Présidentielle: en attendant janvier...
Plusieurs candidats sont en lice pour occuper le palais de Baabda, mais le chemin pour y accéder est plus que jamais semé d’embûches.

"La course pour la présidentielle a été mise en veilleuse ces dernières semaines, en raison des fêtes de fin d’année". C’est ainsi que les responsables politiques justifient l’absence de séances électorales et la décision du président de la Chambre Nabih Berry, de ne pas réunir les députés avant janvier prochain. Pourtant, l’élection d’un chef de l’État est une échéance urgente, qui ne devrait pas être traitée de manière aussi cavalière et détachée, surtout lorsque le pays traverse la pire crise politique et économique de son histoire.

Pendant que l’écrasante majorité de la classe dirigeante profite de cet interlude peu mérité, le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, préfère "ne pas chômer", comme il l’a fièrement déclaré dimanche à sa sortie de la messe de Noël de Bkerké. En effet, le leader aouniste se trouve actuellement dans une situation peu enviable et se voit obligé de multiplier ses rencontres – dont la plupart se font en catimini – auprès de ses adversaires, pour prouver à ses détracteurs qu’il demeure un acteur important sur l’échiquier politique, du moins en ce qui concerne l’échéance présidentielle.

D’un point de vue local

Voulant se donner le rôle de marionnettiste, plutôt que celui de marionnette du Hezbollah, M. Bassil tente par monts et par vaux de s’imposer en tant que "faiseur de présidents", oubliant encore une fois que son avis compte très peu sur la scène politique. Même son allié indéfectible semble déchanter et en avoir ras-le-bol de ses "caprices". "Si le Hezb avait opté dès le début pour la candidature de Gebran Bassil, aucune de ces tensions n’auraient eu lieu", a assuré une source proche de Meerab à Ici Beyrouth. Preuve en est, la formation chiite préfèrerait de loin voir l’ancien ministre et député Sleiman Frangié (qui ne possède une assise populaire que dans son fief de Zghorta au Nord) à la tête de la magistrature suprême plutôt que le gendre de Michel Aoun, devenu peu fiable et impétueux.

Mise à part les nombreuses tensions au sein du 8 Mars, cet axe ne parvient toujours pas à se mettre d’accord sur le nom d’un candidat qui fasse l’unanimité parmi ses rangs, afin qu’il puisse succéder à Michel Aoun. D’où la décision des parlementaires proches de ce camp de voter blanc lors des dix séances électorales. Une pratique qui devrait bientôt changer, comme l’a annoncé Gebran Bassil avant les fêtes, en avançant le nom d’un candidat lors de la prochaine réunion de l’hémicycle. Pour le moment, l’identité de cette fameuse personnalité demeure secrète, laissant le champ libre aux spéculations et aux analyses politiques.

D’aucuns pensent que l’ancien ministre de l’Intérieur Ziyad Baroud, ou le PDG de la chaîne télévisée libanaise LBC Pierre Daher, seraient deux prétendants que le CPL soutiendrait pour accéder au palais de Baabda. Parallèlement, le parti aouniste refuse catégoriquement la candidature du député Michel Moawad, ou celle du commandant en chef de l’armée libanaise, le général Joseph Aoun, qu’il considère dénués de visions économiques et financières. Une position qui ne réjouirait pas toutefois certains députés aounistes, à en croire les échos qui rapportent que ces derniers voteront pour le général Aoun lors de la prochaine séance électorale, en dépit des instructions de M. Bassil.


Du côté des Forces libanaises, du parti Kataëb, du Parti socialiste progressiste, et de plusieurs députés indépendants et souverainistes, appuyer la candidature de Michel Moawad est toujours de mise. "Il est foncièrement souverainiste et il possède un plan de sauvetage, deux éléments qui le distinguent des autres candidats", a indiqué une source proche des FL. Un avis partagé par un cadre de Saïfi qui assure que son parti continuera de soutenir la candidature de M. Moawad envers et contre tous.

D’un point de vue international

Il n’est de secret pour personne que certains candidats sont plus favorisés que d’autres, du moins par la communauté internationale. Cet atout dont bénéficient quelques présidentiables est souvent interprété par l’axe du 8 Mars comme étant une insulte voire un crime.

"Globalement, nous soutenons les candidats opposés au Hezbollah, bien que nous ayons quelques favoris", a révélé une figure politique de Washington sous le couvert de l’anonymat, soulignant par la même occasion que "les États-Unis n’ont aucun inconvénient à ce que le commandant en chef de l’armée libanaise soit élu à la tête du pays".

Même son de cloche du côté de l’Arabie saoudite qui persiste à réitérer que le prochain chef de l’État ne doit être aucunement proche du parti pro-iranien, sans pour autant avancer de noms. Toutefois, l’Arabie saoudite a appelé à plusieurs reprises les officiels libanais à empêcher le pays du Cèdre de basculer entre les mains du Hezbollah.

Seule la France reste évasive sur le sujet, insistant sur l’élection d’un président qui soit "intègre", comme l’a déclaré le président Emmanuel Macron lors de sa dernière visite au Qatar, sans donner plus de détails quant aux compétences ou aux critères que devraient posséder le prochain chef de l’État.
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