La proposition de loi sur la régularisation financière mentionne tantôt des conditions «irréalisables» pour le financement du fonds de recouvrement des dépôts, tantôt elle fait référence à des lois inexistantes ou dont les décrets d’application n’ont jamais vu le jour. Elle comporte des contradictions évoquant dans certains de ses articles des règlements au niveau du secteur bancaire et dans certains autres au niveau de chaque banque séparément.
La présence du représentant du gouvernement sortant, Saadé Chami, à la réunion de la commission parlementaire des Finances et du Budget, qui a abordé mardi midi pour la deuxième fois en l’espace d’une semaine l’examen de la proposition de loi-cadre sur la régularisation financière, n’a pas réussi à calmer le mécontentement de ses membres. Au contraire, sa présence n’a fait que l'exacerber, surtout lorsque le ministre a déclaré que les chiffres qui figurent dans la proposition de loi sont «approximatifs».
Trois ans après le début de la crise, non moins d’une dizaine de plans de relance sous diverses appellations ont été dévoilés au public mais sans qu’aucun d’entre eux n’établisse une feuille de route «sérieuse» susceptible de réparer les dommages subis par les individus, les entrepreneurs, les syndicats et l’économie d’un pays dont les fondements ont été sapés.
Certains des paragraphes de la proposition de loi sur la régularisation financière recoupent des textes contenus dans la stratégie du gouvernement Mikati présentée dans le passé au Parlement. D’ailleurs, la proposition de loi a été présentée par les députés Georges Bouchikian et Ahmed Rustom, réputés pour être proches du Premier ministre sortant.
«Il ne faut pas s’attarder sur ce texte de loi, qui évoque d’importants objectifs tout en omettant de préciser les mécanismes scientifiques pour y parvenir», souligne l’ancien vice-gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Ghassan Ayache, qui ajoute par ailleurs que «le texte appréhende le règlement du trou financier par la suppression des dettes de la Banque centrale envers les banques et par conséquent la suppression des dépôts des titulaires de comptes bancaires». «Il faut le retirer de la circulation et ne pas perdre le temps des parlementaires», affirme-t-il.
Dans les faits, le texte de loi-cadre sur la régularisation financière comporte des contradictions évoquant tantôt des règlements au niveau du secteur bancaire tantôt des règlements au niveau de chaque banque séparément. Par ailleurs, il fait référence à des lois inexistantes ou qui n’ont jamais été mises en œuvre et à des conditions «irréalisables».
Pas de chiffres exacts
Le premier article de la proposition de loi stipule que la détermination de la situation financière réelle et l'ampleur du déficit financier de la Banque du Liban (BDL) se basent sur un audit comptable de son bilan, conforme aux standards internationaux. Par la suite, le trou financier sera comblé en réduisant la valeur des placements des banques en devises étrangères auprès de la BDL. Ce qui revient à dire que ceux qui ont rédigé la proposition de loi ne connaissent pas le montant du trou financier en l’absence d’un audit comptable, ne connaissent pas non plus le montant des dépôts récupérables et ceux qui ne le sont pas, et par conséquent, ils ne connaissent pas les capacités financières des banques.
Ils répètent pour la énième fois, le plus simplement du monde, la suppression des fonds des déposants. Par ailleurs, l’article 5 dispose que les banques doivent fournir à la Commission de contrôle bancaire au Liban (CCBL) des documents faisant apparaître leurs «dépôts éligibles» et leurs «dépôts inéligibles», ce qui indique une fois de plus que le texte de loi n'est pas basé sur des informations fiables et détaillées.
Dans ce même contexte, l’article 4 évoque l'extinction progressive du déficit du capital de la Banque du Liban en monnaie libanaise par, entre autres moyens, la suppression des «charges reportées, résultant de la mise en oeuvre du principe de seigneuriage». La question ici est de connaître la taille de celles-ci et leur impact sur la restitution des dépôts.
