
Le 78e Festival de Cannes s’ouvre le 13 mai avec 21 films en compétition pour la Palme d’or, un jury présidé par Juliette Binoche, et une édition marquée par l’essor des œuvres immersives. Jusqu’au 24 mai, la Croisette vivra au rythme du cinéma mondial.
Il fut un temps où la ville de Cannes vibrait d’un parfum d’insouciance, où les passants se figeaient au détour d’un trottoir pour croiser les regards de Sophia Loren ou d’Alain Delon. On s’échangeait des sourires, des bonjours et des autographes, entre deux glaces fondantes ou des billets de cinéma, sur la Croisette ensoleillée ou pluvieuse. De nos jours, le Festival de Cannes garde le charme de la légende, mais ses étoiles sont devenues presque inaccessibles, perchées sur des tapis rouges aux barrières toujours plus hautes, défiées par les zooms des photographes. Pourtant, la magie opère toujours, inlassablement.
À partir du 13 mai 2025, et jusqu’au 24, la 78e édition s’ouvre sur 21 films en compétition, divulguant les attentes, les drames, les attachements et les révoltes du monde entier. Et comme une ode à cette bulle d’éternité qu'amène le cinéma, Juliette Binoche, grande dame de l’écran, présidera le jury. À ses côtés, Halle Berry, Jeremy Strong, Leïla Slimani, Carlos Reygadas, Dieudo Hamadi, Alba Rohrwacher, Payal Kapadia et Hong Sang-soo formeront une assemblée cosmopolite, reflet de la diversité du cinéma mondial.
La sélection s’annonce riche en films diversifiés. L’Iran y dévoile deux œuvres attendues et politiquement sensibles: Un simple accident de Jafar Panahi, entouré de mystère, et Mother and Child de Saeed Roustaee, drame familial intense. Ces films, tout comme leurs auteurs, racontent la fougue de la résistance.
La France sera doublement représentée. Julia Ducournau revient après Titane avec Alpha, plongée dans les années sida à travers les yeux d’une enfant. Hafsia Herzi, elle, adapte La Petite Dernière de Fatima Daas, portrait d’une jeune femme musulmane et homosexuelle, à la fois intime et politique.
Les frères Dardenne, Jean-Pierre et Luc, toujours au rendez-vous à Cannes, présentent Jeunes mères, chronique sociale sur cinq femmes et leurs maternités partagées dans un foyer belge. Les réalisateurs, figures du cinéma d’auteur belge, ont déjà reçu deux Palmes d'or à Cannes pour Rosetta (1999) et L’Enfant (2005). À leurs côtés, Wes Anderson, Tarik Saleh, Ari Aster, Richard Linklater ou encore Kelly Reichardt témoignent d’un cinéma mondial qui n’a rien perdu de sa voix singulière.
Une nouvelle génération de cinéastes s’impose également dans cet événement majeur. Scarlett Johansson, Kristen Stewart et Harris Dickinson, tous trois des talents reconnus devant la caméra, font leurs débuts derrière celle-ci en présentant leurs premiers films dans la section «Un certain regard».
Reflétant renouvellements artistiques et personnels, Cannes présente dorénavant une section immersive. Cette année, elle s'établit au cœur de l’Hôtel Carlton, transformé du 14 au 23 mai en écrin de réalités alternatives. Neuf œuvres en compétition, deux hors compétition et cinq créations luxembourgeoises proposent des récits sensoriels mêlant réalité virtuelle, intelligence artificielle, mapping vidéo et expériences interactives. C’est un langage nouveau, poétique et déroutant, qui va au-delà du grand écran: le spectateur y entre, y vibre.
Le jury de cette section sera présidé par Luc Jacquet, entouré de Laurie Anderson, Tania de Montaigne, Martha Fiennes et Tetsuya Mizuguchi. Leur mission est de décerner le prix de la Meilleure œuvre immersive le 22 mai, lors d’une cérémonie dédiée à ces fins.
Pendant douze jours, Cannes reprendra la couronne du cinéma et de l’émotion. L'émoi de l’adieu de Tom Cruise dans le dernier opus de Mission: Impossible, présenté en avant-première mondiale, ainsi que celui de l’hommage à Robert De Niro, 81 ans, qui recevra une Palme d’or d’honneur pour l’ensemble de son œuvre.
Par-delà le glamour des projecteurs, Cannes, c’est aussi le frissonnement d’un film vu sous les étoiles, allongé sur une chaise longue d’un ciné-plage, les rumeurs du mistral gagnant dans les palmiers ou les coquillages, et les rires fusant dans les ruelles du Suquet. Dans cette tension particulière entre éphémère et sacré, les regards se figent sur les écrans et les robes de soirée scintillent, le temps du rêve d’un instant.
Plus que les prix, Cannes inscrit sa légende dans les murs tapissés d’échos: ceux des applaudissements déchaînés, ceux des silences précédant les projections, les larmes d’émotion d’un acteur invisible, les clins d’œil d’un réalisateur connu, les sourires partagés et le bruit des vagues sur le sable doré.
En 2025, le cinéma transforme les tours de Babel aux mille et une langues en un lieu quasi sacré réunificateur. Le monde entier gardera les yeux rivés sur Cannes, et l’humanité existera, à travers les images ou les étoiles, le temps d’un festival.
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