votre travail n’est pas pour vous, mais pour l’État et pour la patrie que vous représentez».

«Enfin, l’affection envers le cher peuple libanais que je compte visiter dès que possible, unie à la sollicitude constante qui a animé l’action de mes prédécesseurs et du siège apostolique, me pousse à m’adresser une fois encore à la communauté internationale. Aidons le Liban à rester en dehors des conflits et des tensions régionales. Aidons-le à sortir de la grave crise et à se reprendre».

Journée de prière et de jeûne

Le 1er juillet 2021, voyant l’impasse persister, le pape avait appelé à une journée de prière pour le Liban. Il avait dépêché auprès des autorités locales le cardinal secrétaire d’État, Pietro Parolin, qui était arrivé à Beyrouth à la date marquée par la journée en question. Au cours de sa visite éclair, le cardinal Parolin avait exhorté les Libanais à surmonter leurs divisions. 

En juin dernier (2024), le secrétaire d'État du Saint-Siège avait de nouveau effectué une visite à Beyrouth. Au programme, des rencontres avec les autorités du pays et de l'Église locale, mais aussi une visite des structures humanitaires de l'Ordre de Malte.

Du 19 au 23 février, 2025, c’était au tour du cardinal Czerny, le préfet du dicastère pour le Service du développement humain intégral, d’être présent à Beyrouth pour visiter et encourager les projets de l'Église locale et des organisations humanitaires.

Le Liban, «une utopie blessée»

Auparavant, le 24 janvier dernier, le nouveau préfet du dicastère pour les Églises orientales, le cardinal Gugerotti, s’était rendu en Syrie, dépêché par le pape.

Le cardinal Gugerotti avait montré sa parfaite connaissance des tenants et des aboutissants du Liban au cours d’une intervention à l'Université grégorienne de Rome où, parlant du livre Échos de la crise au Liban. Conflit ou coexistence?, il avait évoqué l'expérience libanaise de convivialité entre les différents peuples comme une «utopie blessée précaire mais fascinante» qu’il était indispensable de «maintenir vivante pour ne pas tomber dans la fragmentation violente qui affecte le monde entier». Il avait souligné la richesse de cette publication, qui «enseigne aux étudiants que le monde est complexe et que la coexistence est faite de nuances qui ne peuvent être négligées, car la survie d'une réalité comme le Liban moderne en dépend».

À la session régionale du synode des évêques (février 2023), les représentants des sept Églises catholiques d'Orient s’étaient retrouvés au Liban, pour la phase continentale sur la synodalité.

Du point de vue diplomatique, le pape François avait cité le Liban dans son discours de janvier 2024, où il avait exprimé sa «tristesse» pour les millions de réfugiés syriens qui se trouvent dans la région, notamment dans le pays.

Le Liban a par ailleurs toujours été présent dans beaucoup de ses messages urbi et orbi pour demander la stabilité politique, l’unité pour surmonter la crise économique.

Dernièrement, il avait beaucoup parlé de la guerre. Durant le conflit militaire d’octobre-novembre 2024 entre Israël et le Hezbollah, il n’avait cessé de mentionner le Liban à l’occasion de tous les angélus, dont celui de la fête de Pâques (20 avril), marquant la continuité de la présence du Saint-Siège et du Saint-Père au niveau diplomatique.  Il s’était particulièrement félicité du cessez-le-feu intervenu le 26 novembre.

 

Commentaires
  • Aucun commentaire