Conseil des ministres: Fausse polémique CPL-Hezbollah
Si, selon une source du CPL à Ici Beyrouth, «le Hezbollah est bel et bien visé par la conférence de presse de Gebran Bassil, mardi, au même titre qu’Amal», le discours du chef du CPL serait en réalité, selon la même source, voué à rester limité «pour l’instant» à l’épisode de la tenue du Conseil des ministres lundi. Le CPL n’aurait du reste «pas encore d’alternatives au vote blanc pour la présidentielle», selon la source précitée.

La réunion, mardi, du gouvernement démissionnaire malgré le boycott des ministres relevant du Courant patriotique libre (CPL), composante chrétienne majoritaire de l’équipe actuelle, était dirigée (mais seulement en partie) contre le chef du CPL, Gebran Bassil. Planifiée par le tandem chiite fort, Hezbollah-Amal, elle contribue à circonscrire la surenchère de Gebran Bassil. Ce dernier s’emploie par tous les moyens, surtout depuis la fin du mandat de son beau-père, Michel Aoun, à rester au centre de l’actualité – en atteste l’épisode des altercations provoquées il y a un mois à la MTV, sur le plateau de l'émission Sar-el Waet.

Les gesticulations de Gebran Bassil ne visent pas tant à obliger le Hezbollah à lui concéder un appui à sa candidature (il serait conscient qu’un tel pari, perdu d'avance, aurait de graves répercussions diplomatiques) qu’à s’arroger un rôle dans le choix du prochain président.

Loin de vouloir renoncer à la couverture chrétienne que lui apporte le CPL, le Hezbollah a réussi à le marginaliser politiquement, ne serait-ce que ponctuellement, parmi ses alliés mêmes. Si bien que pour y répondre, le député de Batroun a évoqué mardi, lors d’une conférence de presse, la possibilité que son parti ne souscrive plus à la consigne du vote blanc jusque-là observée par les alliés du Hezbollah pour paralyser la présidentielle. Sans se retenir d’évoquer ce qu’il considère, sur le terrain constitutionnel, comme une atteinte aux prérogatives présidentielles et au pacte national, Gebran Bassil s’est abstenu toutefois d’attaquer de plein front le Premier ministre sortant, Najib Mikati, qui a convoqué son équipe à un Conseil des ministres. «Notre problème n’est pas avec lui, mais avec ceux qui le manipulent», a-t-il affirmé, allant jusqu’à mettre en garde contre les tentatives d’aucuns de forcer «un retour à la période antérieure à 2005», en référence à la période d’exil du fondateur du CPL, Michel Aoun.

Pour un observateur contacté par Ici Beyrouth, ces propos seraient principalement dirigés contre le président de la Chambre, Nabih Berry, chef du mouvement Amal, rien n’indiquant, dans le discours du chef du CPL, une volonté de mener une offensive stratégique contre le Hezbollah. «Le CPL n’a jamais reproché au Hezbollah de l’avoir forcé à l’exil, au contraire», relève cet observateur.


Mais si, selon une source du CPL à Ici Beyrouth, «le Hezbollah est bel et bien visé par les propos de Gebran Bassil au même titre qu’Amal», le discours du chef du CPL serait en réalité, selon la même source, voué à rester limité «pour l’instant» à l’épisode de la tenue du Conseil des ministres. Le CPL n’aurait du reste «pas encore d’alternatives au vote blanc», selon la source précitée.

Cela rejoint la lecture faite des rapports «inébranlables» entre le Hezbollah et le CPL par le journaliste de l’opposition Ali el-Amine, rédacteur en chef du site Janoubia. «Si Gebran Bassil avait l’intention de proposer une alternative sérieuse au blocage de la présidentielle sciemment entretenu par le Hezbollah, il se serait adressé au patriarche maronite en s’en remettant à lui par principe, indépendamment des candidatures potentielles d’autres leaders chrétiens», relève-t-il. Or, non seulement il ne peut pas s’aventurer à menacer les intérêts stratégiques du Hezbollah, mais il n’a pas de programme à proposer. Tel est le degré de sa dépendance au parti chiite armé pro-iranien.

De son côté, ce dernier serait mû, à travers ses multiples ouvertures à différents candidats potentiels à la présidentielle, par un seul objectif véritable: gagner du temps jusqu’à ce qu’un compromis lui soit proposé par les acteurs occidentaux, estime Ali al-Amine.

Alimenter des rumeurs sur les chances des uns et des autres d’accéder à la magistrature suprême devrait les inciter à assouplir, s’il le faut, leur position à l’égard du Hezbollah.

Et les polémiques comme celle suscitée par la tenue du Conseil des ministres – le silence officiel des partis chrétiens de l’opposition sur les manœuvres du Hezbollah entretient indirectement l’apparence de polémique entre le parti chiite et le CPL – seraient un moyen de détourner l’attention de l’essentiel, à savoir la présidentielle et ses enjeux pour le pays, en pariant sur un essoufflement généralisé.
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