Bassil-Hezb: divorce maronite ou escalade pour torpiller Taëf?
Le chef du Courant Patriotique Libre, Gebran Bassil, ne veut pas d’une alliance bancale avec le Hezbollah ; il le déclare ouvertement pour la première fois en revendiquant ce qu’il considère être son droit dans cette alliance.

Pire encore, il pose ses armes sur la table et menace d’en faire usage.

Tout d’abord, force est de souligner que M. Bassil n’a pas changé d’un iota. Son attitude et sa politique qui consistent à paralyser l’État et ses institutions, bénies, adoptées, voire exploitées par le Hezbollah pour éliminer ceux qui font obstacle à son plan d’hypothéquer la souveraineté libanaise au profit de l’Iran, restent également inchangées.

Cette politique de blocage qui a donné autant de pouvoir au Hezbollah qu'au CPL demeure l’arme de prédilection de Bassil. Cependant, c’est plutôt la stratégie d’attaque, de menace, de chantage et de blocage qui change au point de dépasser la ligne rouge, et de laisser craindre un divorce entre les deux signataires de « l’accord de Mar Mikhaël ».

Le premier signe avant-coureur sur ce plan serait les allusions faites par M. Bassil en faveur d’une décentralisation généralisée revendiquée dans certains cercles chrétiens, dont celui des Forces Libanaises et du CPL. À croire que le chef des FL, Samir Geagea, attend son homologue avec impatience pour que les deux forment un tandem chrétien, ce même tandem que le premier évoquait depuis « l’accord de Meerab », avant de subir la trahison de M. Bassil, soutenu par le Hezbollah, dans sa mainmise sur le pouvoir et sur des postes ministériels clés, et ce en contrepartie d’une « couverture chrétienne » à la formation pro-iranienne, chargée de poursuivre les projets expansionnistes de son maître iranien.

En outre, M. Bassil adresse un avertissement selon lequel le vote blanc n’est plus d’aucune utilité. Là encore, M. Bassil tente de se rapprocher des Forces Libanaises pour faire chanter le Hezbollah et imposer un président avalisé par les deux chefs chrétiens. Mais croit-il sérieusement pouvoir redonner vie à « l’accord de Meerab » et guérir les blessures qu’il a lui-même infligées à M. Geagea ? Pourra-t-il renverser la table et changer son fusil d’épaule, en abandonnant son soutien à la « résistance » à la faveur d’une allégeance au « Grand Satan » ?

Il ne fait aucun doute que lui-même et le général Aoun sont passés maîtres dans l’art de la trahison. Preuve en est l'accord de Mar Mikhaël, au terme duquel son beau-père a enterré la résolution 1559 et tourné le dos aux Américains comme à tous ses alliés du temps de l’exil.


Tournera-t-il le dos au Hezb ? Les Américains le recueilleront-ils à nouveau, comme si, depuis sa brève absence, ces derniers ne faisaient qu’attendre son grand retour ? Retireront-ils les sanctions pour redorer son blason et faciliter son accès à la présidence de la République ?

Lèvera-t-il le voile sur ce qu’il avait occulté depuis le partenariat de « Mar Mikhaël » ? En tout cas, il ne tente nullement de le cacher quand il dit : « Nous nous sommes tenus à leur côté dans la rue deux années entières puisque le gouvernement était qualifié de tronqué. Le gouvernement actuel sera-t-il constitutionnel en présence de Saadé Chami et Najla Riachi ? Tout partenariat est susceptible de s’effondrer quand on le rompt, fût-il national ou le fruit d’un accord entre deux partis ». Ou bien se contentera-t-il de menaces implicites ?

Le Hezb le laissera-t-il faire, besoin oblige, et absorbera-t-il sa colère, ou renversera-t-il la table ?

Le Hezbollah tolère rarement ceux qui lui tiennent tête, à moins que cela ne serve à rendre la situation plus complexe et à attiser la haine confessionnelle à dessein, comme le font si bien M. Bassil et son beau-père, le général Aoun. Aucun effort n’a été épargné à cette fin, que ce soit pour faire la guerre aux musulmans sunnites, éliminer Saad Hariri et porter atteinte au Premier ministre en particulier, ou faire face aux druzes pour écarter Walid Joumblatt. À les voir agir, on croirait qu’il est impératif, actuellement, d’exacerber le conflit avec les chiites et de raviver le spectre du fédéralisme par le biais d’une décentralisation généralisée, dans le but de réviser l’accord de Taëf et d’amender la Constitution libanaise, conformément à la vision de l’axe iranien et ses ambitions.

L’escalade ne fait que commencer. Mais dans quelle direction ira-t-elle ? Assisterons-nous à un divorce maronite, ou à une escalade pour torpiller Taëf !?

 
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