À Beyrouth, le pape Léon XIV appelle à la paix et au dialogue interreligieux
Le pape Léon XIV

Le pape Léon XIV a prononcé lundi un discours sur la place des Martyrs lors de la rencontre consacrée au dialogue interreligieux, l’une des étapes majeures de sa visite de trois jours au Liban.

Chers frères et sœurs,

Je suis profondément ému et infiniment reconnaissant de me tenir aujourd’hui parmi vous, dans cette terre bénie — une terre exaltée par les prophètes de l’Ancien Testament, qui voyaient dans ses cèdres majestueux les symboles de l’âme juste qui s’épanouit sous le regard vigilant du ciel ; une terre où l’écho du Logos ne s’est jamais éteint mais continue, de siècle en siècle, d’appeler tous ceux qui désirent ouvrir leur cœur au Dieu vivant.

Dans son exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in Medio Oriente, signée ici même à Beyrouth en 2012, le pape Benoît XVI rappelait que « la mission universelle de l’Église l’appelle au dialogue avec les croyants d’autres religions. Au Moyen-Orient, ce dialogue s’appuie sur les profondes connexions spirituelles et historiques entre chrétiens, juifs et musulmans. Il ne s’inspire pas d’intérêts politiques ou sociaux, mais de profondes vérités théologiques enracinées dans la foi » (n. 19). Chers amis, votre présence ici aujourd’hui, en ce lieu remarquable où minarets et clochers se dressent côte à côte — et tous deux tournés vers le ciel — témoigne de la foi persistante de cette terre et de la fidélité de son peuple envers l’unique Dieu.

Ici, dans cette terre bien-aimée, que chaque cloche, chaque adhân, chaque appel à la prière se fonde dans un seul et même hymne — non seulement pour glorifier le Créateur miséricordieux du ciel et de la terre, mais aussi pour élever une prière fervente pour le don divin de la paix. Depuis de nombreuses années, et plus encore récemment, les yeux du monde se tournent vers le Moyen-Orient, berceau des religions abrahamiques, scrutant son cheminement difficile et sa quête inlassable du précieux don de la paix. Parfois, l’humanité regarde cette région avec appréhension et découragement, face à des conflits si complexes et enracinés depuis si longtemps.

Pourtant, au cœur même de ces épreuves, une source d’espérance et d’encouragement émerge lorsque nous nous concentrons sur ce qui nous unit : notre humanité commune et notre foi en un Dieu d’amour et de miséricorde. À une époque où la coexistence semble parfois un rêve lointain, le peuple du Liban, embrassant différentes religions, demeure un rappel puissant que la peur, la méfiance et les préjugés n’ont pas le dernier mot, et que l’unité, la réconciliation et la paix restent possibles. C’est une mission immuable dans l’histoire de cette terre bien-aimée : témoigner de la vérité durable selon laquelle chrétiens, musulmans, druzes et bien d’autres peuvent vivre ensemble et bâtir un pays uni dans le respect et le dialogue.

Il y a soixante ans, le concile Vatican II, avec la déclaration Nostra Aetate, a ouvert un horizon nouveau pour la rencontre et le respect mutuel entre catholiques et croyants d’autres religions, soulignant que le véritable dialogue et la véritable collaboration sont fondés sur l’amour — le seul fondement de la paix, de la justice et de la réconciliation. Ce dialogue, inspiré par l’amour divin, doit embrasser tous les hommes de bonne volonté, rejeter préjugés, discriminations et persécutions, et affirmer la dignité égale de chaque être humain.

Si le ministère public de Jésus s’est principalement déroulé en Galilée et en Judée, les Évangiles relatent aussi des épisodes où il se rendit dans la région de la Décapole — notamment aux environs de Tyr et de Sidon — où il rencontra la femme syro-phénicienne dont la foi inébranlable le poussa à guérir sa fille (cf. Marc 7, 24-30).

Ici, la terre elle-même devient plus qu’un simple lieu de rencontre entre Jésus et une mère implorante ; elle devient un espace où humilité, confiance et persévérance surmontent toutes les barrières et rencontrent l’amour sans limites de Dieu, qui embrasse chaque cœur humain. Voilà en effet « le cœur même du dialogue interreligieux : la découverte de la présence de Dieu au-delà de toutes les frontières et l’invitation à le chercher ensemble, dans le respect et l’humilité » (1).

Si le Liban est célèbre pour ses cèdres majestueux, l’olivier est lui aussi une pierre angulaire de son héritage. L’olivier non seulement orne l’espace dans lequel nous nous réunissons aujourd’hui, mais il est également vénéré dans les textes sacrés du christianisme, du judaïsme et de l’islam, symbole intemporel de réconciliation et de paix. Sa longévité et sa capacité à prospérer dans les environnements les plus rudes incarnent l’endurance et l’espérance, reflétant l’engagement nécessaire pour nourrir la coexistence pacifique.

De cet arbre coule une huile qui guérit — un baume pour les blessures du corps et de l’âme — manifestation de la compassion infinie de Dieu pour tous ceux qui souffrent. Son huile apporte aussi la lumière, rappelant l’appel à illuminer nos cœurs par la foi, la charité et l’humilité. Comme les racines des cèdres et des oliviers plongent profondément et s’étendent largement dans la terre, ainsi le peuple libanais, dispersé à travers le monde, demeure uni par la force durable et l’héritage intemporel de sa patrie. Votre présence ici et à travers le monde enrichit la planète de votre héritage multimillénaire, mais elle constitue aussi une vocation. Dans un monde toujours plus interconnecté, vous êtes appelés à être des bâtisseurs de paix : à affronter l’intolérance, vaincre la violence et bannir l’exclusion, éclairant la voie de la justice et de la concorde pour tous, par le témoignage de votre foi.

Chers frères et sœurs, le 25 mars de chaque année, célébré comme jour férié national dans votre pays, vous vous rassemblez pour vénérer Marie, Notre-Dame du Liban, honorée dans son sanctuaire de Harissa, dominé par une statue imposante de la Vierge aux bras ouverts, embrassant tout le peuple libanais. Que cette étreinte aimante et maternelle de la Vierge Marie, Mère de Jésus et Reine de la Paix, guide chacun de vous, afin que dans votre patrie, au Moyen-Orient et partout dans le monde, le don de la réconciliation et de la coexistence pacifique jaillisse « comme les sources qui coulent du Liban » (cf. Cantique des Cantiques 4, 15), apportant espérance et unité à tous.

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