La question épineuse des rapports avec Israël et de la nature de ces relations fait l'objet depuis des décennies de surenchères populistes qui frôlent souvent le terrorisme intellectuel exercé d'abord par les factions palestiniennes, puis par le régime syrien, et au stade actuel par le parrain iranien. Ces surenchères ont été relancées, et elles seront sans doute entretenues au cours de la prochaine période, à l'occasion de la signature de l'accord libano-israélien sur la délimitation des frontières maritimes entre les deux pays.
Ce nouveau tournant se reflète, et se reflétera, dans les discours et prises de position enregistrés ici et là, dépassant même le cadre libanais. «Il s’agit d’un accomplissement politique. Ce n’est pas tous les jours qu’un État ennemi reconnaît l’État d’Israël dans un accord écrit, et ce devant l’ensemble de la communauté internationale», a ainsi déclaré jeudi le Premier ministre israélien Yaïr Lapid, le jour de la signature de l’accord à Ras Naqoura. Le président de la République libanaise Michel Aoun n'a pas tardé à répliquer: «Il s’agit d’un acte purement technique, sans aucune retombée politique». Thèse que confirment certains juristes et analystes, mais que d'autres contredisent.
L’argument de la reconnaissance: verbiage ou réalité?
«La position libanaise, après l’accord sur la délimitation de la frontière maritime, demeure inchangée», explique à Ici Beyrouth l’analyste Wissam Saadé. «Le Liban ne reconnaît et ne reconnaîtra l’État d’Israël qu’une fois que le processus de paix dans la région viendra à maturation, tel que le préconise la conférence de paix de Madrid à laquelle le Liban avait participé en 1991, souligne-t-il. En d’autres termes, le Liban s’est engagé à rejeter une reconnaissance unilatérale du droit de l’État d’Israël à exister, jusqu’à la conclusion d’une paix régionale globale, dans le sillage de la conférence susmentionnée et dans le cadre du respect des résolutions internationales. Toutefois, ce discours n’est pas celui que tient le Hezbollah». Le parti pro-iranien adopte en effet une position idéologique plus ferme, refusant même l'éventualité d’une reconnaissance future de l’État hébreu.
«Ce qui pourrait déranger le Hezbollah, c’est qu’à la suite de cet arrangement, quoiqu'indirect puisqu’il a nécessité l’intervention d’une tierce partie, à savoir les États-Unis, une normalisation des relations entre le Liban et Israël s’impose», précise M. Saadé. Le parti chiite décèle dans la conclusion de cet accord une invitation à la régularisation des relations avec «l’ennemi». «C’est dans ce sens que l’on pourrait s’attendre, dans les mois à venir, à une surenchère politique de la part du Hezbollah», selon un analyste qui a requis l’anonymat. Même son de cloche chez Wissam Saadé qui souligne que la formation pro-iranienne pourrait dans un futur proche «lancer des attaques contre certaines factions politiques locales en les accusant de vouloir normaliser les relations avec Israël». Une façon pour lui de répondre aux critiques proférées contre lui et qui visent à remettre en cause la légitimité de ses armes.
Face à ces critiques, le Hezbollah pourrait rétorquer que «cet accord n’empêchera pas, à lui seul, une montée aux extrêmes». «Il n’exclura pas la possibilité de l'éclatement d’un conflit, affirme-t-on dans les milieux du parti pro-iranien. Il ne résoudra pas non plus le problème de l’application de la résolution 1701 au Liban.»
La stabilité évoquée dans certains milieux n’est donc pas forcément garantie, si l'on en croit la posture médiatique du Hezbollah. Tout dépendra de l’interprétation des clauses de l’accord au moment de son exécution, sachant que les parties prenantes devront, à chaque fois qu'un litige interviendra, se référer au médiateur américain.
Les critères d'une convention
En tout état de cause, ce que l'on peut désigner désormais sous l'appellation "d'accord de Cana-Kariche" ne saurait être perçu comme une convention internationale car pour que l’on puisse parler de convention, trois conditions doivent être satisfaites, comme l’a expliqué dans un article précédent à Ici Beyrouth l’avocat Rizk Zgheib. Il faut d’une part que la convention soit conclue entre deux États, ce qui est plus ou moins le cas, nonobstant le fait que le Liban ne reconnaît pas Israël. D’autre part, la convention doit être conclue dans le cadre du droit international. Ce qui est le cas au Liban, puisque les deux lettres qui en découlent ont été enregistrées auprès du secrétaire général de l’ONU. Enfin, la convention doit créer des effets juridiques contraignants en droit international, ce qui n’est pas le cas, puisque les obligations figurant dans cet accord ne sont pas assorties de sanctions en cas de violation. Plus encore, aucun mécanisme juridictionnel de règlement des différends, en cas de conflit, n’a été proposé.
