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Après deux journées de scrutins municipaux au Mont-Liban et au Nord, l’attention se tourne désormais vers Baalbeck, qui votera le 18 mai. La ville, connue pour ses fortes affiliations tribales, son paysage politique actif et l’hégémonie du tandem Hezbollah-Amal, se trouve à un carrefour entre structures traditionnelles et nouvelles dynamiques civiques.
À Baalbeck, les affiliations tribales ont historiquement structuré le paysage politique local. Ces réseaux profondément ancrés se mêlent aux logiques partisanes, surtout lors des municipales. Depuis des décennies, le Hezbollah et Amal collaborent étroitement avec les familles influentes, transformant chaque scrutin en une formalité – une stratégie bien rodée qui consolide leur emprise sur les institutions locales grâce à ces réseaux familiaux puissants et loyaux.
Nouvelles tendances générationnelles
Ces dernières années, une transformation silencieuse a touché les structures tribales de Baalbeck. Certains jeunes issus des familles établies, influencés par l’éducation, l’urbanisation et un accès élargi à l’information, se détournent des cadres traditionnels. Pour séduire ces nouvelles générations, les partis traditionnels encouragent désormais des candidats indépendants issus des communautés tribales – jeunes, charismatiques – tout en soignant une image plus inclusive. La nomination, pour la première fois, d’une femme sur la liste soutenue par le tandem en est l’illustration. Geste largement symbolique, il vise surtout à répondre aux nouvelles attentes en matière de représentation et à maintenir l’emprise du tandem sur le pouvoir local.
À noter que les femmes demeurent massivement sous-représentées dans les conseils municipaux libanais, particulièrement à Baalbeck-Hermel.
Une société civile qui tente de faire face
Face à cette hégémonie, des initiatives citoyennes essaient de bousculer le statu quo. Dès 2016, «Baalbeck Madinati» proposait une alternative fondée sur la transparence, un leadership inclusif et un développement durable, avec un focus sur l’inclusion des jeunes et des femmes.
Pourtant, malgré des critiques sur la détérioration des conditions économiques, l’absence de projets concrets et une insécurité grandissante (enlèvements contre rançon, banditisme...), la liste «Développement et fidélité» – soutenue par le Hezbollah, Amal et l’Association des projets de bienfaisance islamiques – reste dominante. En 2016, «Baalbeck Madinati», appuyée par le Courant du Futur, la Jamaa Islamiya et des familles locales, n’avait obtenu que 35,2% des voix contre 55,2% pour la liste du tandem. Ce résultat, encourageant pour une opposition naissante, illustre la résistance continue du pouvoir établi.
Quant à la rue sunnite, elle reste aujourd’hui fragmentée du fait de l’absence du Courant du futur et de l’échec des négociations avec le tandem.
«Développement et loyauté»: le Hezbollah instrumentalise la fidélité
C’est par le nom de sa liste «Développement et loyauté», que la stratégie du tandem Hezbollah-Amal est aussi claire que la lumière du jour. Pour préserver son emprise locale, le tandem mise avant tout sur l’attachement de sa base partisane et sur la promesse d’éventuels projets futurs. En brandissant ce slogan, il se pose en garant d’un continuum entre les réalisations passées – souvent maquillées en victoires – ancrées dans la mémoire collective partisane, et les investissements promis pour l’avenir de Baalbeck.
Pour conforter ce lien de confiance, le tandem n’hésite pas à stigmatiser ses rivaux, les accusant systématiquement de calomnies et de financements étrangers. Il les dépeint ainsi comme de simples pions au service de puissances extérieures désireuses d’affaiblir la communauté chiite, dont lui seul se veut le défenseur légitime. Cette stratégie de polarisation vise à verrouiller la loyauté de son électorat, en instillant l’idée que seuls ceux qui lui restent fidèles pourront véritablement protéger l’identité et la souveraineté locales.
En fin de compte, tout dépendra de la capacité des voix d’opposition à se faire entendre: seront-elles assez fortes pour résonner dans l’esprit des électeurs de Baalbeck et ébranler une hégémonie vieille de décennies?
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