Quand les routes deviennent une hécatombe
©Al-Markazia

Lors d’une visite à la police municipale de Beyrouth, le ministre de l’Intérieur, Ahmad Hajjar, a rappelé jeudi que la sécurité routière relevait d’un travail commun à toutes les administrations concernées, et pas seulement des forces de l’ordre, soulignant la nécessité de coordonner les efforts pour améliorer la circulation dans la capitale comme sur l’ensemble du territoire.

Quelques jours plus tôt, le 6 août, la Commission nationale de sécurité routière s’était réunie pour la première fois depuis six ans, à l’invitation du ministre, en présence de représentants des forces de sécurité, de plusieurs ministères et d’associations spécialisées.

Cette relance, présentée comme une priorité par M. Hajjar, intervient alors que le Liban fait face à une recrudescence alarmante des accidents de la route. 

La Commission, présidée par le ministère de l’Intérieur, mais relevant également du Conseil national de la sécurité routière, présidé par le Premier ministre, Nawaf Salam, concentre désormais ses efforts sur la coordination des données, l’amélioration des infrastructures et le renforcement des contrôles. L’enjeu dépasse la seule dimension technique: il met en lumière la capacité – ou l’incapacité – de l’État à faire de la sécurité routière une politique publique suivie.

Des chiffres alarmants

Selon la YASA, 876 accidents ont été enregistrés entre janvier et fin mai 2025, causant 162 décès et faisant 1.034 blessés. Sur les six premiers mois de l’année, on dénombre 6.000 blessés et 207 morts, contre 5.400 blessés et 154 morts sur la même période en 2024. La tendance est clairement à la hausse, sans signe d’inversion.

Les mois d’été amplifient ce phénomène, en raison de la fermeture des écoles et de l’afflux de visiteurs qui entraînent une circulation plus dense. 

Sur les routes, les violations du Code de la route se multiplient: excès de vitesse, conduite en état d’ivresse, distraction au volant liée à l’usage du téléphone, absence de casque pour les motards, y compris chez les enfants. Mais il ne faut pas non plus oublier les problèmes d’infrastructure et plus particulièrement l’absence d’éclairage, notamment sur les routes de montagnes, et de balisages, là où les conducteurs devraient être alertés de problèmes potentiels, partout dans le pays, sans compter le mauvais état des routes.

Un problème structurel

Les données du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) pour 2022 montrent que les problèmes sont structurels. Les accidents se concentrent à Beyrouth, à Nabatiyé et à Zahlé, avec une forte récurrence le long du littoral, notamment à Jounieh, Batroun, Tripoli, Byblos et Tyr.

La majorité des accidents impliquaient en 2022 des collisions entre véhicules, suivies des collisions véhicule-moto (34,9%) et véhicule-piéton (10,7%). Sur le plan saisonnier, la fréquence des accidents était plus élevée en hiver et diminuait en été, en raison des conditions météorologiques, du mauvais état des routes et du trafic scolaire.

En 2025, la reprise des travaux de la Commission nationale de sécurité routière s’accompagne d’initiatives telles que la coordination avec la Croix-Rouge pour unifier les statistiques sur les accidents, la remise en service des feux tricolores et des caméras dans la capitale et sa périphérie, le renforcement des contrôles routiers, notamment sur les deux-roues, et la lutte contre le vol des plaques d’égout qui met en danger les piétons et les véhicules. 

Tant que la route restera un terrain livré à la loi du plus fort et que les problèmes d’infrastructure ne seront pas sérieusement réglés, chaque virage, chaque carrefour et chaque dépassement risquent de se transformer en drame annoncé.

Commentaires
  • Aucun commentaire