Force est de relever en conclusion que le front entre le Liban et Israël connaît depuis 2006 une nette stabilité, le Hezbollah et l’État hébreu ne s’étant pas engagés depuis la dernière guerre dans un conflit ou affrontement armé. Reste à espérer que l'accord sur la délimitation de la frontière maritime consolidera cette situation de non-agression…
Ce nouveau tournant se reflète, et se reflétera, dans les discours et prises de position enregistrés ici et là, dépassant même le cadre libanais. «Il s’agit d’un accomplissement politique. Ce n’est pas tous les jours qu’un État ennemi reconnaît l’État d’Israël dans un accord écrit, et ce devant l’ensemble de la communauté internationale», a ainsi déclaré jeudi le Premier ministre israélien Yaïr Lapid, le jour de la signature de l’accord à Ras Naqoura. Le président de la République libanaise Michel Aoun n'a pas tardé à répliquer: «Il s’agit d’un acte purement technique, sans aucune retombée politique». Thèse que confirment certains juristes et analystes, mais que d'autres contredisent.
L’argument de la reconnaissance: verbiage ou réalité?
«La position libanaise, après l’accord sur la délimitation de la frontière maritime, demeure inchangée», explique à Ici Beyrouth l’analyste Wissam Saadé. «Le Liban ne reconnaît et ne reconnaîtra l’État d’Israël qu’une fois que le processus de paix dans la région viendra à maturation, tel que le préconise la conférence de paix de Madrid à laquelle le Liban avait participé en 1991, souligne-t-il. En d’autres termes, le Liban s’est engagé à rejeter une reconnaissance unilatérale du droit de l’État d’Israël à exister, jusqu’à la conclusion d’une paix régionale globale, dans le sillage de la conférence susmentionnée et dans le cadre du respect des résolutions internationales. Toutefois, ce discours n’est pas celui que tient le Hezbollah». Le parti pro-iranien adopte en effet une position idéologique plus ferme, refusant même l'éventualité d’une reconnaissance future de l’État hébreu.
«Ce qui pourrait déranger le Hezbollah, c’est qu’à la suite de cet arrangement, quoiqu'indirect puisqu’il a nécessité l’intervention d’une tierce partie, à savoir les États-Unis, une normalisation des relations entre le Liban et Israël s’impose», précise M. Saadé. Le parti chiite décèle dans la conclusion de cet accord une invitation à la régularisation des relations avec «l’ennemi». «C’est dans ce sens que l’on pourrait s’attendre, dans les mois à venir, à une surenchère politique de la part du Hezbollah», selon un analyste qui a requis l’anonymat. Même son de cloche chez Wissam Saadé qui souligne que la formation pro-iranienne pourrait dans un futur proche «lancer des attaques contre certaines factions politiques locales en les accusant de vouloir normaliser les relations avec Israël». Une façon pour lui de répondre aux critiques proférées contre lui et qui visent à remettre en cause la légitimité de ses armes.
Face à ces critiques, le Hezbollah pourrait rétorquer que «cet accord n’empêchera pas, à lui seul, une montée aux extrêmes». «Il n’exclura pas la possibilité de l'éclatement d’un conflit, affirme-t-on dans les milieux du parti pro-iranien. Il ne résoudra pas non plus le problème de l’application de la résolution 1701 au Liban.»
La stabilité évoquée dans certains milieux n’est donc pas forcément garantie, si l'on en croit la posture médiatique du Hezbollah. Tout dépendra de l’interprétation des clauses de l’accord au moment de son exécution, sachant que les parties prenantes devront, à chaque fois qu'un litige interviendra, se référer au médiateur américain.
Les critères d'une convention
En tout état de cause, ce que l'on peut désigner désormais sous l'appellation "d'accord de Cana-Kariche" ne saurait être perçu comme une convention internationale car pour que l’on puisse parler de convention, trois conditions doivent être satisfaites, comme l’a expliqué dans un article précédent à Ici Beyrouth l’avocat Rizk Zgheib. Il faut d’une part que la convention soit conclue entre deux États, ce qui est plus ou moins le cas, nonobstant le fait que le Liban ne reconnaît pas Israël. D’autre part, la convention doit être conclue dans le cadre du droit international. Ce qui est le cas au Liban, puisque les deux lettres qui en découlent ont été enregistrées auprès du secrétaire général de l’ONU. Enfin, la convention doit créer des effets juridiques contraignants en droit international, ce qui n’est pas le cas, puisque les obligations figurant dans cet accord ne sont pas assorties de sanctions en cas de violation. Plus encore, aucun mécanisme juridictionnel de règlement des différends, en cas de conflit, n’a été proposé.
Force est de relever en conclusion que le front entre le Liban et Israël connaît depuis 2006 une nette stabilité, le Hezbollah et l’État hébreu ne s’étant pas engagés depuis la dernière guerre dans un conflit ou affrontement armé. Reste à espérer que l'accord sur la délimitation de la frontière maritime consolidera cette situation de non-agression…
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