Conditions irréalisables
Par ailleurs, selon l’article 2, l’État participera, dans la mesure du possible, au rétablissement de la solvabilité financière en devises fortes de la BDL, notamment en injectant deux milliards et demi de dollars par le biais d'obligations financières et/ou tout autre moyen à déterminer par décret pris en Conseil des ministres, sur proposition du ministre des Finances. Désormais, comme tout le monde le sait, l’État n'aura pas de sitôt la capacité d'émettre des obligations. Il ne détient pas les liquidités nécessaires et doit impérativement procéder à la restructuration de sa dette souveraine.
Cela dit, le texte du projet-cadre adopte par ailleurs des slogans accrocheurs pour calmer l’anxiété des individus, comme celui de la lutte contre la corruption. Dans ce contexte, il suppose l’adoption de certaines mesures pour la récupération de montants en vertu de lois en vigueur, en particulier la loi n°214 du 08/04/2021 sur le recouvrement des fonds provenant des crimes de corruption. Une loi qui est restée lettre morte depuis sa promulgation d’autant qu’elle ne fait pas état d’un mécanisme précis pour sa mise en œuvre. Idem lorsque le projet exige des titulaires de dépôts éligibles (supérieurs à 100 000$) dans des banques viables, qui ont transféré leurs dépôts à l'étranger ou les ont utilisés, le remboursement de l'équivalent de la valeur des intérêts «excédentaires» qu'ils ont encaissés depuis 2015.Le Conseil central de la BDL fixera les taux d’intérêt excédentaires suivant la moyenne annuelle des taux.
Des contradictions
Quant aux contradictions que comporte le projet de loi, elles sont nombreuses. À titre indicatif, la contradiction des dispositions des articles 7 et 10. L’un des articles préconise un règlement des dépôts récupérables au niveau du secteur bancaire alors que l’autre article fait état d’un règlement pour chaque banque séparément. Ainsi, l’article 7 stipule de payer les montants suivants (…)à partir du total des dépôts éligibles pour chaque déposant dans des banques viables, selon la définition mentionnée dans la loi sur la restructuration des banques, à condition qu'il soit calculé au niveau du secteur bancaire dans son ensemble. Dans le même temps, l’article 10 dispose ce qui suit: «La restitution des dépôts ou d'une partie de ceux-ci est liée à la situation, à la solvabilité et à la liquidité de chaque banque, après qu'elle ait été soumise aux dispositions de la loi traitant des conditions des banques au Liban et les réorganisant».
La présence du représentant du gouvernement sortant, Saadé Chami, à la réunion de la commission parlementaire des Finances et du Budget, qui a abordé mardi midi pour la deuxième fois en l’espace d’une semaine l’examen de la proposition de loi-cadre sur la régularisation financière, n’a pas réussi à calmer le mécontentement de ses membres. Au contraire, sa présence n’a fait que l'exacerber, surtout lorsque le ministre a déclaré que les chiffres qui figurent dans la proposition de loi sont «approximatifs».
Trois ans après le début de la crise, non moins d’une dizaine de plans de relance sous diverses appellations ont été dévoilés au public mais sans qu’aucun d’entre eux n’établisse une feuille de route «sérieuse» susceptible de réparer les dommages subis par les individus, les entrepreneurs, les syndicats et l’économie d’un pays dont les fondements ont été sapés.
Certains des paragraphes de la proposition de loi sur la régularisation financière recoupent des textes contenus dans la stratégie du gouvernement Mikati présentée dans le passé au Parlement. D’ailleurs, la proposition de loi a été présentée par les députés Georges Bouchikian et Ahmed Rustom, réputés pour être proches du Premier ministre sortant.
«Il ne faut pas s’attarder sur ce texte de loi, qui évoque d’importants objectifs tout en omettant de préciser les mécanismes scientifiques pour y parvenir», souligne l’ancien vice-gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Ghassan Ayache, qui ajoute par ailleurs que «le texte appréhende le règlement du trou financier par la suppression des dettes de la Banque centrale envers les banques et par conséquent la suppression des dépôts des titulaires de comptes bancaires». «Il faut le retirer de la circulation et ne pas perdre le temps des parlementaires», affirme-t-il.
