
Des playlists taillées sur mesure aux sound designers stars, la musique est devenue un acteur à part entière sur les podiums. Loin d’un simple décor sonore, elle sculpte le tempo des défilés et donne aux collections leur énergie, leur signature et leur mémoire.
Impossible aujourd’hui d’imaginer un défilé sans musique. Bien plus qu’un fond sonore, elle fait partie intégrante de l’expérience du catwalk, influençant directement la perception des vêtements et le souvenir du show. Si autrefois les morceaux s’enchaînaient sans grande cohérence, les grandes maisons font désormais appel à de véritables créateurs de bande-son, comme Michel Gaubert ou Frédéric Sanchez, reconnus dans le milieu pour leur capacité à inventer des univers sonores sur mesure. Chanel, Dior, Louis Vuitton, Prada ou Hermès leur confient la composition ou la sélection musicale de leurs shows, pour sublimer chaque collection.
Leur rôle: traduire l’esprit d’une saison en sons, créer un paysage musical qui accompagne la narration visuelle, soutient l’allure des mannequins et capte l’attention du public. On peut entendre lors d’un même défilé un enchaînement de tubes pop, un morceau classique revisité, des bruits industriels ou encore des créations originales composées spécialement pour l’occasion. La musique ne se contente pas d’illustrer, elle inspire le rythme, impose une ambiance et crée même parfois un contraste saisissant avec l’esthétique des vêtements.
Le son devient récit
Certains défilés sont restés dans les mémoires pour leur bande-son aussi prégnants que la collection elle-même. Pour Chanel ou Dior, Michel Gaubert assemble souvent des mix complexes, alternant rythmes électroniques, voix samplées et grands classiques, pour renforcer le storytelling du show. Frédéric Sanchez, de son côté, a créé pour Prada ou Hermès des paysages sonores subtils, mêlant sons de la ville, musiques électro minimalistes ou mélodies rétro.
Plus récemment, certaines marques ont osé la collaboration avec des artistes, la performance live ou le DJ set sur le podium. En 2024, le créateur Raul Lopez (Luar) a travaillé main dans la main avec un producteur pour concevoir une bande-son originale, donnant une identité sonore unique au défilé. Chez Burberry, la référence à la culture musicale britannique s’est traduite par des sélections rock ou électroniques, évoquant l’énergie des festivals.
Le silence, lui aussi, peut marquer un défilé: un arrêt soudain, une rupture dans la bande-son ou une transition inattendue attirent l’attention sur une silhouette ou un passage-clé, créant une tension dramatique presque cinématographique.
Expérience immersive
Aujourd’hui, la mode et la musique fonctionnent comme deux langages qui se croisent et se nourrissent. La bande-son du défilé devient parfois aussi culte que la collection elle-même: des morceaux entendus sur le catwalk sont réclamés sur les réseaux sociaux, et certaines playlists sont diffusées en exclusivité par les maisons, prolongeant l’expérience au-delà du show.
Cette importance grandissante de la musique répond à une attente, celle de faire du défilé un moment immersif, sensoriel, mémorable, à mi-chemin entre performance artistique et expérience collective. Elle traduit aussi la volonté, pour la mode, d’élargir son public, notamment plus jeune, qui relaie volontiers ces extraits sonores sur les plateformes ou les réécoute après le défilé.
La musique devient ainsi le fil conducteur d’une saison.
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