Un Trump combatif s'envole pour le Golfe
Le président américain Donald Trump s'exprime aux côtés de Mehmet Oz, administrateur de Medicare et Medicaid (à gauche), et de Martin Makary, commissaire de la Food and Drug Administration (FDA) (à droite), lors d'une conférence de presse sur les prix des médicaments sur ordonnance, dans la Roosevelt Room de la Maison Blanche, le 12 mai 2025, à Washington, DC. ©Jim Watson / AFP

       

Donald Trump s'est envolé lundi pour l'Arabie saoudite dans le cadre de sa première tournée au Moyen-Orient depuis son retour au pouvoir, qu'il espère riche en contrats économiques, mais qui sera également dominée par les conflits et tensions dans une région en pleine effervescence.

Dans une concomitance quasi orchestrée, le président américain a décollé à destination de Ryad depuis la base militaire Andrews, dans la banlieue de Washington, à peu près au moment où était annoncée par le Hamas la libération de l'otage israélo-américain Edan Alexander, retenu dans la bande de Gaza depuis les attaques sanglantes du 7 octobre 2023 en Israël.

Lors de cette tournée majeure, Donald Trump doit aussi se rendre au Qatar et aux Émirats arabes unis.

Mais il pourrait ajouter une étape, car il a évoqué lundi la possibilité d'aller en Turquie jeudi pour des discussions entre l'Ukraine et la Russie à Istanbul, qui restent cependant à confirmer.

«Je pense que la réunion de jeudi en Turquie entre la Russie et l'Ukraine pourrait déboucher sur un bon résultat, et je pense que les deux dirigeants devraient être présents», a-t-il dit en référence aux présidents russe Vladimir Poutine et ukrainien Volodymyr Zelensky.

Ce dernier a dit qu'il y sera, mais le maître du Kremlin n'a pas pour l'instant répondu.

«Beau geste» du Qatar

Le voyage de M. Trump dans le Golfe s'annonce intense.

L'ancien promoteur immobilier «espère décrocher des promesses d'investissement», analyse Anna Jacobs, chercheuse à l'Arab Gulf States Institute à Washington, à un moment où sa politique protectionniste déstabilise l'économie américaine et inquiète l'opinion publique.

Ryad, Doha et Abou Dabi déploieront tout leur faste pour un dirigeant très sensible à la pompe monarchique, en plus d'annoncer d'énormes contrats et commandes, qui pourraient aller de la défense à l'aviation en passant par l'énergie ou l'intelligence artificielle.

Le déplacement est cependant déjà entaché d'une polémique, alors que la famille royale qatarie escompte faire cadeau aux États-Unis d'un luxueux Boeing 747-8 Jumbo, estimé à 400 millions de dollars par des experts, et que le président américain compte utiliser comme son prochain Air Force One.

«Je pense que c'est un beau geste venant du Qatar. Je suis très reconnaissant», a déclaré Donald Trump. L'opposition démocrate crie, elle, à la «corruption».

L'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont par ailleurs décidé, avec les autres pays de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (Opep+), d'augmenter fortement leur offre de pétrole. De quoi mettre Donald Trump, que toute baisse du cours du brut enchante, dans les meilleures dispositions.

Le président américain rencontrera à Ryad les dirigeants des six pays du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Bahreïn, Qatar, Koweït et Oman), dont l'influence diplomatique ne cesse de croître, comme en témoigne le rôle de médiation joué par certains d'entre eux dans la guerre en Ukraine ou le conflit à Gaza.

Il sera question des grands sujets régionaux allant des discussions entre les États-Unis et l'Iran sur le nucléaire, dont une nouvelle session s'est achevée dimanche à Oman, aux attaques des Houthis du Yémen, avec lesquels Washington vient de conclure un cessez-le-feu. La Syrie et bien sûr Gaza, où les Américains ont annoncé une initiative humanitaire, seront également à l'agenda.

M.Trump a affirmé lundi que les États-Unis pourraient alléger les sanctions contre la Syrie pour aider ce pays à prendre "un nouveau départ", après le renversement en décembre du président Bachar al-Assad par une coalition islamiste.

"Nous allons devoir prendre une décision sur les sanctions, que nous pourrions très bien alléger. (...) Nous voulons permettre (à la Syrie) de prendre un nouveau départ", a déclaré à la Maison Blanche le président américain, qui s'est ensuite envolé pour une tournée dans le Golfe.

Il a ajouté qu'il avait parlé de ce sujet avec le président turc Recep Tayyip Erdogan, un allié du nouveau pouvoir syrien.

Damas a accueilli "favorablement" les propos de Donald Trump, saluant "une étape encourageante vers la fin des souffrances du peuple syrien", selon un communiqué du ministère syrien des Affaires étrangères.

La Syrie est dirigée par un président par intérim, Ahmad al-Chareh, à la tête de la coalition qui a mis fin à cinq décennies de règne sans partage de la famille Assad.

Le nouveau pouvoir islamiste syrien cherche à reconstruire le pays ravagé par près de 14 années de guerre civile, déclenchée en 2011 par la répression de manifestations prodémocratie, et réclame la levée des sanctions internationales datant de l'époque Assad.

Certains pays, dont les États-Unis, ont jusque-là temporisé en disant qu'ils souhaitaient d'abord voir comment les nouvelles autorités exerçaient leur pouvoir, notamment sur le plan du respect des droits humains et des minorités, avant de lever leurs sanctions sur la Syrie.

Dans un rapport publié en février, le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) estimait qu'au rythme de croissance actuel, la Syrie ne retrouverait pas son niveau économique de 2010 avant 2080.

Le Pnud soulignait aussi qu'aujourd'hui neuf Syriens sur 10 vivent dans la pauvreté et que le produit intérieur brut atteint moins de la moitié de sa valeur d'avant la guerre civile.

Les spécialistes de la région jugent par contre qu'une normalisation des relations entre l'Arabie saoudite et Israël, projet un temps cher à Donald Trump, n'est plus d'actualité à l'heure où la bande de Gaza, assiégée et pilonnée par les forces israéliennes, vit une catastrophe humanitaire.

Certains experts imaginent plutôt des tractations américano-saoudiennes dans lesquelles Israël serait laissé de côté, par exemple sur le nucléaire civil.

L'une des inconnues du voyage concerne une éventuelle décision du président américain sur la manière dont les États-Unis désignent le Golfe.

Des articles de presse lui prêtent l'intention de le nommer «Golfe d'Arabie» ou «Golfe arabique», et non plus «Golfe persique», au risque de braquer les Iraniens.

AFP

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