Thomas Jolly: un an après, la flamme des JO brille toujours
Le danseur, chorégraphe et comédien français Thomas Jolly pose lors d’une séance photo au théâtre des Amandiers à Nanterre, le 16 mars 2023. ©Joel SAGET / AFP

Un an après les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, Thomas Jolly revient sur les cérémonies d’ouverture et de clôture qu’il a dirigées. Il évoque un legs culturel fort, une émotion collective et la portée internationale d’un spectacle vivant à la française.

Un an après, les cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ont laissé «un souvenir collectif», affirme à l’AFP Thomas Jolly, qui en était le directeur artistique, un moment de «liesse» dont il ne s’est «pas tout à fait remis».

Quel héritage laissent les quatre cérémonies des JO, selon vous?

«Elles ont inscrit quelque chose de durable… Une trace de joie, d’unité, de fierté.
Rappelons-nous que la première cérémonie, le 26 juillet, arrive après une période politique assez anxiogène (après les élections législatives, NDLR). Et à la rentrée, les nouvelles venant de l’intérieur du pays mais aussi à l’international ont été assez rudes. Donc les cérémonies, et au-delà les Jeux, sont certainement comme des lanternes dans une obscurité pas simple à vivre au quotidien.
Ce moment est aussi un souvenir que nous avons en commun. Ce n’est pas si courant, aujourd’hui, quand on a tellement de chaînes (télévisées, NDLR), de propositions… Que tout le monde soit devant le même objet, au même moment – 25 millions de personnes en France (à l’ouverture des JO, le 26 juillet, NDLR) – ça crée forcément un lien !»

Depuis, vous êtes invité, notamment à l’étranger, pour évoquer cette expérience…

«Hong Kong, Los Angeles, Austin (au Texas, NDLR), Athènes… Partout où je suis allé, je constate que la France, à travers ces cérémonies, a gagné comme une sorte de retour de son audace, de sa créativité, de l’esprit français. Ça me rend heureux.»

Ces shows ont été récompensés aux Victoires de la musique, à la cérémonie des Molière, des prix que vous avez dédiés au spectacle vivant, vous qui êtes metteur en scène de théâtre…

«On a vu à quel point le spectacle vivant est un outil puissant pour le vivre-ensemble. Il a toujours été un outil d’émancipation depuis l’Antiquité et aussi ici en France, avec une politique culturelle qui l’a placé comme un des piliers de reconstruction du pays après la Seconde Guerre mondiale.»

Qu’est-ce que ce projet, préparé pendant deux ans, vous a appris?

«Je retiens l’extraordinaire expérience du soir du 26 juillet où, malgré la pluie, 20 000 êtres humains (artistes et personnels, NDLR) se sont "recoordonnés" en direct, devant trois milliards de personnes, pour que l’essentiel de la cérémonie pensée, travaillée et répétée soit délivrée. Au moins 90 % du plan A a pu avoir lieu. Cette extraordinaire force collective, c’est une immense leçon. J’avais déjà eu des expériences collectives mais pas à ce point-là !
Le soir de la dernière cérémonie, Patrick Boucheron (l’historien qui, parmi d’autres personnalités, a contribué à l’écriture des cérémonies, NDLR) m’a dit: Nous ne nous en remettrons pas. Je lui ai dit: C’est peut-être parce que tu n’es pas habitué au spectacle vivant. Au théâtre, l’éphémère, c’est ma vie. En fait, il a un peu raison… Je ne m’en suis pas encore complètement remis!»

Vous avez eu un projet de spectacle pour le 14 juillet à Rouen, qui n’a pas vu le jour faute de financements. Cette idée est-elle abandonnée?

«Je trouvais important de perpétuer, au moment de la fête nationale, ce grand spectacle qui redit les valeurs qui nous rassemblent, en passant dans une ville différente chaque année, afin de mettre en lumière la large diversité de ce pays. Une volonté de créer une sorte d’héritage aux cérémonies. Je persiste à croire que c’est une belle idée. Je vais davantage réfléchir aux moyens de l’ancrer dans le réel.»

Vous avez été l’objet d’une campagne de cyberharcèlement pour un tableau de la cérémonie d’ouverture des JO. Sept personnes ont été jugées, dont quatre ont écopé de peines allant de deux à quatre mois de prison avec sursis. Qu’avez-vous pensé de cette décision?

«C’est un (jugement) qui fait acte, au sens où il redit que, derrière un écran, on ne peut pas insulter, menacer de mort, discriminer impunément. C’est important de le dire pour les jeunes gens victimes de cyberharcèlement.»

Quels sont vos projets pour la suite?

«Mon métier, c’est de raconter des histoires. Le théâtre, d’où je viens, j’y retournerai, c’est certain. J’ai aussi envie d’explorer d’autres territoires narratifs. Donc j’écris différentes choses, je développe différents projets qui ne sont pas arrêtés à ce jour.»

Par Karine PERRET / AFP

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