L’épouvantail syrien pour justifier le maintien des armes
©Ici Beyrouth

Dans sa stratégie visant à conserver son arsenal, le Hezbollah continue de brandir la menace d’une insécurité frontalière, évoquant à répétition des rassemblements militaires syriens à l’est et des infiltrations de combattants extrémistes au Liban. Or, ces affirmations ont été systématiquement démenties par l’armée libanaise qui les qualifie de pures rumeurs.

De sources sécuritaires, on rapporte que l’armée et la Sûreté générale ont récemment mené une opération de surveillance approfondie le long de la frontière syro-libanaise. À l’aide de drones, elles ont scruté jusqu’à 7 kilomètres à l’intérieur du territoire syrien sans détecter de mouvements suspects. Les services de renseignement, notamment dans la Békaa et le Nord, confirment également l’absence d’infiltration de combattants étrangers, y compris de Tchétchènes ou d’Ouïghours.

Malgré ces constats, des sources politiques estiment que le Hezbollah, appuyé par le Courant patriotique libre (CPL), persiste à propager ce type de discours pour alimenter un climat de peur afin de maintenir son arsenal hors du contrôle de l’État, tout en préparant le terrain pour les prochaines échéances électorales.

Dans ce contexte, certains ont détourné les propos de l’émissaire américain Tom Barrack lors d’une interview au journal The National. Ses déclarations sur les menaces pesant sur le Liban – qu’il attribue à Israël, à l’Iran et à la Syrie – ont été sorties de leur contexte pour accréditer l’idée que Washington souhaiterait intégrer le Liban à l’entité régionale du Levant (Bilad al-Sham), une idée que Barrack n’a jamais exprimée.

«Le Liban risque de tomber sous l’emprise de puissances régionales si Beyrouth ne s’attaque pas sérieusement à la question des armes du Hezbollah. Il fait face à un danger existentiel. Il y a Israël d’un côté, l’Iran de l’autre, et la Syrie qui s’affirme de plus en plus. Si rien n’est fait, le Liban redeviendra une extension du Levant. Les Syriens disent que “le Liban est notre station balnéaire”. Nous devons donc bouger. Je sais à quel point le peuple libanais est frustré. Moi aussi, je suis frustré.» a-t-il déclaré.

Ses propos traduisent une inquiétude sincère pour l’avenir du Liban, qu’il relie à la capacité de l’État libanais à prendre ses responsabilités et à préserver sa souveraineté.

Malgré les éclaircissements fournis par Barrack, la polémique a enflé. Le député du Hezbollah Ibrahim Moussaoui a même appelé le ministère des Affaires étrangères à convoquer l’ambassadrice américaine, dénonçant une ingérence.

Des observateurs rappellent cependant que le Hezbollah fut, durant des années, le principal défenseur de l’intégration du Liban dans l’orbite syrienne. De 1992 jusqu’à la guerre en Syrie, il s’est opposé au retrait syrien du Liban, allant jusqu’à participer militairement au conflit aux côtés du régime Assad, sacrifiant des milliers de ses combattants.

Selon ces mêmes sources, l’opposition actuelle du Hezbollah au discours de Barrack s’explique surtout par le fait que le régime syrien d’aujourd’hui n’est plus aligné sur ses intérêts. Mais si l’histoire venait à se répéter, le parti de Dieu n’hésiterait pas, affirment-elles, à réintégrer de force le Liban dans le giron du Levant.

 

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