La Finul est-elle vraiment efficace?
©Ici Beyrouth

À l’approche de l’échéance de son mandat, fixée au 31 août 2025, la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) fait l’objet de critiques récurrentes quant à sa capacité à remplir sa mission.

Chargée depuis 2006, en vertu de la résolution 1701, de veiller à l’absence de groupes armés au sud du Litani, la Finul peine à imposer ses prérogatives, malgré ses 10.000 soldats déployés et un budget annuel de près de 500 millions de dollars.

Un mandat ambitieux, une réalité décevante

La mission confiée à la Finul visait à appuyer l’armée libanaise pour établir une zone exempte de toute milice, notamment du Hezbollah.

Cependant, sur le terrain, la situation s’est inversée: le Hezbollah a continué d’élargir sa présence militaire au sud du Liban, interdisant à la Finul l’accès à de vastes zones.

De plus, des dizaines d’incidents d’entrave à la liberté de mouvement des patrouilles ont été rapportés, incluant des menaces, des vols d’équipement, voire des tirs. En février, des partisans du Hezbollah ont incendié les véhicules du commandant adjoint de la Finul à l’aéroport de Beyrouth, blessant l’officier.

Le centre israélien Alma, spécialisé dans la sécurité au nord d’Israël, évoque même l’existence de positions de la force d’élite du Hezbollah, l’unité Al-Radwan, et de tunnels d’assaut à proximité directe des postes d’observation de la Finul, sans réaction de celle-ci.

Alma accuse même la Finul de servir de «bouclier humain» face aux frappes israéliennes.

Une impuissance assumée?

Si la Finul affirme s’en tenir à un rôle de coordination et d’observation, ses détracteurs estiment qu’elle interprète de manière restrictive son mandat.

La résolution 1701 autorise pourtant la Finul à recourir à «tous les moyens nécessaires» pour empêcher l’usage hostile de sa zone d’opération, dans les limites de ses capacités et avec l’accord de l’État hôte (le Liban).

Le Washington Institute souligne que la Finul n’a jamais enquêté sur les plus de 3.000 sites militaires ciblés par Israël depuis octobre 2023, et que les caches d’armes récemment démantelées l’ont été par l’armée libanaise ou grâce aux frappes israéliennes.

Selon le Washington Examiner, un hebdomadaire conservateur, la Finul est même devenue un «programme d’assistance déguisé», profitant aux pays contributeurs tout en échouant à remplir son mandat initial.

Plus encore, le quotidien Israel Hayom évoque des cas de corruption: certains soldats onusiens auraient été soudoyés par le Hezbollah pour accéder à des équipements de surveillance, mais aucune preuve indépendante ou enquête solide n’est disponible à ce stade.

Le tournant de 2023-2024: vers un nouveau paradigme?

La guerre déclenchée par le Hezbollah en octobre 2023 a bouleversé le statu quo. L’intervention militaire israélienne, suivie du cessez-le-feu du 27 novembre 2024, a abouti à la destruction d’une grande partie de l’infrastructure militaire du Hezbollah au Liban-Sud.

Dans la foulée, le président Joseph Aoun a proclamé le monopole étatique sur les armes, et l’armée libanaise a été redéployée massivement au sud, soutenue par un mécanisme de supervision dirigé par les États-Unis, la France, Israël, le Liban et la Finul.

Ce mécanisme réunit les cinq acteurs impliqués dans la mise en œuvre et le suivi du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah.

Depuis, les progrès de l’armée libanaise sont notables: selon l’INSS, un think tank israélien, plus de 500 positions du Hezbollah auraient été démantelées et 90% de ses infrastructures frontalières détruites.

La Finul aurait identifié plus de 225 caches d’armes, mais Israël estime que ces résultats sont dus à la pression militaire israélienne et à l’implication américaine, non à l’efficacité de la mission onusienne.

Le Washington Examiner souligne que, depuis le cessez-le-feu, l’armée libanaise contrôle désormais plus de 80% du Liban-Sud et mène activement des saisies d’armes du Hezbollah, davantage que la Finul en près de vingt ans.

La Finul se voit reléguée à des fonctions marginales, notamment humanitaires ou logistiques.

Quelles options pour l’avenir?

Le débat à venir au Conseil de sécurité s’annonce décisif. Plusieurs scénarios sont envisagés.

Le premier, celui du renouvellement inchangé, soutenu par le Liban et certains membres du Conseil comme la France, la Chine ou la Russie. Une option qualifiée de «paresse diplomatique» par le Washington Institute, car elle risquerait de prolonger une inefficacité coûteuse.

Le deuxième, celui d’une réforme profonde, défendue par Israël et les États-Unis. Elle passerait par une réduction des effectifs (jusqu’à 2.500 soldats), un recentrage du mandat sur les fonctions critiques (liaison, renseignement, réaction rapide) et un suivi semestriel des performances.

Le troisième, celui de la fin de mission, souligné par des centres de recherche comme Alma et l’American Enterprise Institute (AEI), ainsi que par le Washington Examiner. L’AEI considère que l’échec de la Finul n’est pas un cas isolé, mais symptomatique d’un modèle onusien en crise.

Le think tank américain dénonce une mission «qui aurait dû empêcher la guerre et qui, par son inaction, l’a rendue possible». Selon lui, loin d’être un facteur de stabilité, la Finul a offert une couverture diplomatique à la remilitarisation du Hezbollah, facilitée par une présence passive et parfois complaisante.

L’AEI élargit la critique au système de maintien de la paix dans son ensemble, en rappelant les défaillances persistantes de la Monusco en République démocratique du Congo et de l’Unficyp à Chypre.

En l’état, la Finul apparaît comme un acteur secondaire, voire un spectateur, dans la recomposition sécuritaire du Liban-Sud.

Pour ne pas être réduite à un symbole coûteux et inefficace, la Finul devra se transformer en profondeur. Sinon, sa dissolution pourrait bien devenir la seule option cohérente.

 

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