Dans la capitale soudanaise en flamme, les civils tentent de fuir par tous les moyens, alors que la situation s'aggrave d'heure en heure. Pour le moment, aucune faction armée n'a pu remporter une avancée significative. Dans ce déchaînement de la violence, les morts se comptent par centaines et les cadavres jonchent les rues.

Des milliers de civils ont fui mercredi sous les bombes la capitale du Soudan, où les combats entre les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) et l'armée régulière ont tué plus de 270 civils en cinq jours.

A pied ou en voiture, sur des routes bordées de cadavres et de blindés calcinés, des milliers de Soudanais tentent de passer sous les tirs croisés des FSR du général Mohamed Hamdane Daglo , dit "Hemedti", et de l'armée que dirige le général Abdel Fattah al-Burhane , aux commandes depuis leur putsch conjoint de 2021.

 



Alors que les combats touchent principalement Khartoum et le Darfour, les deux généraux rivaux restent sourds aux appels au cessez-le-feu.

Dans la capitale de plus de cinq millions d'habitants, l'électricité et l'eau courante font défaut et les balles perdues transpercent régulièrement un mur ou une fenêtre. Parfois une bombe venue du ciel réduit un immeuble ou un hôpital à un tas de gravats.

Plus de 270 civils ont été tués depuis samedi, ont rapporté dans un communiqué 15 ambassades occidentales qui préviennent qu'il ne s'agit que d'un bilan "provisoire". L'ONU avait fait état lundi soir de près de 200 morts.

Mercredi, l'armée a dit s'être battue avec les FSR autour d'une des agences de la Banque centrale et que "des sommes astronomiques ont été volées".

L'armée de l'air et l'artillerie des deux camps ont bombardé neuf hôpitaux de Khartoum. En tout, 39 des 59 hôpitaux des zones touchées par les combats ont été mis hors d'usage ou forcés de fermer, rapportent des médecins.

Quant aux stocks de nourriture, déjà limités dans un pays avec une inflation à trois chiffres, ils s'épuisent et aucun camion d'approvisionnement n'est entré à Khartoum depuis samedi.


Dans un pays de 45 millions d'habitants où la faim touche plus d'un tiers de la population, humanitaires et diplomates disent ne plus pouvoir travailler: trois employés du Programme alimentaire mondial (PAM) ont été tués au Darfour et l'ONU dénonce "des pillages, des attaques et des violences sexuelles contre des humanitaires".



Pour fuir les violences, des milliers de femmes et d'enfants ont pris la route mercredi vers les provinces qui bordent Khartoum, selon des témoins.

Des cadavres gisent sous un soleil de plomb. Alors que des odeurs pestilentielles commencent à s'en dégager, quelques personnes s'aventurent pour les recouvrir d'un drap. Un homme explique qu'il veut empêcher les chiens errants d'en approcher.

Parfois, dans un vacarme pétaradant, un convoi de combattants juchés sur des pick-ups passent en vitesse ou d'autres postés en bord de route contrôlent les véhicules.

A quelques dizaines de kilomètres de la capitale, la vie se poursuit comme si de rien n'était avec des magasins ouverts et des transports qui fonctionnent normalement.

A Khartoum en revanche, les attaques n'épargnent personne, pas même les étrangers. Le patron belge de la mission humanitaire de l'UE a notamment été "hospitalisé" après avoir été touché par balle.

Après cinq jours de combats, impossible de savoir qui contrôle quoi, tant la confusion est totale et la désinformation en ligne galopante. Les images satellitaires montrent toutefois l'étendue des dégâts, visibles notamment au QG de l'état-major.

Une dizaine d'avions gisent en cendres sur le tarmac de l'aéroport, le siège des renseignements généraux apparaît ravagé, ce qui était un dépôt de camion-citernes d'essence n'est plus qu'une immense tache noire.

Roger Barake, avec AFP
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