Quand la musique rapporte plus que la bourse
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Depuis les légendaires Bowie Bonds, la finance n’a pas cessé de suivre la musique de près: les catalogues d’artistes sont désormais de véritables actifs financiers. En 2025, des artistes comme Justin Bieber ou Lady Gaga ne se contentent plus de faire vibrer les foules, ils font aussi battre le cœur des marchés financiers.

Tout a commencé avec un homme qui voyait plus loin que sa guitare. En 1997, David Bowie lance les premiers «Bowie Bonds», des obligations adossées aux revenus de ses chansons. Le principe est simple: transformer la musique en un actif financier. Bowie reçoit immédiatement un capital de 55 millions de dollars, tandis que les investisseurs encaissent les royalties de son catalogue pendant dix ans. À l’époque, l’idée semblait folle. Aujourd’hui, elle vaut de l’or.

Selon le cabinet Music Business Worldwide, ce marché des «catalogues musicaux titrisés» pèse, en 2025, 4,4 milliards de dollars, un record historique. Et, à Wall Street, les traders écoutent désormais autant les bilans que… les playlists.

Et le modèle a de quoi séduire! Au lieu d’attendre des années pour récolter leurs droits d’auteur, les artistes peuvent monétiser leur catalogue immédiatement en le transformant en obligations. Les investisseurs, eux, perçoivent les revenus générés par le streaming, la radio, la publicité ou les placements commerciaux. Autrement dit, pendant que vous écoutez «Peaches» de Justin Bieber, un investisseur, quelque part, touche sa part du gâteau.

Un rendement qui n’a rien d’anecdotique. Selon le rapport Music in the Air, 2024 de Goldman Sachs, les revenus issus de ces produits financiers peuvent offrir jusqu’à 10% de rendement annuel, un score qui ferait pâlir certaines obligations.

Des artistes mieux lotis que jamais

Côté artistes, c’est aussi la belle vie (ou presque). En 2023, Justin Bieber a vendu une partie de son catalogue à Hipgnosis Songs Capital pour 200 millions de dollars, indique The Wall Street Journal. La même année, Shakira et Lady Gaga ont emboîté le pas, empochant des dizaines de millions et se libérant ainsi de la pression financière.

Pour beaucoup, c’est une manière de sécuriser leur patrimoine, racheter leurs droits ou financer de nouveaux projets. Bref, ils transforment la nostalgie en cash-flow.

Pourquoi la musique attire-t-elle autant d’investisseurs?

Parce qu’elle génère des flux réguliers et prévisibles, même en période de crise. Les plateformes de streaming, comme Spotify et Apple Music, assurent une base d’audience mondiale, tandis que la protection juridique des droits d’auteur offre un niveau de sécurité rare. Selon PwC, les revenus mondiaux de la musique devraient atteindre 70 milliards de dollars d’ici à 2030, en grande partie grâce au streaming et aux exploitations secondaires (publicités, synchronisations, concerts). Et, contrairement à la mode des cryptos ou des NFT, ici, les investisseurs n’achètent pas du vent… ils achètent des tubes.

La musique a toujours été un art. Désormais, c’est aussi un produit structuré. Certains fonds spécialisés, comme Primary Wave, Concord Music Group ou Hipgnosis, achètent les catalogues d’artistes comme d’autres achètent de l’immobilier. Leur logique est simple: les hits ne se démodent jamais. Une chanson qui rapporte aujourd’hui quelques milliers de dollars en streaming continuera probablement de générer des revenus dans dix ans. Et si l’artiste passe à la postérité, le jackpot est assuré. Bref, la Bourse a trouvé son groove, et les traders leur nouvelle bande-son.

Ce qui était autrefois réservé aux mélomanes est aujourd’hui une stratégie d’investissement respectée. La musique ne se contente plus de faire vibrer les cœurs elle fait désormais gonfler les portefeuilles. Et si David Bowie voyait cela d’où qu’il soit, il en sourirait sûrement. La musique, finalement, n’a jamais aussi bien joué… en bourse!

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