Dans les faits, le texte de loi-cadre sur la régularisation financière comporte des contradictions évoquant tantôt des règlements au niveau du secteur bancaire tantôt des règlements au niveau de chaque banque séparément. Par ailleurs, il fait référence à des lois inexistantes ou qui n’ont jamais été mises en œuvre et à des conditions «irréalisables».
Pas de chiffres exacts
Le premier article de la proposition de loi stipule que la détermination de la situation financière réelle et l'ampleur du déficit financier de la Banque du Liban (BDL) se basent sur un audit comptable de son bilan, conforme aux standards internationaux. Par la suite, le trou financier sera comblé en réduisant la valeur des placements des banques en devises étrangères auprès de la BDL. Ce qui revient à dire que ceux qui ont rédigé la proposition de loi ne connaissent pas le montant du trou financier en l’absence d’un audit comptable, ne connaissent pas non plus le montant des dépôts récupérables et ceux qui ne le sont pas, et par conséquent, ils ne connaissent pas les capacités financières des banques.
Ils répètent pour la énième fois, le plus simplement du monde, la suppression des fonds des déposants. Par ailleurs, l’article 5 dispose que les banques doivent fournir à la Commission de contrôle bancaire au Liban (CCBL) des documents faisant apparaître leurs «dépôts éligibles» et leurs «dépôts inéligibles», ce qui indique une fois de plus que le texte de loi n'est pas basé sur des informations fiables et détaillées.
Dans ce même contexte, l’article 4 évoque l'extinction progressive du déficit du capital de la Banque du Liban en monnaie libanaise par, entre autres moyens, la suppression des «charges reportées, résultant de la mise en oeuvre du principe de seigneuriage». La question ici est de connaître la taille de celles-ci et leur impact sur la restitution des dépôts.
Conditions irréalisables
Par ailleurs, selon l’article 2, l’État participera, dans la mesure du possible, au rétablissement de la solvabilité financière en devises fortes de la BDL, notamment en injectant deux milliards et demi de dollars par le biais d'obligations financières et/ou tout autre moyen à déterminer par décret pris en Conseil des ministres, sur proposition du ministre des Finances. Désormais, comme tout le monde le sait, l’État n'aura pas de sitôt la capacité d'émettre des obligations. Il ne détient pas les liquidités nécessaires et doit impérativement procéder à la restructuration de sa dette souveraine.
Cela dit, le texte du projet-cadre adopte par ailleurs des slogans accrocheurs pour calmer l’anxiété des individus, comme celui de la lutte contre la corruption. Dans ce contexte, il suppose l’adoption de certaines mesures pour la récupération de montants en vertu de lois en vigueur, en particulier la loi n°214 du 08/04/2021 sur le recouvrement des fonds provenant des crimes de corruption. Une loi qui est restée lettre morte depuis sa promulgation d’autant qu’elle ne fait pas état d’un mécanisme précis pour sa mise en œuvre. Idem lorsque le projet exige des titulaires de dépôts éligibles (supérieurs à 100 000$) dans des banques viables, qui ont transféré leurs dépôts à l'étranger ou les ont utilisés, le remboursement de l'équivalent de la valeur des intérêts «excédentaires» qu'ils ont encaissés depuis 2015.Le Conseil central de la BDL fixera les taux d’intérêt excédentaires suivant la moyenne annuelle des taux.
Des contradictions
Quant aux contradictions que comporte le projet de loi, elles sont nombreuses. À titre indicatif, la contradiction des dispositions des articles 7 et 10. L’un des articles préconise un règlement des dépôts récupérables au niveau du secteur bancaire alors que l’autre article fait état d’un règlement pour chaque banque séparément. Ainsi, l’article 7 stipule de payer les montants suivants (…)à partir du total des dépôts éligibles pour chaque déposant dans des banques viables, selon la définition mentionnée dans la loi sur la restructuration des banques, à condition qu'il soit calculé au niveau du secteur bancaire dans son ensemble. Dans le même temps, l’article 10 dispose ce qui suit: «La restitution des dépôts ou d'une partie de ceux-ci est liée à la situation, à la solvabilité et à la liquidité de chaque banque, après qu'elle ait été soumise aux dispositions de la loi traitant des conditions des banques au Liban et les réorganisant».
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