
Il tend assidûment, telle une asymptote, vers l’apogée du comportement pernicieux. Le directoire du Hezbollah, fidèle aux directives de son parrain iranien, apporte jour après jour la preuve concrète de la stratégie maléfique qu’il applique sans foi ni loi sur la scène libanaise. Une stratégie axée sur la déconstruction de l’État et le torpillage de toute tentative de rétablissement de l’autorité du pouvoir central.
L’un des ténors parlementaires hezbollahis déclarait, il y a quelques jours, que lors de la réunion inopinée tenue avec le général Joseph Aoun entre les deux tours du scrutin présidentiel du 9 janvier 2025, deux représentants du tandem chiite avaient conclu un accord de principe avec le futur président afin de faciliter son élection à la Magistrature suprême. À en croire le député du «parti de Dieu», le deal convenu avec Joseph Aoun portait sur une feuille de route axée sur trois points fondamentaux: la présence impérative du tandem Hezbollah-Amal dans tout gouvernement; l’application de la 1701 uniquement au sud du Litani (et non pas sur l’ensemble du territoire libanais, comme le stipule la résolution du Conseil de sécurité); et la tenue de discussions sur une «stratégie de défense» (ce qui implique d’ajourner aux calendes grecques le règlement du problème de l’arsenal militaire de la formation pro-iranienne).
La manœuvre diabolique du Hezbollah était sur ce plan évidente: discréditer le président de la République (et donc porter un coup de Jarnac à son mandat) en «dévoilant» une prétendue collusion avec les suppôts du régime des mollahs; semer le doute entre Baabda et le Grand Sérail (en mettant en relief une atteinte, en amont, aux prérogatives de tout Premier ministre désigné); et ternir l’image du chef de l’État auprès des instances internationales (en affichant, d’entrée de jeu, un non-respect par Joseph Aoun des résolutions onusiennes). D’une pierre, trois coups…
Après cette attaque frontale contre le prestige du président, ce fut au tour du Premier ministre d’être pris dans le collimateur des alliés des Pasdaran. En effet, ceux-ci ont saisi la première occasion pour saper les pouvoirs du chef du gouvernement en balayant d’un revers de la main les instructions de Nawaf Salam dans l’affaire du rocher de Raouché. Et pour boucler la boucle et parachever cette entreprise de sape et de discrédit des instances étatiques, la formation pro-iranienne a bien pris soin de rendre un hommage public au commandement de l’armée et aux Forces de sécurité intérieure en louant leur décision de s’abstenir d’appliquer les directives de la présidence du Conseil dans cette affaire.
Bien au-delà des considérations mesquines d’ordre interne, la manœuvre malfaisante du camp iranien s’inscrit certes dans le prolongement de la stratégie de déconstruction de l’État et de sabotage du projet souverainiste initié à la faveur de la Révolution du cèdre de 2005-2006. Mais elle reflète surtout la détermination de l’aile radicale de la République islamique à s’accrocher à la dernière carte maîtresse qu’elle détient encore dans les pays du Levant, en l’occurrence le Hezbollah, dans l’objectif à peine voilé de torpiller le processus de stabilisation enclenché par le camp occidental au Moyen-Orient afin d’instaurer une paix durable, voire définitive, dans cette partie du monde.
Dans un tel contexte explosif, une réalité objective s’impose à l’œil nu: face à des factions qui s’obstinent à jouer jusqu’au bout la carte du blocage, de la déraison intégrale et de l’obscurantisme aveugle, toute attitude de complaisance à l’égard de la tête de pont des Pasdaran sous le prétexte – en tous points trompeur – de «préserver la paix civile» ne fait qu’enfoncer encore plus le pays dans le gouffre obscur et mortel dans lequel l’ont précipité les va-t-en-guerre de service. Et, à l’ombre de cette bataille existentielle, l’État central se doit de trancher, de faire preuve de fermeté, d’imposer ses décisions et de choisir son camp sans équivoque et sans louvoiement.
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